Cameroun: Visite d'Emmanuel Macron - Pourquoi des partisans de Frank Biya ont été interpelés

Ils projetaient de manifester le long de l'itinéraire du président français pour lui dévoiler leur candidat à la présidentielle de 2025. Quelques heures avant l'arrivée du président français à Yaoundé le 25 juillet dernier, une alerte des réseaux sociaux a fait état de l'interpellation des individus (moins d'une dizaine) ayant posé des banderoles appelant Frank Biya à remplacer son père en 2025 à la tête de l'État. Ces personnes gardées à vue au Commissariat central N°1, selon des sources anonymes, projetaient d'organiser des manifestations le long de l'itinéraire d'Emmanuel Macron, afin de lui présenter leur candidat pour la prochaine élection présidentielle.

Chose subtilement exprimée sur une banderole flanquée de l'effigie du fils aîné du président Paul Biya, à quelques mètres de la Poste centrale (centre-ville de Yaoundé) :

" Monsieur Emmanuel Macron, président français, le Mouvement Febiste vous souhaite la bienvenue dans notre très beau pays ", pouvait-on lire. Si l'arrestation de leurs auteurs s'est faite discrètement, ces banderoles (finalement gênantes) ont effectivement disparu des avenues et carrefours de la capitale où elles étaient visibles en grandeur nature quelques jours auparavant.

D'autre part, l'on n'est toujours pas fixé sur l'autorité ayant instruit les forces de l'ordre de les arracher. Mais selon toute vraisemblance, l'ordre viendrait des plus hautes sphères du pouvoir car, après investigations, ni la préfecture ni la mairie de la ville Yaoundé ne sont impliquées dans cette affaire.

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Ballon d'essai

Toujours est-il que ce rétropédalage des autorités suscite à la fois curiosité et étonnement, surtout lorsqu'on sait que cette propagande se faisait littéralement urbi et orbi depuis plusieurs semaines. Les messages portés étaient également sans ambiguïté :

" Dieu, le destin, la patrie présentent Frank Emmanuel Biya à poursuivre l'œuvre de ses glorieux devanciers. Ensemble, relevons le défi d'un Cameroun plus prospère ", lisait-on sur une banderole suspendue sur l'avenue Saint Jean Paul II (arrondissement de Yaoundé 2e), à l'initiative du Réseau national des Jeunes acquis à Frank Emmanuel Biya. Au quartier Tsinga, un autre message du Mouvement citoyens des Frankistes pour la paix et l'unité du Cameroun (MCPU) présentait Frank Biya comme le " garant des acquis en faveur du développement ".

Ballon d'essai ou campagne électorale avant l'heure, cette affaire révèle néanmoins des frictions à deux niveaux : d'une part, parmi les partisans ou sympathisants de Frank et d'autre part, au sein de l'appareil administratif. Illustration avec la réaction de la présidente coordonnatrice nationale du MCPU, Appolonie Fleur Blaz, qui prend ses distances d'avec personnes interpellées.

Avec étonnement, la présidente du MCPU " se désolidarise de toutes ces initiatives malsaines et n'a jamais tenu un discours de campagne pour un éventuel plébiscite de son leader qu'il a choisi comme modèle ". Légalisé officiellement depuis octobre 2021, le MCPU " est une association apolitique (... ) qui a pour objectif premier de soutenir des couches vulnérables en posant des actions sociales humanitaires.

Préfet de la Mvila

Au niveau de l'administration, les pièces à conviction sont fournies par le préfet du département de la Mvila. Un récépissé de déclaration à lui attribuée consacre la légalisation en 17 décembre 2021 de l'association dite du Rassemblement républicain des franckistes du Cameroun (RRFC). Le document est précisément apparu sur la place publique le lendemain de l'interpellation des personnes mentionnées supra, au moment où l'opinion s'interrogeait sur le statut légal du mouvement des Frankistes.

Éclaboussé et piqué au vif, l'autorité administrative a dû réagir 48h plus tard pour sauver sa signature, qualifiant le document de " non authentique ". Y faisant suite, " le préfet tient à préciser à l'intention des membres fondateurs de ce rassemblement que ce document n'émane pas de ses services, et ne se retrouve nullement dans les archives de la préfecture de à Ebolowa ", précise-t-il dans un communiqué le 28 juillet 2022.

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