Madagascar: La Grande île, un véritable Eldorado

Gouverneur général de l'île de France qu'il rebaptise aussitôt Maurice depuis la prise de cette île par les Anglais, le 4 décembre 1810, Sir Robert Towsend Farquhar possède dans son gouvernement tout ce qui fait partie des Établissements français au-delà du Cap de Bonne-Espérance.

Il espère bien que " ces possessions, arrachées à la France par le hasard des batailles, demeurent britanniques ".

Esprit imaginatif, rompu aux problèmes de l'océan Indien, il avait compris d'emblée l'intérêt que la Grande-Bretagne pourrait retirer de la possession des Mascareignes et celle de Madagascar qui, selon lui, devait jouer un rôle important dans la politique anglaise dans cette partie du monde (Jean Valette). D'après l'archiviste-paléographe, l'intérêt de Farquhar se révèle bien avant sa prise de commandement puisque, dès le 10 juillet 1810, il entretient de la question Lord Liverpool en des termes qui montrent qu'il l'a largement étudiée.

Une fois que Sylvain Roux quitte Madagascar, le 18 février 1811, Robert Farquhar prend le temps de réexaminer les problèmes sous tous leurs aspects, et s'ancrer de plus en plus dans l'idée de l'importance de Madagascar. Le 28 juillet 1812, il adresse un long rapport à Lord Liverpool dans lequel il analyse la situation générale dans l'océan Indien. Il y analyse la façon dont il conçoit l'avenir et la place qu'il accorde à Madagascar dans ses préoccupations. En fait, il brosse un tableau complet de la politique anglaise dans l'océan Indien à la mesure de la grandeur britannique et qui exclut toute ingérence d'autres puissances. " Il veut faire de l'océan Indien une mer britannique ", même s'il lui faut éliminer la résistance du Portugal pourtant allié de la Grande-Bretagne.

%

Robert Farquhar désire que la côte orientale africaine tombe sous la domination anglaise. Il insiste sur son importance commerciale, sur les possibilités d'ouvrir, à partir de cette côte, une route terrestre à travers l'Afrique, du Mozambique à l'océan Atlantique. Les Portugais, établis en un certain nombre de points de la côte orientale africaine, n'ont pas assez de force pour en assurer la défense. Dans ces conditions, " les Anglais n'éprouveraient que peu de difficultés à les supplanter. "

L'archipel des Seychelles, conquis sur la France, fait partie du gouvernement de Robert Farquhar. Il est " digne d'intérêt au triple point de vue militaire, maritime et commercial " et son port doit à sa situation- " à dix jours de Maurice, de Ceylan, de Goa, de Bombay, de la côte de Perse, de la mer Rouge et de Madagascar "- d'être le plus utile qui puisse être et un incontestable observatoire permettant d'être à même de tout savoir sur l'océan Indien.

Cependant, c'est Madagascar qui semble bien occuper le centre des préoccupations du gouverneur de Maurice, car il s'étend longuement sur la Grande île, en vante les mérites, expose pourquoi elle n'est pas mise en valeur jusqu'alors, et présente ce qui, pour lui, serait à réaliser pour en faire " la plus importante colonie à l'est du Cap de Bonne-Espérance ".

À l'en croire, la Grande île est un " véritable Eldorado ", une terre d'avenir où toutes les cultures seraient possibles. Et si rien n'est encore réalisé, " il faut en chercher la cause dans l'insuccès des tentatives françaises qui portaient en elles les causes de leur échec ". La principale en est la traite des esclaves, le désir de se procurer à tout prix des hommes pour les exporter. L'Angleterre ayant aboli la traite, ne doit plus avoir peur sur ce plan. " Tous les espoirs sont donc permis, il convient d'en profiter. "

Pour Robert Farquhar, les établissements qui y seront créés, ne doivent pas être constitués de militaires, mais de civils- cultivateurs et artisans- qui mettront le pays en valeur et serviront d'exemples aux Malgaches. Et si cela ne suffit pas, on peut aussi faire appel à l'immigration en introduisant quelques centaines de Chinois.

Enfin, et l'idée lui est chère, il est possible de faire de Madagascar " une colonie pénitentiaire". " Comme il craint qu'on ne lui oppose l'expérience précédente de la Nouvelle-Hollande, il prend les devants, expose et combat les objections qu'on pourrait lui faire, en triomphe naturellement. " Il brosse ainsi un tableau quelque peu idyllique des rapports entre Malgaches et convicts. Il voit sortir " en une génération, une nouvelle race indigène du type des colonies de l'Amérique espagnole " et espère ainsi " libérer la Mère-patrie des rameaux dépravés de sa population en rendant leur travail et leurs talents utiles eu bien-public ".

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.