Cote d'Ivoire: Béoumi - Comment le pont soulage des milliers d'usagers

9 Novembre 2022

Le vendredi 2 octobre 2015 quand le Président de la République Alassane Ouattara inaugurait le pont de Béoumi, il mettait fin à 43 ans de souffrances des populations de cette ville et des localités environnantes.

Cet ouvrage déterminant dans le développement des départements de Béoumi et Kounahiri a changé la vie des bénéficiaires et est aujourd'hui leur principal atout économique. " Une ère nouvelle va poindre à l'horizon. L'ouvrage va améliorer la fluidité routière, rapprocher plus les villages séparés depuis la longue période d'attente (plus de 43 ans) et mettre fin aux désagréments ", déclarait le président Ouattara à la fin de la cérémonie d'inauguration, non sans faire remarquer que l'ouvrage était la réalisation des doléances de deux grandes régions du pays, à savoir les régions sœurs du Gbêkê et du Béré.

Le 2 octobre 2022, cela faisait sept ans, jour pour jour, que le pont de Béoumi était officiellement ouvert à la circulation. De retour du village de Zraluo dans la sous-préfecture de Gohitafla, où nous avons eu le privilège de passer sur les ponts " Abla Akpo " sur le Kan et " Dominique Ouattara " sur le Bandama, à la faveur des obsèques de la mère d'un ami, nous nous sommes arrêté à Kounahiri et dans certains villages pour nous rendre compte des retombées du pont de Béoumi. Il constitue, à n'en point douter, le premier atout économique des populations impactées.

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Redécouvrons le pont " Dominique Ouattara " sur le fleuve Bandama

En réalité, il s'agit de deux ponts. Le pont " Dominique Ouattara ", long de 304 mètres avec des appuis pouvant aller jusqu'à vingt mètres de profondeur dans le fleuve Bandama, comprend sept travées pour une largeur de dix mètres avec des chaussées de 7,5 mètres dans les deux sens. D'un coût de 8, 6 milliards FCFA, il a été réalisé grâce à un financement de la France à travers le Contrat de désendettement et de développement (C2D).

Quant au deuxième pont sur le Kan, il mesure 94 mètres et repose sur des appuis de 5 mètres de profondeur. Il a coûté 3,8 milliards FCFA. " Depuis plusieurs décennies, nos braves populations aspirent au développement. Ce pont convient aux enjeux de deux régions qui se veulent modernes. C'est un signal fort de l'Etat pour nos deux régions", indiquait le Président Alassane Ouattara. Et de poursuivre : "Ce nouveau pont est le point de départ de ce que nous entrevoyons pour Béoumi ".

En plus de faire la fierté de la région de par leur architecture, les ponts " Abla Akpo " et " Dominique Ouattara " jouent aussi et surtout, un rôle central au niveau économique. Grâce à ces ouvrages, les activités commerciales connaissent un dynamisme exceptionnel. Sans oublier les déplacements des populations qui sont grandement facilités.

Le chef de canton Nanan Ago Barthélemy ne croyait pas si bien dire en soutenant que les deux ponts sur le Bandama et le Kanh sont venus désenclaver Béoumi et les villes commerciales telles que Kounahiri, Mankono et bien d'autres.

" Depuis la construction des deux ponts, les activités sont florissante. La pêche et l'agriculture ainsi que le commerce nous permettent aujourd'hui d'être plus indépendants. C'est pourquoi nous n'arrêterons jamais de dire merci au Président de la République Alassane Ouattara pour ce beau cadeau qu'il nous a offert ", a confié le chef de canton.

Des marchandises à profusion et bon marché

En effet, les deux ponts permettent à des centaines de camions d'aller chercher journellement les produits vivriers dans les hameaux les plus reculés de Béoumi et des villages environnants pour venir les déverser en ville ou les acheminer sur Bouaké et d'autres villes du pays. Conséquence, le marché de Béoumi qui fait office de première destination est inondé de produits vivriers : banane plantain, riz, igname, manioc, patate, maïs, taro, arachide, légumes divers, aubergines, tomates, gombos, piments et de nombreux fruits... Ce qui donne entièrement raison au chef de l'Etat qui indiquait le jour de l'inauguration que ces ouvrages " étaient déterminants dans le développement des départements de Béoumi et Kounahiri ".

Aujourd'hui à Béoumi l'on mange plus qu'à sa faim parce que les denrées alimentaires sont abondantes et bon marché. Cette abondance de nourriture se répercute sur la capitale du Gbêkê où les marchés sont également bien ravitaillés en banane plantain, igname, manioc et légumes de tous genres. Tous les témoignages recueillis sur place abondent dans ce sens.

" Je loue une maison avec mes deux petits frères. Nous n'avons pas de soucis de nourriture, je peux dire que la vie est facile ici à Béoumi. Le marché est rempli de vivres. Avec mille francs, on en a de la provision pour trois voire quatre jours. La nourriture ne nous fait pas défaut. Les produits vivriers viennent de tous les campements grâce au pont ", soutient Kouadio Marcel, élève en classe de seconde au lycée moderne de Béoumi.

Un tour au marché de la ville confirme les propos du jeune élève. Sur place, en effet, plusieurs camions Kia remplis qui de bananes, qui de manioc, d'ignames, qui de légumes, de fruits et autres céréales sont en train de décharger leurs contenus. " Je sors directement la brousse. Je ne vais pas vous dire le prix de ce chargement, c'est un secret professionnel (rires), mais retenez simplement que c'est bon. Dans les campements, les planteurs nous supplient de prendre leurs productions qui parfois pourrissent dans leurs mains. Je fais au moins trois chargements par jour et je ne suis pas la seule. Nous sommes des centaines de femmes à pratiquer cette activité. A un moment donné, nous sommes obligés de casser les prix. Les deux ponts et le bon état des routes facilitent nos déplacements. Je remercie le gouvernement pour cela ", confie Adjoua Nadège Amenan, l'une des propriétaires des camions.

