Madagascar: Aveux obtenus sous contrainte, non respect de la présomption d'innocence - Guerre déclarée entre le SMM et les OPJ

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Le Syndicat des Magistrats de Madagascar (SMM) n'est pas allé par quatre chemins pour dénoncer les abus et le non-respect de la procédure légale par les éléments des forces de l'ordre qui assurent le rôle d'Officiers de Police Judiciaire dans le traitement des dossiers de Justice.

Dans un communiqué publié hier, le SMM lance un rappel à l'ordre à l'endroit de ces derniers à propos de la fuite d'informations et/ou de procès verbaux d'enquête sur les médias et les réseaux sociaux, mais aussi concernant la publication des photos et de l'identité des présumés coupables qui n'ont même pas encore été jugés.

Le SMM appelle ainsi les Officiers de Police Judiciaire à respecter la subordination hiérarchique et le principe du respect de la présomption d'innocence. " Ceci permettra d'instaurer une relation de collaboration simple et juste " , indique le communiqué.

Et le SMM de rappeler au passage les rôles de chaque entité. En effet, le syndicat des magistrats rappelle que dans une affaire judiciaire, le rôle des policiers et des gendarmes se limite à recevoir les plaintes, ouvrir l'enquête, rechercher et appréhender les présumés coupables et entreprendre l'enquête préliminaire, collecter toutes les preuves et déférer ensuite le dossier devant le parquet.

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" Ce sont les juges d'instruction qui décident de l'enquête au fond et/ou du placement sous mandat de dépôt. Tout au long du processus, les Officiers de Police Judiciaire doivent respecter à la lettre les instructions du Parquet " , insiste le SMM.

Facebook

Une manière de rappeler que ce n'est ni aux policiers, ni aux gendarmes en charge du dossier de publier l'identité des présumés coupables sur les médias et les réseaux sociaux.

En effet, chaque commissariat et chaque groupement de la Gendarmerie dispose d'un compte Facebook et la publication des résultats de leurs investigations est devenue une pratique courante dernièrement. Une pratique que le SMM semble balayer d'un revers de main car selon lui, elle est contraire au principe du respect de la présomption d'innocence.

En outre, il s'agit d'une violation du secret de l'instruction. En tout cas, ce rappel à l'ordre risquerait de renforcer davantage la tension entre les Forces de l'ordre et les Magistrats et pourrait raviver la guerre froide qui existe entre les deux entités.

Et ce, dans la mesure où dans son communiqué, le SMM remet indirectement en cause le professionnalisme des Officiers de Police Judiciaire. " Dans de nombreux cas, les dossiers de Justice reçus au niveau du Parquet ne reflètent pas du tout les informations que l'on publie dans les médias et les réseaux sociaux " , martèle-t-on.

Il serait même question d'enquêtes préliminaires incomplètes, de contraindre par tous les moyens les présumés coupables pour les forcer à passer aux aveux, ou encore de l'inexistence de preuves scientifiques.

Publication d'informations

Selon le SMM, ce genre de pratique est à l'origine du manque de confiance de la population envers les magistrats et à la Justice. Ces graves accusations portées par les magistrats vont certainement faire réagir les OPJ et les corps des Forces de l'ordre.

D'autant plus que pour enfoncer le clou, le SMM appelle tous les magistrats à exiger le respect de la procédure légale et à demander aux enquêteurs de suspendre immédiatement la publication des dossiers de Justice sur les médias et les réseaux sociaux.

Le syndicat lance une menace de poursuite pénale contre tous ceux qui continuent de recourir à cette pratique de publication d'informations relatives aux dossiers de Justice.

Et ce, conformément à ce qui est prévu dans les articles 155 à 157 du Code pénal. Le communiqué signé par Mbitanarivo Andriantsihorisoa, président du Syndicat des Magistrats de Madagascar évoque un avertissement, une révocation de l'OPJ et une convocation à l'encontre de ceux qui commettent des fuites de dossiers judiciaires.

Pour résoudre ce conflit, le SMM exhorte le ministre de la Justice à convoquer une réunion avec les deux ministres concernés, à savoir le ministre de la Sécurité publique et le Secrétaire d'Etat à la Gendarmerie. Bon nombre d'observateurs considèrent cette déclaration du SMM comme une déclaration de guerre contre les OPJ.

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