Ile Maurice: Recrutements publics - Mauri-Facilities pêche dans un aquarium

L'objectif est de réduire le chômage. Mais les 2 700 emplois "créés" pour "embellir" le pays semblent plus séduire ceux qui travaillent déjà dans le privé.

Après le recrutement de 700 personnes pour le nettoyage de l'île, celui de 2 000 autres est en cours. Les 700 premières avaient été recrutées sous la National Clean-up Campaign et travaillent actuellement dans les collectivités locales sous la supervision de ces dernières. Et les 2 000 recrues, payées par Mauri-Facilities comme les 700, les suivront-elles ? "Non, nous assure-t-on chez Mauri-Facilities, on a envoyé les 700 dans les collectivités locales pour ne pas avoir à recruter des inspecteurs et autres cadres. Dès que nous recruterons les 2 000 personnes, nous aurons notre propre contrôle et les travailleurs iront là où nous le jugerons mieux."

En attendant, on peut voir une partie de ces 700 personnes en train d'aider les employés municipaux de Curepipe à balayer les rues. Balaie-t-on une plus grande surface ? avons-nous demandé à un employé municipal. "Non, ni une plus grande surface ni plus souvent." Qu'est-ce qui a donc changé ? insiste-t-on. "Rien. Sauf qu'il nous manque parfois d'outils et d'équipements de protection personnelle."

Donc, pas vraiment de travaux supplémentaires effectués. Mais d'après les municipalités et conseils de district que nous avons contactés, les recrues venant de Mauri-Facilties vont aussi entretenir les jardins d'enfants, défricher les terrains abandonnés et nettoyer les drains. Nettoyer les drains ? On aura donc moins d'inondations ? Réponse d'un conseiller de district : "Je ne sais pas. Nous faisons ce que nous pouvons, car déboucher les drains requiert de gros moyens. Il faut parfois des grues pour soulever les trottoirs et des camions pour transporter les tonnes de détritus."

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On apprend aussi que ces employés de Mauri-Facilities n'enlèvent pas les ordures ménagères. Ils ne font pas de gros travaux en tout cas, surtout dans les quartiers difficiles où ce sont les prestataires privés qui sont envoyés. En tout cas, c'est l'inspecteur municipal ou du conseil de district qui leur alloue les tâches, apprend-on.

Les éboueurs municipaux, ceux du privé et maintenant du "renfort" venant de Mauri-Facilities. N'est-ce pas trop ? Il est vrai que le travail du privé est plus apprécié par les ménages. "Ils sont plus consciencieux", nous dit un habitant de Curepipe. "Ils embarquent tout alors que les éboueurs municipaux vous en laissent toujours un peu et sont très irréguliers."

Du côté de Mauri-Facilities, on nous demande un peu de patience. On nous fait remarquer que le Chief Executive Officer, Vikram Patrou, prend son travail à cœur, "contrairement à certains nominés". Attendons voir alors. On attire notre attention aussi sur le fait que les Mauriciens doivent également faire des efforts et ne pas balancer leurs ordures n'importe où.

Ce qui est certain, c'est que les prestataires du privé s'arrachent les cheveux devant le recrutement de ces 2 700 travailleurs. Pas parce qu'ils perdent des contrats. Non, ils perdent des travailleurs, qui préfèrent se joindre à Mauri-Facilities car ils pensent que c'est de l'emploi sécurisé. En tout cas, le salaire de Rs 15 000 offert par Mauri-Facilities augmente la pression sur les concurrents privés pour une augmentation salariale.

Même un coiffeur se plaint : son garçon-coiffeur l'a quitté pour rejoindre cette compagnie d'État. "Et l'on parle de booster la productivité !" soupire un directeur de compagnie privée. "Ce, à un moment où le gouvernement lui-même déclare que l'on manque de main-d'œuvre pour l'agriculture, pour nos usines et dans l'hôtellerie", ajoute notre interlocuteur. "Ces pauvres employés de Mauri-Facilities méritent, certes, de gagner leur vie, nous dit un autre directeur du privé, mais est-ce tout ce que le gouvernement a à leur offrir pour résorber le chômage ? N'y a-t-il rien d'autre de plus productif ? On pompe de la main-d'œuvre pour des raisons politiques." Un conseiller de district abonde dans le même sens : "Ces 2 700 personnes sont recrutées par Mauri-Facilities parmi les agents du pouvoir. Et vous savez quoi ? On les enverra travailler dans les collectivités locales, écoles et autres bureaux du gouvernement, court-circuitant la Local Government Service Commission notamment." Malins, nos décideurs !

Selon une source à MauriFacilities, tous ces 2 700 employés auront un contrat à durée indéterminée. Et lorsque le budget de cet organisme s'épuisera ? "On trouvera des ressources", nous répond-on.

Une fonction publique qui grossit à vue d'œil

La fonction publique comptait 96 950 employés au 3 mars 2021, incluant les compagnies d'État et les administrations régionales. Soit 77 agents pour 1 000 habitants. Et 8 353 d'autres emplois seront créés dans la fonction publique, a annoncé le ministre des Finances lors de son discours du Budget. De plus, il y a ce que l'on appelle les "stages parking" comme au "Youth Employment Program" et le "SME Scheme". Combien et quelle rémunération ? On attend la réponse des ministères concernés. Tant que l'on peut montrer un chiffre du chômage en baisse et compter sur l'argent de la Banque de Maurice...

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