Ile Maurice: Gardiens de prison - un métier de plus en plus dur

Ce jeudi 13 octobre, 108 agents du Mauritius Prison Service (MPS) ont reçu des médailles pour bonne conduite et long état de service à la Prison Training School de Beau-Bassin. Cet événement met en lumière ce métier qui n'est pas toujours facile. Qu'est-ce que c'est que d'être un agent pénitentiaire en 2022 ?

Il est gardien à la prison depuis plus de vingt ans. Rajen (nom d'emprunt) explique qu'au fil des années, il a dû savoir se réinventer chaque jour et aujourd'hui encore pour faire son travail. "Li pa enn travay ki fasil. Bokou dimounn penser kan pe mett enn dimounn dan prison nek bizin diboute vey li kan ou enn garde mai li pa sa ditou", raconte notre interlocuteur.

En effet, il explique que pour être un agent pénitentiaire, il faut savoir être non seulement patient, mais aussi "for dan latet." Surtout en 2022. Car le profil des prisonniers change de plus en plus. "Dorénavant, la majeure partie de ceux qui occupent nos prisons à Maurice sont des trafiquants et des consommateurs de drogue. Ce sont pour la plupart des êtres détruits, manipulateurs. Certains sont même violents et d'autres souffrent de problèmes mentaux. Lorsqu'ils sont tous réunis, ce n'est pas facile, mais nous apprenons à le faire."

Il explique donc que, souvent, tout en étant un gardien de prison, il doit jouer au psychologue. Parfois aussi à l'éducateur ou au pacificateur.

Cependant, ce travail n'est pas de tout repos car il n'y a pas que des prisonniers à la recherche d'une oreille attentive, mais il y a aussi ceux qui peuvent devenir une source d'inquiétude. Samantha (nom d'emprunt), aussi gardienne à la prison pour femmes, témoigne. "Defwa ou kav Inn konsole enn prisonnière so landemin li menace ou kan ou rod instaure discipline." Des propos comme "pa vinn fer mari ar mwa, mo mari baron li, kan ou sorti ou va conner", elle en a reçu plusieurs. Selon Samantha, si parfois cela peut paraître anodin, dans certains cas, cela fait peur quand même. "Je fais mon travail. Mais il est vrai, qu'avec le nombre de trafiquants ou de consommateurs de drogue qui inondent les prisons, on a quelquefois un peu la peur au ventre lorsqu'il y a ce genre de menaces."

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Les cas de violences policières qui avaient ébranlé le pays il y a quelques mois ont aussi compliqué les choses dans les prisons, précisent nos interlocuteurs. Ayant eu vent de ces brutalités policières et de la façon dont certains ont pu échapper à la prison en mettant en lumière les violences qu'ils ont subies, les prisonniers s'en servent souvent pour faire du chantage à leur tour, même si les gardiens ne sont en aucun cas violents. "Des fois, lorsque je suis ferme et que je donne un ordre à un détenu, il peut se tourner vers moi et me dire 'mo pou tap mo latet dan miray et dire ki tonn fer sa, kontinie'", ajoute Rajen.

Pour Josian Babet, responsable du département communication de la prison, c'est à cause des cas de menaces comme cela d'ailleurs que récemment la prison vient de commencer un programme de continuous learning avec ses officiers pour qu'ils puissent connaître les méthodes appropriées qui évoluent et savoir comment réagir face à de tels problèmes.

"En tant qu'officiers de la prison, nous sommes dans une cellule de crise en permanence. Nous avons des détenus qui arrivent avec un sentiment de révolte et de déni. Pour certains, le déni s'évapore peut-être avec le temps, mais la révolte reste. Nous devons savoir gérer tous les cas de figure et surtout que maintenant, la délinquance en elle-même a évolué", ajoute Josian Babet.

Selon lui, la technologie, comme les full body scanners et les caméras CCTV, entre autres, qui ont été installés, aide beaucoup les officiers de la prison dans leur travail, mais la main-d'oeuvre aussi est nécessaire. "Nous avons en tout 2 451 prisonniers et cinq bébés dans nos prisons pour uniquement 1 100 officiers. Nous arrivons à gérer mais une centaine de nouveaux officiers seront bientôt recrutés pour renforcer l'équipe."

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