Afrique: Dr Awa Mbow Kane, présidente de l'association Réseau Métabolisme Diabète Nutrition (Rémedian) – « Il importe d'avoir une prise en charge effective de ces patients diabétiques de type 2 »

Mme Awa Mbow KANE, Président de l'association Réseau Métabolisme Diabète Nutrition (REMEDIAN)
14 Novembre 2016
interview

Le Sénégal, à l'instar de la communauté internationale, célèbre ce lundi 14 novembre, la journée internationale du diabète. La Clinique MEDIC'KANE basée à Dakar, n'a pas dérogé à la règle. En prélude, une séance de dépistage gratuite s'est tenue, le samedi 12 novembre dans l'enceinte de la structure médicale. Pour innover, le panel habituellement animé par des spécialistes a fait la place à une séance pendant laquelle la parole était libre entre malades, personnes affectées, acteurs de la santé, population… L'occasion a été saisie par allafrica.com pour interpeller Mme Awa Mbow Kane, Diabétologue, Endocrinologue à la Clinique MEDIC'KANE et présidente de l'association Réseau Métabolisme Diabète Nutrition (REMEDIAN),coorganisatrice de cet événement, de faire un round-up sur, particulièrement, le diabète de type 2 et la maladie dans sa globalité au Sénégal et un peu en Afrique.

Quel est l'objectif visé à travers l'organisation des activités qu'ont organisé MEDIC'KANE et Remedian dans le cadre de la journée mondiale du diabète ?

Nous célébrons la journée mondiale du diabète qui est fixée par la Fédération Internationale du Diabète et l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le 14 novembre de chaque année. Déjà, pour la Fédération Internationale du Diabète, novembre est le mois du diabète. Nous avons choisi la date du 12 novembre en anticipation parce que nos patients nous ont demandé, il y a quelques années de cela, d'éviter de célébrer cette journée en semaine, ce qui leur permet d'être plus disponibles pour venir y assister.

%

L'activité est organisée chaque année par la clinique MEDIC'KANE. Cette année, c'est co-organisé avec  Remedian, une association qui vient de naître cette année. L'organisation de la journée consiste à un dépistage et des conférences.

Cette année, nous avons décidé de faire les choses un peu différemment. Il n'y aura pas une conférence proprement dite mais nous allons laisser la parole aux patients, à leurs accompagnants pour qu'ils s'expriment sur leur ressenti sur le diabétique et son entourage par rapport à sa maladie.

L'objectif est de faire de la prévention, inciter les gens à connaître le diabète, à s'en prémunir et quand ils sont diabétiques, les inciter à faire au mieux pour que la maladie n'évolue pas par des complications terribles.

Quelle est la situation actuelle de la maladie au Sénégal ?

La situation était effectuée. Il y a une enquête qui a été menée par le ministère de la santé qui est l'enquête STEPS qui a permis d'évaluer le taux de prévalence du diabète au Sénégal, de l'excès de cholestérol, du tabagisme, de l'obésité… Un certain nombre de paramètres ont été visualisés, avec l'appui de l'Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie. C'est une enquête nationale qui nous donne un taux de prévalence du diabète dans la population générale de 2,1%. On pensait que ce serait plus. Mais l'enquête a donné ce résultat en indiquant également une prévalence plus élevée de 2,5% chez les hommes.

Qu'est ce qui explique cette tendance haussière chez les hommes ?

Les facteurs de risque du diabète sont biens connus. Ce sont le surpoids, la mauvaise alimentation, le déficit en activité ou exercice physique et les antécédents familiaux. Quand quelqu'un a des antécédents familiaux de diabète, il importe pour lui d'éviter les excès alimentaires et d'avoir une activité physique importante.

Est-ce que le Sénégal peut-être cité en exemple comparé à la situation globale en Afrique ?  

