Afrique: Dividende démographique – Le Cap-Vert, un cas à méditer

Le rapport de l'Unicef recommande d'investir en faveur des filles et des femmes puisque le taux de fécondité pour une femme qui a eu accès à l'éducation est plus faible.
11 Août 2014

Les pays africains marchent à grands pas vers le dividende démographique qui est perçu comme le coup de pouce que le changement dans la structure d’âge d’une population peut apporter au développement économique d’un pays. A l’étape de la réflexion, de la définition de stratégies et de la mise en œuvre, le Cap-Vert est cité en exemple pour les pays de l’Afrique de l’Ouest.

La Banque Mondiale, dans sa fiche de présentation des pays, informe que le Cap-Vert qui a une population estimée à 499 000 habitants, connaît toujours une croissance rapide. Un Etat de fait que des responsables du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) lient en partie à la baisse de la fécondité relevée dans ce pays. Lors d’une rencontre d’information sur « les enjeux du dividende démographique en Afrique » tenue ce jeudi 7 août 2014 à Dakar, des responsables de cette organisation justifient les bonnes performances économiques du Cap-Vert par l’investissement que ce pays a fait sur le plan du dividende démographique.

Le Conseiller régional en population et développement, chef de l’unité Données et politiques du bureau Dakar de l’UNFPA, M. Laurent Assogba, estime que le Cap-Vert présente les meilleurs indicateurs en matière de dividende démographique. Pour lui, cette situation s’explique par sa population qui est très active avec un niveau d’éducation qui augmente au fil des ans et une bonne gouvernance politique.

M. Assogba adosse ces résultats économiques à la nouvelle situation démographique de ce pays où la moyenne est de« moins de trois enfants par femme ». A l’en croire, le Cap-Vert a réussi cette prouesse à travers une politique d’éducation de masse où tout le monde est responsabilisé, homme comme femme. A cela s’ajoute une prise de conscience collective sur la contrainte que constitue l’environnement physique de ce pays.

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Cet éclairci montre l’énormité des enjeux sur le dividende démographique qui est de plus en plus scruté par les pays africains.

Selon le l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), l’arrivée sur le marché du travail de 160 millions de jeunes entre 2010 et 2030 peut accélérer la croissance économique. Mais ces pays profiteront de ce « dividende démographique », comme l’ont fait depuis 40 ans les pays aujourd’hui émergents, à condition de baisser leurs taux de fécondité, ce qui permettra de réduire le nombre d’inactifs à charge par actif. « Avec plus de cinq enfants par femme en moyenne, ces taux restent les plus élevés au monde ».

Dans la même veine, un chercheur de l’IRD affirmait dans la synthèse d’une étude qu’avait réalisé l’Agence Française de Développement (AFD) dans 12 pays ouest-africains : « planification familiale et promotion de la contraception sont parmi les principaux leviers d’une croissance économique durable. Mais pour ce faire, ces pays doivent affecter à cette politique des moyens 3 à 5 fois plus importants qu’aujourd’hui. Sauront-ils négocier ce tournant démographique décisif ? »

L’UNFPA travaille activement pour la réussite de ce tournant qu’il qualifie de crucial. Selon Hugues Koné, Conseiller régional en communication, « l’Afrique doit profiter de la puissance que représente sa jeunesse, la valoriser pour en tirer le maximum de profit ».

Des fortunes diverses en Afrique

UNFPA précise que les pays africains se trouvent à des stades différents du processus et que la majorité est encore tout au début du processus, où il s’agit d’initier ou d’accélérer la baisse de la fécondité. Pour ceux qui sont un peu avancés, le défi est de traduire la baisse des taux de dépendance en une augmentation de l’épargne et de l’investissement.

Selon l’UNFPA, une poignée de pays d’Afrique Australe voit déjà les premiers effets sur la croissance et la scolarisation. Entre 1990 et 2005 par exemple, le niveau moyen des dotations scolaires publiques par enfant en Afrique du Sud a presque doublé, passant de 455 dollars à 845 dollars par enfant. « Environ 53% de cette croissance provient de la baisse du taux de dépendance ».

C’est dans cette perspective que l’UNFPA fait savoir aux autres pays africains que le dividende démographique est à la portée de tous, mais n’est pas garanti pour personne. « Chaque pays récoltera ce qu’il aura semé. Le dividende obtenu dépendra de la diligence des politiques mises en œuvre ». Avant d’ajouter que: « la qualité des politiques dépendra du niveau de ressources engagées, mais aussi de l’adéquation des politiques au contexte national. Un suivi rigoureux est nécessaire et pour l’assurer, la capacité nationale d’analyse du dividende jouera un rôle essentiel ».

Très enthousiaste, le Fonds des Nations Unies pour la Population souligne que le dividende démographique est important mais pas forcément suffisant pour l’émergence. Pour quelques pays, fait-il remarquer, ce coup de pouce démographique peut accélérer le passage au statut de pays à revenu intermédiaire. Si leur rythme de croissance économique de ces deux dernières années était boosté de 25% (comme pour le dividende Coréen), le Botswana, la Namibie, et l’Afrique du Sud pourraient atteindre le seuil de 10,000 dollars de PIB/habitant d’ici l’an 2030.

Pour d’autres, poursuit-il, le dividende à lui seul ne permet pas de franchir la barre des 10000 dollars à moyen terme, mais il jouerait un rôle décisif. Enfin, l’UNFPA pense que les pays qui ne baisseraient pas leur fécondité avant le vieillissement de leur population manqueraient leur fenêtre d’opportunité. « Ils pourraient ainsi s’enliser dans un cycle vicieux de faible croissance, faible investissement et pauvreté ».

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