Sénégal: "Piège de la dette" - Un expert chinois alerte sur l'impact des obligations internationales

6 Octobre 2022

Enseignant à l'Université Tsinghua de Beijing, Pr Tang Xiaoyang a publié récemment un rapport sur la dette des pays africains, d'Amérique Latine et d'Asie. Il a ainsi alerté face à ce qu'il appelle le " piège du capital financier " avec les obligations internationales.

BEIJING (CHINE) -Directeur du Département des relations internationales de l'Université Tsinghua de Beijing, Pr Tang Xiaoyang, avec une équipe pluridisciplinaire, vient de publier, au mois d'août dernier, un rapport intitulé " Le piège du capital financier : L'impact des obligations internationales sur la viabilité de la dette des pays en développement ".

Face aux journalistes africains participant au Programme 2022 du China international press communication center (Cipcc) vendredi dernier, il a évoqué comment les obligations internationales sont devenues un outil de financement important pour les pays en développement et ont considérablement modifié la structure de leur dette extérieure.

D'après lui, la part des obligations souveraines dans la dette extérieure garantie des pays à revenu faible et intermédiaire est passée de 30,7 % en 2009 à 50,4 % en 2020.

" Dans le même temps, les prêts bilatéraux et multilatéraux traditionnels augmentent relativement lentement et leur part dans la dette globale des pays en développement diminue. Les obligations souveraines des pays africains ont connu une croissance particulièrement rapide, leurs stocks passant de seulement 22,6 milliards de dollars en 2009 à 136,6 milliards de dollars en 2020. En revanche, la dette bilatérale des pays africains n'a fait que doubler environ au cours de la même période, pour atteindre 114,9 milliards de dollars en 2020 ", écrit-il dans son rapport.

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Selon lui, bien que la plupart des pays africains n'émettent des obligations souveraines sur les marchés de capitaux internationaux que depuis 2007, cet instrument financier est devenu un choix plus courant pour les pays africains à partir de 2021. " Plus de 20 pays africains détiennent une ou plusieurs euro-obligations en circulation, et rien qu'en 2021, Les pays africains ont émis pour 11,8 milliards de dollars d'euro-obligations. Les émissions d'euro-obligations en Asie et en Amérique latine ont également affiché une tendance à la hausse ", ajoute -il.

Risque élevé

Il a ainsi affirmé que les 10 principaux souscripteurs d'obligations souveraines des pays en développement sont des banques d'investissement des États-Unis, du Royaume-Uni, de la Suisse et de l'Ue. Pr Tang Xiaoyang explique que ces institutions financières, dotées d'un capital solide et motivées par la recherche du profit, ont activement aidé les pays africains et d'autres à émettre des euro-obligations et à en acheter de grandes quantités, ce qui a grandement contribué à la croissance rapide de la dette totale des Programme des marchés de titres. " Bien que la faveur du capital permet aux pays en développement d'obtenir facilement des financements sur une courte période, l'accumulation de la dette deviendra une incertitude à long terme sur le marché international de la dette ", prévient -il.

Pr Tang Xiaoyang a ainsi alerté sur certains risques que présentent ces obligations internationales pour beaucoup de pays d'Afrique, d'Amérique Latine et d'Asie. D'après lui, depuis 2020, les défaillances obligataires en Argentine, en Zambie et au Sri Lanka ont déclenché une série de turbulences socio-économiques. " Les pays africains qui feront face à leur premier pic de remboursement d'obligations en 2023-2025, devront rembourser plus de 106 milliards de dollars d'euro-obligations d'ici 2025. Selon les prévisions, le Ghana, le Suriname, l'Angola, l'Éthiopie et le Salvador présentent un risque élevé de défaillance des obligations ", alerte-t-il.

Pour faire face " à ce risque élevé ", Pr Tang Xiaoyang a donné quelques suggestions qui commencent d'abord par mettre l'accent sur le développement économique stable à long terme des pays en développement et construire un environnement financier international propice au développement durable.

Il faut aussi, d'après lui, être vigilant sur le risque à long terme et le pouvoir destructeur de la charge obligataire, et aussi prendre des mesures ex-ante. Il a aussi préconisé une amélioration des conseils d'utilisation des fonds, investir dans des projets productifs qui génèrent des revenus et du mécanisme de notation à long terme et le modèle d'alerte du marché adapté aux pays en développement.

Consultant auparavant pour la Banque mondiale, le Pnud, l'Usaid et divers instituts de recherche et sociétés de conseil, PrTang Xiaoyang est aujourd'hui directeur du Département des relations internationales de l'Université Tsinghua, l'une des plus grandes universités chinoises. Ses intérêts de recherche incluent la philosophie politique, l'engagement de la Chine dans les pays en développement et le processus de modernisation mondiale. Il est l'auteur de " Coevolutionary Pragmatism: Approaches and Impacts of China-Africa Economic Cooperation " (Cambridge University Press 2020) et a publié de nombreux articles sur le développement international.

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