Ile Maurice: Police dysfonctionnelle sur fond de société disloquée

Si le pays n'avait qu'à surmonter la crise provoquée par les dysfonctionnements outrageants de la police, la situation aurait été gérable si on arrivait à réinventer nos hommes et femmes en uniforme en éléments honnêtes, clean et hautement performants.

La crise prend une dimension plus dramatique en raison de la dislocation même de la société mauricienne qui perd inéluctablement toutes ses valeurs traditionnelles, qui avaient jusqu'ici assuré la cohésion de la famille et un rapport civilisé entre les citoyens du pays.

Une réforme radicale et miraculeuse de la police ne serait pas suffisante pour assurer l'ordre et la paix. Il faudrait aussi entreprendre une vaste opération d'ingénierie sociale pour stopper la dislocation de notre société. La perte des valeurs est entraînée en grande partie par l'explosion des médias sociaux qui exposent les Mauriciens, les jeunes et mêmes les enfants, à des mœurs des plus révoltantes en pratique dans des pays étrangers et dans notre pays même.

Quelques cas "d'excès" sont portés à l'attention des autorités impotentes et inefficaces, mais c'est une énorme lame de fond qui balaie la société mauricienne. La crise s'aggrave davantage avec la forte consommation de drogue, surtout synthétique, dans le pays, au point que Maurice est même répertorié dans les records mondiaux.

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Abordons un cas en particulier qui résume tout le drame que vit la nouvelle île Maurice. Cela s'est passé dans le village de Plaine-des-Roches le 27 mai et concerne un homme de 25 ans et sa mère de 44 ans. L'homme est drogué et quand il demande de l'argent il essuie un refus. Il part voir sa grand-mère maternelle qui décide elle aussi de ne pas lui procurer de l'argent. Que fait alors le jeune homme ? Il se cache dans un buisson, voit sa maman entrer dans un taxi, court s'engouffrer dans le véhicule et s'empare du sac à main de la femme et s'enfuit. Oui, un tel incident s'est produit dans l'île Maurice de 2022.*

Partout dans le pays, la consommation de drogue et les moyens de trouver de l'argent pour nourrir cette addiction causent bien des tristes, mais révoltants incidents familiaux. Tout en donnant lieu à bien des cambriolages, vols à l'arraché, agressions physiques, pillages des plantations et vergers. On vole surtout dans la famille même. Heureusement que la grande majorité des Mauriciens éprouvent un grand complexe d'infériorité envers les Européens, sinon on aurait littéralement massacré nos touristes pour leur voler leurs euros, dollars et livres sterling en sus de leurs bijoux, portables et caméras.

Voilà la nouvelle société que la police mauricienne est appelée à gérer. Il est amplement évident que la police se trouve dans l'incapacité de fonctionner pour faire face aux nouveaux défis. Donc, une remise en question radicale de l'institution même s'impose. Une réforme majeure en s'appuyant sur les ressources organisationnelles dont dispose Maurice ne serait pas suffisante. Maurice devrait dépenser gros pour trouver les meilleurs gestionnaires de police à l'étranger et leur demander d'apporter des réformes en profondeur. Il faudrait de ce fait remplacer tout l'échelon décisionnel se trouvant à la tête de la police actuellement.

Une remise en question de la politique de recrutement devrait être aussi entreprise. La pratique du clientélisme politique dans l'embauche des policiers est en grande partie responsable du dysfonctionnement généralisé de cette institution. Une bonne dose de discrimination positive devrait être introduite pour aussi recruter des jeunes fortement motivés à porter l'uniforme et assurer la sécurité de la population mais qui n'ont pas bien réussi à leurs examens de fin d'études. Parallèlement à l'abandon de la politique de n'employer à l'outrance que nou-bann ; il faudrait aussi envisager le limogeage sur une grande échelle de tous les éléments corrompus et frauduleux qui opèrent dans le système.

Les spécialistes étrangers devraient aussi exposer nos policiers à l'utilisation de la technologie et la psychologie dans la détection des crimes et l'interrogatoire des suspects. On se demande à quoi sert le dispositif Safe City au coût de Rs 19 millions qui n'aura servi qu'à détecter quelques rares cas. Technologiquement, il est possible d'arrêter un voleur de portable dans les minutes qui suivent ce délit. Il suffit de mettre en place une procédure expresse pour qu'on obtienne l'autorisation d'un juge pour monter cette opération à partir des ressources techniques qui existent déjà. Il est tout autant possible d'utiliser la technologie pour mettre fin très rapidement à un rallye illégal et bruyant de motocyclettes et collecter presque tous ces deux-roues impliqués dans l'événement.

Sans l'apport organisationnel et technologique de professionnels étrangers, sans une remise en cause fondamentale de son mode de fonctionnement, la police mauricienne restera pour toujours un corps gangrené, contre-productif et budgétivore. Il ne faudrait pas limiter l'expertise étrangère qu'à l'art de remporter des élections générales.

*https://www.lexpress.mu/ node/409375#comment-5873261837

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