Pour N'Zué Séverin, enseignant, les deux ponts sont à la base de l'abondance de nourriture en ville. " Ce sont les deux ponts qui nous donnent à manger à Béoumi. Personne ne peut en discuter. La plupart des routes aussi sont bonnes. Le chef de l'Etat a eu une vision à nulle pareille en nous donnant ces deux ponts.

Au fur et à mesure que les années passent, chacun réalise leur importance ", fait-il savoir. Tous les témoignages sont unanimes. Les prix des denrées alimentaires sont très abordables comparativement à d'autres régions du pays. Bien que ce ne soit pas encore la période de la banane plantain, le matin, à partir de 7h jusqu'à midi, vous avez trois à quatre régimes de bananes à 2000 francs là où vous les aurez à au moins 4000 FCFA ailleurs.

Et au fur et à mesure que le soleil décline, l'offre s'améliore avec parfois plus de régimes qui vous sont proposés au même prix. Le constat est identique pour l'igname. Il y a des tas à 500 francs, parfois même moins. Pour les légumes, pour parler de façon vulgaire, on vous dira que " c'est versé ", c'est-à-dire les tas de piment, aubergine, gombo, tomate, de fruits comme l'orange, la mandarine... sont consistants et bon marché.

Gain de temps dans les déplacements

Une des nombreuses retombées du pont de Béoumi est le gain de temps dans les déplacements. " Parfois il me fallait au moins soixante-douze heures pour aller prendre mes bagages à Bouaké et revenir en passant par Béoumi. La traversée était très risquée avec la pirogue ou le bac dont les fréquentes pannes pouvaient vous faire attendre pendant des jours. S'il t'arrivait aussi de choisir de passer par Gohitafla et Bouaflé, la distance était quasiment doublée. Aujourd'hui grâce au pont, je peux aller faire mes achats à Bouaké et retourner à Kounahiri avant midi. C'est juste impensable. Qu'en sera-t-il lorsque notre route sera bitumée ", témoigne un commerçant de Kounahiri.

Le pont de Béoumi a également contribué à rapprocher les peuples du Gbêkê et ceux du Béré. Il est donc un facteur d'union de deux peuples qui éprouvaient d'énormes difficultés à se fréquenter. Aujourd'hui, finie la hantise du comment se fera la traversée du fleuve Bandama. " Je n'ai plus d'appréhensions quand j'emprunte la route de Kounahiri pour aller rendre visite à mes beaux-parents. Nous étions des voisins que l'inexistence du pont avait éloignés les uns des autres.

Tout cela est désormais derrière nous. On peut aller dans un sens comme dans l'autre à tout moment. Ce que nous n'arrivions pas à faire lorsqu'il y avait des funérailles ou des fêtes de réjouissances, nous le faisons aujourd'hui grâce au pont. Nos relations sont devenues plus fraternelles ", relate Meh N'goran Séraphin, couturier à Béoumi.

L'hôpital général de Béoumi de plus en plus fréquenté

L'absence du pont avait enlevé toute envie à de nombreuses populations vivant après le fleuve, de se rendre à l'hôpital de Béoumi en cas de maladie. Faute d'avoir eu des chiffres pour étayer nos propos, le témoignage de l'agent de santé F.K peut nous édifier : " Mais c'est une évidence que personne ne pouvait prendre le risque de se déplacer avec son parent malade sans être sûr de pouvoir traverser le fleuve.

Même si les parents ne fréquentaient pas les centres de santé, il faut reconnaître que l'inexistence du pont favorisait cela. Aujourd'hui, nous recevons bien de malades qui sortent de contrées situées après le pont. Cela n'est pas gratuit et si ce pont n'était plus là, il est sûr que le nombre de patients qui viennent de ces villages situés après le pont va diminuer ".

Au niveau scolaire, de nombreux élèves ne dépendent plus de tuteurs. " Mon village est le deuxième situé après le pont sur l'axe de Kounahiri. Avant le pont, je vivais chez un tuteur pour aller à l'école. Aujourd'hui, avec mon vélo, je vais suivre mes cours au lycée de Béoumi le matin et le soir je rentre tranquillement à la maison. C'est grâce au pont que j'arrive à faire cela.

Plusieurs camarades font comme moi. Il y en a certains qui habitent dans des villages après le mien qui font aussi cela. Par le passé, sans le pont, cela était inimaginable ", a reconnu Kokoré Hyacinthe, élève au lycée moderne de Béoumi. Le pont a réduit la distance entre certains villages et Béoumi au point où certains élèves préfèrent rallier journellement leur établissement que de chercher à vivre avec des tuteurs, difficiles à trouver de nos jours pour plusieurs raisons, entre autres le coût de la vie et le comportement peu enviable des enfants eux-mêmes.

Au total, tout le bien qu'on dit des deux ponts sur le Bandama et le Kanh est réel. Ce sont les vrais moteurs de l'économie à Béoumi. Les populations en tirent d'innombrables avantages. Ici, on " mange les ponts ". Et ce n'est pas l'honorable Saraka Konan Adolph qui dira le contraire, lui qui assurait le jour de leur inauguration, que la réalisation de ces deux ponts était plus riche que tous les discours.

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