Afrique: Quand les plus pauvres payent le lourd tribut de la corruption

En plus de la pauvreté, beaucoup d'Africains sont quotidiennement exposés à des pratiques de corruption qui témoignent de la faillite des méthodes de lutte contre cette corruption, utilisées par les gouvernants
14 Novembre 2013

En plus d'être quotidiennement confrontées aux affres de la précarité, les populations africaines vulnérables sont les plus touchées par la corruption. Un paradoxe relevé par l'organisation Afrobarometer dans une étude qu'elle a rendu publique le mercredi 13 novembre 2013 à Dakar. Un document qui installe politiciens, députés, fonctionnaires, policiers et agents des impôts à la première loge des personnes les plus corrompus en Afrique.

La population pauvre d'Afrique doit batailler ferme pour espérer sortir de l'ornière. En plus des combats qu'elle mène quotidiennement pour sa survie, cette frange très vulnérable doit faire face à d'autres obstacles tels que la corruption qui a de beaux jours devant elle, vue l'ampleur de ce phénomène.

L'organisation Afrobarometer a levé un coin du voile à travers une enquête menée avec un index fait sur la base d'un certain nombre d'indicateurs qui se rapportent aux services sociaux de base mis ensemble.

Ayant interrogé 51000 citoyens entre octobre 2011 et juin 2013 dans 34 pays africains l'enquête révèle que les populations qui ont le plus de difficultés à trouver de la nourriture sont les plus touchées par la corruption. Elle  mentionne que les citoyens les plus pauvres sont davantage confrontés aux pots-de-vin que ceux dont la situation financière est plus favorable.

Les résultats de ce travail de recherche d'Afrobarometer font remarquer que la corruption touche avant tout les plus pauvres. « Les Africains manquant souvent de nourriture perçoivent un niveau plus élevé de corruption au sein de leur gouvernement et sont davantage susceptibles de payer un pot-de-vin, d'offrir un cadeau ou d'accorder une faveur à un fonctionnaire afin d'obtenir des documents officiels, d'accéder aux services publics, de trouver une place dans une école primaire pour son enfant ou d'éviter un problème avec la police ».

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Le document relève que près d'une personne sur cinq interrogées, a payé un ou plusieurs pots-de-vin à des fonctionnaires au cours de l'année passée afin d'obtenir un document officiel ou un permis de conduire. A leur avis, payer un pot-de-vin pour bénéficier de soins médicaux ou éviter un problème avec la police sont les deux autres pratiques auxquelles elles sont souvent confrontées.

Dans ce registre, Afrobarometer révèle que la Sierra Leone, le Maroc, la Guinée, le Kenya et l'Egypte sont les pays où les habitants sont les plus nombreux à payer un pot-de-vin pour obtenir un service ou éviter un problème, contrairement à la Namibie, l'Île Maurice, le Cap-Vert et le Botswana, où ils sont les moins nombreux à se livrer à cette forme de corruption.

Les enquêteurs se sont émus du fait que pour bénéficier des services sociaux de base comme un branchement sur les réseaux d'adduction d'eau, les soins de santé primaire, obtenir des pièces d'états civils, des installations sanitaires, entres autres, beaucoup de populations généralement pauvres sont obligées de « passer à la caisse ». Près d'une personne sur cinq (18%) ayant manqué au moins une fois de nourriture au cours de l'année passée, affirme avoir payé un pot-de-vin à un fonctionnaire pendant la même période pour bénéficier de soins médicaux.

Ce qui fait dire à l'enquête que les populations les plus pauvres sont davantage confrontées aux demandes de pot-de-vin dans.
De l'avis des enquêteurs la corruption semble également fragiliser la démocratie. Les habitants qui perçoivent un niveau plus élevé de corruption au sein de leur gouvernement sont plus susceptibles de ne pas être « du tout satisfaits » ou « pas vraiment satisfaits » de la manière dont fonctionne la démocratie dans leur pays.

Policiers, politiciens, députés, agents impôts…les plus corrompus

Devant l'ampleur du phénomène, malgré les énormes moyens jusque-là déployés, la majeure partie des populations des 34 pays africains interrogés sont loin d'être satisfaites de la démarche de leur gouvernement. D'ailleurs, beaucoup d'entre elles condamnent les « efforts » de leurs gouvernements en matière de lutte contre la corruption. Elles considèrent que les gouvernements ont failli dans leur lutte pour endiguer la corruption.

La majeur partie des enquêtées sur l'ensemble des 34 pays considèrent que les policiers sont les plus corrompus. Cette perception est plus marquée au Nigeria (78%), au Kenya (69%), et en Sierra Leone (69%).

Après un large tour d'horizon, Afrobarometer considère qu'en ce qui concerne la corruption vécue, l'Afrique Méridionale est la région la moins touchée. Elle est suivie successivement de l'Afrique de l'Ouest, l'Afrique du Nord et de l'Afrique de l'Est qui est la plus affectée.
Face à cette situation, il est recommandé de combattre la corruption pour mieux lutter contre la pauvreté et améliorer les démographies.

Il est aussi conseillé la création de structures qui aideraient à mieux combattre ce phénomène. Dans ce cadre, le Pr Babaly Sall, point focal d'Afrobarometer parle de la création de guichets de dénonciation de la corruption, ouverts aux populations. Il pense aussi à la mise à disposition d'un numéro vert.

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