Cote d'Ivoire: Projet de loi sur la polygamie - Des organisations féminines dénoncent un recul des droits de la femme

13 Juillet 2022

" Adopter une loi portant sur la légalisation de la polygamie optionnelle pour les hommes en Côte d'Ivoire sera contradictoire à nos nombreux engagements pour la protection des droits des femmes ivoiriennes et de l'égalité de sexe.

Il existe un comité chargé de vérifier les entorses faites par les Etats signataires. Beaucoup de textes internationaux ratifiés par notre pays n'autorisent aucun élu, aucune institution à faire du rétropédalage en matière de droit positif ". Voilà qui est clair pour la Ligue ivoirienne des droits des femmes et l'Association pour le droit des femmes. Ces deux associations, par la voix de Mme Constance Yaï, ancienne ministre de la Femme, rejettent catégoriquement la proposition de loi sur la polygamie optionnelle que s'apprête à introduire Sangaré Yacouba, député élu de la circonscription électorale de Koumassi, pour son adoption à l'hémicycle.

Si cette loi venait à être adoptée, l'homme qui le souhaite selon le député Sangaré pourra se marier civilement à autant de femmes de son choix. Car la polygamie sera régie par la loi. " A moins qu'il ne s'agisse de plaisanterie de fort mauvais goût, ou d'un ballon d'essai, on est en droit de se demander si les propos que nous avons entendus de la bouche de notre parlementaire ont juste pour objet de diviser notre pays, de fragiliser la communauté nationale ou tout simplement de faire régresser notre arsenal juridique et les droits des femmes ", a lancé hier Mme Constance Yaï au point-presse qu'elle animait à Marcory.

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Cette proposition de loi, a assené Mme Yaï, est un recul dans les droits de la femme en Côte d'Ivoire. Or, la Constitution ivoirienne en son article 4 mentionne que " Tous les Ivoiriens naissent et demeurent libres et égaux en droit. Nul ne peut être privilégié ou discriminé en raison de sa race, de son ethnie, de son clan, de sa tribu ou de son sexe ". Et, dans l'article 28 " L'Etat s'engage à respecter la Constitution, les droits de l'homme et les libertés publiques ".

De plus, dans le souci de l'amélioration des droits des femmes, la Côte d'Ivoire a-t-elle ajouté, avait déjà commencé à ratifier en 1995 la Convention sur l'élimination des discriminations à l'égard des femmes. " Cette convention engage les États signataires ou adhérents à éliminer toute forme de discrimination envers les femmes, et à favoriser leur plein développement dans l'ensemble des domaines politiques, économiques, sociaux, culturels et civils ", a-t-elle cité. Ce n'est pas tout. Le protocole de Maputo de 2003 dont est signataire la Côte d' Ivoire, a indiqué la conférencière, est un protocole international de l'Union Africaine, amenant les États signataires à garantir les droits des femmes, y compris le droit de participer au processus politique, l'égalité sociale et politique avec les hommes.

Au vu donc de toutes ces avancées, la polygamie a indiqué Mme Constance Yaï, ne saurait être légalisée en Côte d'Ivoire. Au demeurant si ce projet de loi venait à être adoptée, vu la très faible proportion de femmes députées, les deux associations a-t-elle prévenu, n'excluent pas de traduire l'Etat ivoirien devant les juridictions internationales. Car la loi a-t-elle déclaré, doit être impersonnelle, et s'adresser aux hommes comme aux femmes. Aussi, sachant que contrairement à ce qu'on peut croire, la polygamie désigne un régime matrimonial où un individu qu'il soit homme ou femme est lié au même moment, à plusieurs conjoints ou conjointes, elle a posé la question de savoir " sommes-nous capables d'assumer la polygamie féminine dans un principe d'égalité de droits femme-homme ".

Interrogée sur la polygamie de fait qui existe déjà en Côte d'Ivoire, Mme Yaï a déclaré que pour elle, il ne s'agit pas de mariage. Selon elle, il y a une sorte de monétisation des relations sexuelles en Côte d'Ivoire.

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