Ile Maurice: Marie-Pierre Ballarin - "À Maurice, il y a une parole qui s'est libérée"

Faire l'inventaire des documents, des sources sur la traite négrière, l'esclavage, l'engagisme et d'autres formes de travail non-libre. L'exercice a été lancé le mardi 23 août au musée intercontinental de l'esclavage. Il s'agit d'un projet pilote chapeauté par Slavery in Africa Network (Slafnet). La coordonnatrice de Slafnet, Marie-Pierre Ballarin, était présente à ce lancement.

Sommes-nous toujours dans la partie du monde dont l'histoire - notamment celle de l'esclavage - est la moins étudiée ? "C'est vrai qu'il y a beaucoup de travaux sur l'Atlantique, beaucoup moins sur l'Afrique orientale. En organisant la conférence d'historiens à Nairobi, cela permettait de faire la jonction entre l'Atlantique et l'océan Indien. Beaucoup de collègues africains autant qu'occidentaux y ont participé." Marie-Pierre Ballarin se souvient que Stephanie Tamby, aujourd'hui chercheuse à mi-temps au musée intercontinental de l'esclavage, avait participé à la conférence en 2014.

C'est à partir de cette conférence que le réseau de réflexion sur l'histoire et les héritages de l'esclavage et de la traite en Afrique et dans les îles de l'océan Indien occidental s'est mis en place. Slafnet, qui existe depuis 2017, promeut le dialogue entre l'Europe et l'Afrique. Slafnet est financé par la Commission européenne. La référente locale de Slafnet est l'historienne Vijaya Teelock.

L'objectif, souligne Marie-Pierre Ballarin, "c'est la mobilité. Que des collègues d'Afrique et de l'océan Indien puissent aller en Europe, avoir accès à des documents d'archives qu'ils n'ont pas dans leur propre pays. Il s'agit aussi de former des étudiants, d'organiser des ateliers pour stimuler la réflexion académique. D'un autre côté, les collègues européens peuvent aussi accéder aux archives mais aussi au terrain." Plus largement, Slafnet entend "contribuer à une meilleure compréhension de ces histoires. Aider des descendants à mieux vivre leur quotidien".

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Dans le cas de Maurice, des chercheurs ont pu se rendre aux archives en France, en Angleterre et au Portugal, indique-t-elle. "À Maurice, il y a une parole qui a été libérée. Il y a eu un vrai travail sur l'esclavage et la traite, ce qui n'est pas le cas par exemple à Madagascar." Marie-Pierre Ballarin affirme : "Je sais qu'il y a encore beaucoup de difficultés pour les descendants d'esclaves, pour les descendants d'Africains, mais tout un travail a été fait ici."

Est-ce que le réseau de chercheurs Slafnet s'implique dans les dynamiques de chaque pays où il est présent ou observe-t-il une certaine réserve ? "Pas du tout", assure Marie-Pierre Ballarin. "À travers les réseaux de traite, on peut mieux comprendre les circulations de populations. On se rend compte que les gens connaissent très mal leur histoire. Au Kenya, par exemple, on considère parfois que l'esclavage c'est dans l'Atlantique ou alors c'est une chose du passé. Lors des ateliers de Slafnet - le dernier c'était en 2019 - on a senti une surprise, un étonnement. Mais on sent aussi une volonté, un besoin d'une meilleure connaissance de cette histoire. On voit aussi que ça surgit, il y a un besoin d'en parler, dans toutes les zones sur lesquelles nous travaillons."

À venir: création d'un centre de recherche international

Parmi les objectifs à long terme du musée intercontinental de l'esclavage figure la mise en place d'un centre de recherche international sur l'esclavage. L'idée de créer une base de données sur la traite négrière et l'esclavage a été proposée par l'une des missions d'experts français auprès de l'ISM. Une étude a montré que de toutes les bases de sonnées sur l'esclavage, il n'y en a pas une seule qui soit en Afrique. Les discussions en cours ont pour but de dégager le concept d'une future base de données qui soit basée à Maurice.

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