Madagascar: En perpétuel Halloween

Depuis cesdeux dernières décennies, la fête de la peur séduit la jeune génération malgache. Costumes, déguisements, masques, face-painting circulaient dans les rues des grandes villes de Madagascar durant la nuit du 31 octobre dernier. La culture commence à s'implanter dans l'esprit des jeunes Malgaches. Bien entendu, Halloween se fête dans une ambiance conviviale.

Comme toujours, les traditionalistes et les conservateurs ne cachent pas leur inquiétude. " On a notre culture, pourquoi ne pas l'apprécier?" se demande Randriamasy, un traditionaliste dévoué. De leur côté, les jeunes ont leur point de vue, " ne soyons pas extrémistes, nos aïeux étaient aussi influencés par les occidentaux en nous faisant croire au père Noël, en fêtant la saint Sylvestre... Ce n'est pas parce qu'on se déguise pendant la fête d'Halloween que nous oublions nos ancêtres, nos cultures, non! Ne soyons pas si sceptiques ", explique Alexia Andriamahanina, une jeune femme 23 ans.

Cependant, Halloween est qualifiée comme la fête des riches dans certaines régions de Madagascar. C'est une occasion pour les fils des rentiers de se concurrencer. "Ici chez nous, ce sont les riches qui célèbrent cette fête. C'est une sorte de compétition. Qui a le plus beau et le plus cher costume", avance un habitant d'Antalaha. Effectivement, la majorité silencieuse a d'autres soucis en tête. Elle se bat pour vivre. Ce qu'on récite toujours à la radio, dans les débats télévisés.

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La peur en permanence

Les citoyens se contentent de peu, disent merci au créateur, n'ont plus le temps de coudre les linges, de couper les ongles. "On a plus besoin de déguisement, tous les jours c'est halloween chez nous", a certifié un homme issu d'une famille modeste. On s'éloigne de ces personnes dont les flatulences tuent les moustiques, saturant l'air d'une odeur douceâtre. En souillon, visage couvert de charbon, crispé de plie et des rides dessinées par la vie dure. Les mains épaisses des enfants, comme si elles étaient couvertes d'écailles, demandent de quoi manger parce que les bonbons ne pèsent pas dans le ventre. Halloween, c'est aussi ces yeux arrachés, ces joues balafrées causées par la violence conjugale, les viols, l'insécurité.

Si Halloween est la fête de la peur, les quartiers défavorisés la célèbrent du 1 janvier jusqu'au 31 décembre ! Le crime est partout. La terreur gagne du terrain dans les quatre coins de la Grande Île, les Dahalo dans le Sud, attaques à main armée dans la capitale, cambriolages dans le Nord. Les costauds cagoulés circulent dans les grandes villes, difficile de discerner les services antigang et les gangsters! Les festivités se font dans les tavernes ainsi qu'aux bistrots au fin fond de la campagne. Ces paysans sans terre, ces pasteurs au cheptel décimé, se réunissent pour se partager leur peine. Ensuite, ça vire en vinaigre lorsque la dose du trembo etdu betsabetsa commencent à faire leur effet. Suite logique, les bouteilles se cassent, les tabourets se transforment en bouclier. Halloween, c'est aussi l'enfer. Ces forêts qui brûlent, ces animaux endémiques calcinés. L'heure est grave. Madagascar qui envisage d'être le géant de la région du Sud-ouest de l'Océan Indien, serait-il réduit au néant?

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