Pour la maladie, le Sénégal a un bon comportement par rapport aux pays voisins. Mais il faut savoir que le diabète est une pathologie qui est en pleine expansion dans le monde. S'il n'est pas très élevé, pour l'instant au Sénégal, il y a quand même un risque important du à la sédentarité des patients qui utilisent beaucoup les transports en commun et marchent très peu. Une situation également due à la suralimentation avec une surconsommation de graisse, de sucre rapide et de calories. Donc, tout ça favorise la survenue du diabète. Il importe que nous fassions en sorte que de ne pas atteindre des taux de 5 à 10% comme ça se voit souvent en Afrique du Nord.

Nous ne sommes pas encore là mais il importe de s'intéresser à la question et d'agir en termes de prévention sur les populations jeunes et surtout sur les enfants. Les enfants qui sont aujourd'hui en surpoids sont les obèses de demain et sont les diabétiques à un âge très jeune. Ce sont des diabétiques, des hypertendus, des hypercholestélorémiques à bas âge. Ça nous le voyons déjà arriver dans les écoles. Il y a une trentaine d'années, des enfants obèses ou en surpoids n'existaient pratiquement pas. Maintenant, il y en a beaucoup et il faut que toute la population soit mobilisée sur ce fait.

Comment justifiez-vous le choix du thème « Les yeux sur le diabète (focus sur le diabète de type2) » choisi cette année pour la célébration de la journée mondiale du diabète?

La Fédération Internationale du Diabète donne un thème et cette année c'est « Les yeux sur le diabète de type 2 ». Ce qui veut dire : ayons le regard sur le diabète de type 2, faisons attention au diabète de type 2. La fédération demande toujours d'avoir des messages de prévention. Il s'agit d'une prévention primaire, c'est-à-dire faire en sorte d'éviter la survenue du diabète. Il y a également une prévention secondaire qui signifie qu'une fois le diabète est là, faire en sorte que l'évolution vers les complications soit le plus ralentie possible.

Quel message lancez-vous aujourd'hui à l'endroit des politiques ?

Au Sénégal, on a eu de bonnes initiatives dans le domaine du diabète qui étaient celles de faire baisser très tôt de façon considérable le prix de l'insuline par rapport aux pays voisins. Donc, l'insuline est tout à fait abordable. Cependant, la personne qui a souvent le diabète est polymédiquée, c'est-à-dire qu'elle prend beaucoup de médicaments. La maladie s'associe souvent avec hypertension artérielle à trouble de la lipidémie, c'est-à-dire augmentation du cholestérol. Souvent ça fait des patients qui ont beaucoup de médicaments à prendre. Donc, il importerait qu'il ait une prise en charge effective de ces patients diabétiques de type 2 afin que la pression financière de cette maladie soit moins lourde. C'est une maladie dont les soins sont globalement coûteux surtout qu'elle est chronique. Elle évolue tout au long de la vie une fois qu'on l'a. Par conséquent, il faut que le diabétique puisse être aidé et appuyer pour que l'ensemble des médicaments qu'il prend soit à des prix très abordables.

La deuxième chose c'est que nous avons un devoir de prévention du diabète sur la population jeune. Je pense qu'il faut que les ministères concernés puissent à la fois travailler ensemble pour que de concert, éviter l'épidémie du diabète.

Pour terminer, je pense que maintenant que l'enquête STEPS a été bouclée et que nous avons les taux de prévalence d'un certain nombre de maladies, il serait bon que le ministère de la santé puisse associer tous les intervenants dans ces domaines. A la fois, les intervenants du public que ceux du privé pour avoir une définition de politique commune qui soit au bénéfice des populations. Je pense que l'action en direction du privé mérite d'être améliorée. L'action en direction des professionnels de santé par nos autorités, en les impliquant davantage dans les politiques publiques de santé, mérite d'être améliorée.

…et à l'endroit des populations ?

Il faut leur dire d'éviter d'avoir peur de cette maladie. Beaucoup de gens ont peur de se faire dépister et comme ça ils arrivent à un stade de diabète très évolué où il est difficile d'être efficace. Il faut dire de prendre des mesures de prévention qui soient adaptées, c'est-à-dire l'activité physique, une bonne alimentation, éviter le surpoids. Enfin, il faut aussi leur demander de se faire dépister pour pouvoir connaitre son statut et se battre contre cette maladie.

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.