Congo-Brazzaville: Passé colonial - Les députés belges divisés sur la question des excuses et des réparations

Au cours d'un débat organisé le 17 octobre, les députés belges, membres de la commission spéciale sur le passé colonial de leur pays, ont exprimé des divergences sur la question de savoir si la Belgique doit présenter des excuses pour ses actions dans ses anciennes colonies, dont la République démocratique du Congo (RDC), ainsi que sur la question d'éventuelles indemnisations.

La commission spéciale est chargée de faire la lumière sur l'État indépendant du Congo (1885-1908) et sur le passé colonial de la Belgique dans ce pays (1908-1960), au Rwanda et au Burundi (1919-1962) et d'en tirer des enseignements pour l'avenir. Après deux ans de travail et près de 300 auditions, elle est désormais dans la phase finale et devrait rendre son rapport d'ici à la fin de l'année, lequel rapport évaluera les résultats de son travail et proposera une série de recommandations.

Lors du débat de lundi, les échanges ont été tendus. Les ailes gauche et droite de la coalition dite Vivaldi - la coalition gouvernementale de sept partis de gauche et de droite - ont exprimé des positions divergentes sur la question d'éventuelles excuses officielles de la Belgique, ainsi que sur l'indemnisation de ses anciennes colonies. Ainsi, dans l'opposition, le secrétaire national du Parti ouvrier, Marc Van Hees, s'est dit favorable aux éventuelles réparations financières pour les anciennes colonies, mais pas par l'État belge. " Ce n'est pas à la population de payer, mais plutôt à ceux qui se sont enrichis durant ce passé colonial ", a-t-il déclaré, pointant du doigt les grandes entreprises et la monarchie belge. " Nous devons vraiment réfléchir aux structures de domination qui existaient à l'époque et qui, je pense, existent encore aujourd'hui ", a-t-il ajouté.

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Pour sa part, le Parti socialiste belge et le Parti écologiste ont défendu l'idée d'excuses et la nécessité de réparations, tandis que leurs partenaires de droite ont exprimé leur scepticisme. Ainsi, Benoît Piedboeuf a clairement écarté l'idée de quelconques excuses ou tout déboulonnage de statues évoquant le passé colonial, préférant rester à l'expression de "regrets" par la Belgique. Ce que le roi Philippe a d'ailleurs déjà fait le 30 juin 2020 dans une lettre destinée au président Tshisekedi, à l'occasion du 60e anniversaire de l'indépendance du Congo. Dans sa lettre, le roi avait exprimé ses "plus profonds regrets" pour les "blessures" de la colonisation, notant que le régime colonial belge était fondé sur l'exploitation et la domination, la discrimination et le racisme. En outre, lors de sa visite en RDC en juin dernier, le roi Philippe, qui s'exprimait au Parlement congolais, en présence du président Félix Tshisekedi, avait reconnu les affres de la colonisation, sans toutefois prononcer d'excuses. Il a été le premier monarque belge à condamner le régime, bien qu'il n'ait pas présenté des excuses officielles.

Pas de compensation financière, estime l'Open VLD

Lors de ce débat, la députée libérale Goedele Liekens de l'Open Vld (Parti flamand) s'est fermement opposée à toute compensation financière aux anciennes colonies, estimant qu'on ne peut pas demander aux citoyens belges de payer aujourd'hui pour un passé qu'ils n'ont pas choisi. Néanmoins, elle s'est toutefois montrée ouverte à d'autres formes de réparations, comme la restitution d'œuvres d'art. La Chambre des représentants (L'Assemblée nationale belge) a adopté, en juin dernier, un projet de loi reconnaissant le caractère aliénable des biens liés au passé colonial de l'État belge et déterminant un cadre juridique pour leur restitution et leur retour.

Le parti de droite, Nouvelle alliance flamande, a également rejeté l'idée d'excuses officielles ou de compensation, ce qui reviendrait à " introduire un complexe de honte dans notre société ", a déclaré Wim Van der Donckt.

Travailler sur l'avenir

Pour Jan Briers du CD&V(Parti flamand)), si la Belgique se doit de reconnaître son passé colonial et les souffrances qu'il a générées, il importe surtout aujourd'hui de travailler à l'avenir. " Ces trois pays attendent surtout de nous des actions concrètes et des partenariats ", a-t-il déclaré, préconisant ceux-ci dans les domaines académique, scientifique, de coopération au développement, voire de sécurité au vu de la situation dans l'est du Congo. Il a plaidé pour la création d'une fondation destinée à financer ces projets, à l'instar de ce que l'Allemagne a mis en place après la Seconde Guerre mondiale pour indemniser les personnes soumises au travail forcé par les nazis. Les détails doivent encore être précisés, mais les socialistes et les verts ont exprimé leur soutien à cette idée.

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