Dans l'état actuel des choses et au vu des rapports de force qui animent aujourd'hui l'échiquier tunisien, le remaniement ministériel attendu a un seul et unique objectif : permettre au parti Ennahdha de se prévaloir d'une majorité confortable au sein de l'Assemblée nationale constituante pour pouvoir peser sur le vote concernant les articles de la prochaine Constitution.
Il s'agit d'une tactique provisoire qui permettrait à l'ANC d'adopter dans une première étape les articles de la Constitution avant le vote final qui exigera l'accord des 2/3 des élus. Rappelons à cet effet que la procédure de vote telle qu'expliquée dans l'article 3 de la loi n°6 qui organise temporairement les pouvoirs publics exige l'aval de la majorité absolue des élus, c'est-à-dire numériquement parlant, il faut l'accord de 109 élus. Or, avec ses 89 élus, le parti Ennahdha a besoin d'au moins 20 élus. Si l'on considère que le parti Ettakatol est critique aux visions constitutionnelles du parti islamiste et donc il va se désolidariser lorsqu'on votera les articles «dangereux» et si l'on considère que le CPR se trouve composé aujourd'hui d'une dizaine d'élus, il apparaît clairement que le parti de M. Ghannouchi aura du mal à imposer sa Constitution qui prévoit notamment dans l'article 95 la possibilité d'armer des groupuscules échappant au contrôle de l'armée et de la police.
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