Mali: Quel avenir pour la Minusma ?

19 Juillet 2022
analyse

Le 29 juin dernier, le Conseil de sécurité de l'Onu prolongeait d'un an le mandat de la Minusma. Une prolongation faite en dépit de l'opposition des autorités maliennes à certaines dispositions de la résolution adoptée à cette occasion.

Le Mali est surtout opposé au fait que les Casques bleus puissent mener librement des investigations sur les questions relatives aux droits de l'homme.

L'arrestation, le 10 juillet dernier, d'une quarantaine de casques bleus ivoiriens accusés par les autorités maliennes de vouloir conduire une opération de déstabilisation est venue compliquer les relations déjà tendues entre Bamako et les Nations unies.

Le Mali a annoncé dans la foulée, la suspension de toutes les rotations des troupes de la Minusma.

Cette situation, combinée au retrait de la force militaire française, pourrait pousser plusieurs pays à revoir leur engagement au sein de la Minusma, selon Ornella Moderan, chercheuse à l'Institut d'études de sécurité (ISS) qui cite notamment l'Allemagne, la Suède ou le Royaume-Uni.

L'Egypte a annoncé la semaine dernière, la suspension temporaire de ses activités au sein de la mission onusienne. Le Caire explique sa décision par les attaques dont seraient victimes ses soldats.

"C'est un geste dangereux"

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Pour Mukhtar Mumuni Muktar, expert en sécurité au West Africa Center for Counter-Extremism (WACCE), les récentes positions du Mali pourraient avoir des conséquences négatives sur l'avenir politique du pays.

"Si c'est vrai et que l'objectif est de couper les liens avec la mission de l'Onu, de couper les liens avec la France et les partenaires extérieurs liés à la France, c'est un geste dangereux. C'est un geste dangereux non seulement pour les dirigeants du Mali mais aussi pour le peuple malien et les perspectives de retour du pays à un régime démocratique et civil. Il y a un énorme budget militaire qui est soutenu par les partenaires, le fait de couper les liens avec eux vous met dans une situation difficile de devoir financer vos propres programmes de sécurité. Vous devez jongler avec la satisfaction des besoins de développement et des aspirations du peuple malien. Il s'agit d'une situation complexe à une époque où nous sommes confrontés à une crise mondiale, une crise alimentaire et une crise du coût de la vie. Cela créerait encore plus de dommages et de difficultés pour le peuple malien", explique l'expert.

Question de souveraineté

Quant à Jonathan Offei-Ansah, analyste africain et éditeur de l'Africa Briefing Magazine-UK, il demande que les choix du Mali, en tant que pays souverain, soient respectés.

"Au bout du compte, à mon avis, après tant d'années de présence des forces de maintien de la paix et des troupes étrangères dans le pays, les activités djihadistes n'ont pas diminué, donc si le gouvernement estime qu'il peut recourir à ses propres moyens pour contrer l'insurrection djihadiste, qu'il en soit ainsi. Cela va leur coûter de l'argent et d'autres choses, mais, s'ils pensent pouvoir le faire, oui pourquoi pas, après tout c'est un pays souverain", estime le chercheur.

Cependant, ajoute Jonathan Offei-Ansah, "aucun pays n'est une île isolée. Le Mali doit donc travailler en accord avec ses voisins, non seulement avec la communauté internationale mais aussi avec ses voisins, pour contrer la menace djihadiste."

La Minusma, créée en 2013 pour soutenir le processus politique malien, est la mission de maintien de la paix de l'Onu ayant subi le plus de pertes humaines. 177 de ses casques bleus ont trouvé la mort dans le pays. La mission compte 13.289 militaires et 1.920 policiers.

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