Madagascar: Affaire Apollo 21 - Rejet en bloc par la Cour de Cassation

Les avocats des quatre condamnés à une peine privative de liberté dans l'affaire Apollo 21 sont sortis dépités de l'audience à la Cour de Cassation. Leur demande d'annulation du verdict et la libération de leurs clients sont rejetées.

DÉCEPTION. Ce mot a été sur les lèvres des avocats de Paul Rafanoharana et de son épouse, ainsi que ceux de Philippe Marc François et Aina Marie Razafindrakoto, à la sortie de la salle d'audien-ce de la Cour de Cassation, à Anosy, hier. Au regard de leur attitude, l'arrêt rendu par cette instance judiciaire a eu l'effet d'un coup de massue.

La Cour de Cassation a, en effet, rejeté en bloc les requêtes formulées dans le pourvoi effectué par les avocats des quatre personnes con-- damnées à une peine privative de liberté dans le cadre de l'affaire Apollo 21. Un arrêt rendu en une phrase, durant quelques secondes, par Ranary Robertson Rakotonavalona, premier président de la Cour Suprême, qui a présidé l'audi-ence de la Cour de Cassation, hier en début de matinée. Après s'être levés au prononcé de la décision, les quatre avo-cats qui ont représenté les con-- damnés sont sortis tête basse de la salle, tout de suite après.

"Rejet des pourvois", assorti de paiement des frais de justice. Avec ces quelques mots, la Cour de Cassation scelle le sort des quatre condamnés. L'affaire Apollo 21 consiste en une tentative d'assassinat du président de la République et d'autres hautes personnalités étatiques, couplée avec une tentative de coup d'État. Elle a été révélée au grand public lorsque la brigade criminelle de la police nationale a procédé à une série d'arrestations, le 20 juillet 2021. Un coup de filet après quelques mois d'enquête et de pistage, selon les explications.

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Paul Rafanoharana, francomalgache retraité de la gendarmerie française et son épouse, ainsi que Philippe Marc François, colonel retraité de l'armée française, ont été parmi les individus interpellés ce 20 juillet 2021, en fin d'après-midi. Aina Marie Razafindra-koto, ancien administrateur de la société Tsara First, appartenant à Paul Rafanoharana et Philippe Marc François, lui aussi a été inscrit dans la liste des principaux accusés. À l'issue des instructions, le procès de l'affaire Apollo 21 a démarré le 6 décembre 2021.

Le verdict de la Cour crimi-nelle ordinaire, au tribu-- nal d'Anosy, est tombé le 17 décembre 2021. Les quatre principaux accusés dans l'affaire ont écopé de travaux forcés. Considéré comme le cerveau de l'affaire, Paul Rafanoharana est condamné à vingt ans de travaux forcés. Philippe Marc François et Aina Marie Razfindrakoto, eux ont pris dix ans de travaux forcés. Voahanginomenjanahary Andrianandrianina, l'épouse du franco-malgache, quant à elle, est condamnée à cinq ans de travaux forcés.

Ultime recours

Les défenseurs des quatre condamnés ont alors fait un pourvoi en cassation, le 20 décembre 2021. Une audience publique s'est tenue, le 22 juillet. Dans leurs plaidoyers, ils se sont employés à pilonner ce qu'ils estiment être des vices de procédures, de non respect de la loi et de principes de droits durant l'enquête préliminaire, l'instruction et le procès. Ni les arguments des avocats de la défense, ni les interpellations de l'Etat français et tentative de lobbying faite par la famille de Philippe Marc François n'ont trouvé grâce devant la Cour de Cassation.

"Nos arguments sur les violations flagrantes des droits fondamentaux n'ont pas été pris en compte. (... ) Nous ne pouvons pas encore vous dire quelle sera la suite. Nous attendons d'abord de voir quels sont les motifs de rejet de la Cour de Cassation", réagit maître Arlette Rafanomadio, membre de l'équipe d'avocats de Paul Rafanoharana. Même réaction de la part des avocats de Philippe Marc François et Aina Marie Razafindrakoto.

"Quoi qu'il en soit, c'est une décision de justice et il est difficile de la commenter pour le moment. Nous allons d'abord essayer d'avoir l'arrêt entre nos mains et à partir de là, voir comment nous pouvons agir", indique maître Raymond Chan Fah, avocat du colonel retraité de l'armée française. La Cour de Cassation s'est limitée au prononcé de sa décision, hier, sans en donner les motifs. Une situation que n'a visiblement digérée maître Mamy Radilofe, avocat de Aina Marie Razafin-drakoto. Martelant être "déçu", il ajoute, "je ne peux pas savoir où ai-je mal argumenté tant que je n'aurai pas l'arrêt entre les mains".

Au fil des discussions à l'issue de l'audience, maître Rafanomadio et maître Chan Fah ont évoqué l'idée qu'il pourrait effectuer un Pourvoi dans l'intérêt de la loi (PIL). Un ultime recours après le revers infligé par la Cour de Cassation. Le PIL consiste en une saisine du ministre de la Justice, au motif que des dispositions légales n'ont pas été respectées, des cas d'injustice, d'illégalité, ou de violation de principe de droit n'ont pas été pris en compte par les différentes instances judiciaires, durant les différents recours, jusqu'à la Cour de Cassation.

Si le PIL est accepté, le garde des sceaux saisit le Procureur général de la Cour Suprême (PGCS). Au nom du ministère public, ce dernier saisit alors la Cour de Cassa-tion, afin qu'elle rouvre le dossier. L'arrêt qui sera rendu à l'issue du PIL sera alors l'ultime décision de la chaîne de procédure. En parallèle au PIL, maître Chan Fah songe à abattre une dernière carte pour son client. Celle de l'extradition sur la base de l'accord de coopération judiciaire entre Madagascar et la France.

Cet acte permet qu'un condamné français, le cas échéant, puisse purger sa peine en France, et vice versa. Une option que pourraient lever les avocats de Paul Rafanoharana, "s'il fait valoir sa nationalité française", à entendre maître Rafanomadio, qui souligne, "le PIL n'empêche pas l'extradition".

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