Madagascar: Les derniers jours d'Étienne de Flacourt

Revenant vers le Fort Dauphin le 20 mai 1660, Étienne de Flacourt et les passagers du vaisseau La Vierge sont attaqués par trois navires pirates de Barbarie à la hauteur de Lisbonne.

Dupés par le pavillon anglais que l'une des frégates turques arbore, le capitaine et l'équipage de La Vierge les laissent s'approcher. Et les pirates ne se font pas attendre pour les attaquer. Les Français, " quoique plus faibles en nombre d'hommes et en force de vaisseau et d'artillerie " tâchent de suppléer cette faiblesse par la grandeur d'un courage résolu à vendre chèrement leur vie ou leur liberté (" Ouvrages anciens concernant Madagascar " Alfred et Guillaume Grandidier). Tout est disposé en bel ordre : les officiers encouragent matelots, soldats et passagers par des paroles et l'exemple, les religieux " les stimulant à bien et vaillamment mourir ", donnant la bénédiction et l'absolution à tous. Après la prière générale, marins et soldats " bannissent la frayeur si loin d'eux " qu'aucun d'eux n'abandonne le tillac malgré les hurlements continuels et épouvantables des infidèles.

Trois bordées de canon essuyées sans avoir reçu d'autres dommages que la blessure d'un seul homme, ont fait que les Français, à la première salve, tuent dix de leurs ennemis et mettent l'une de leurs frégates hors d'état de nuire. Et déjà, la victoire semble pencher " plutôt du côté de la vertu que du nombre " lorsqu'un boulet enflammé met le feu aux poudres françaises, dont la violence brise le vaisseau La Vierge en deux. Certains auteurs assurent pourtant que l'incendie est dû à un incident survenu sur le navire français. En instant, tout est brûlé, noyé dont Étienne de Flacourt, excepté dix-sept jeunes hommes, matelots et passagers confondus. Parmi eux, le Parisien Paparel et le Bordelais de La Cornière qui aident les quinze autres à passer à l'avant du navire.

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Dans des lettres écrites d'Alger, le 12 aout 1660, les dix-sept survivants attribuent leur délivrance du naufrage à ce que Dieu a permis qu'une partie du navire " qui avait coulé à bas, retint la quille en haut ". Cela leur a permis de flotter sur ce débris durant l'obscurité de la nuit et au milieu des ondes agitées plus qu'à l'ordinaire. Ils sont recueillis par les Turcs, non pas tant pour leur sauver la vie que pour leur ravir la liberté. D'ailleurs, ces dix-sept esclaves constituent tout le butin de ces " pirates barbaresques ", auquel s'ajoutent trois cuillers d'argent, l'étui du chirurgien et l'un des gros canons des Français que la poudre a fait sauter en l'air et jeter dans l'un des vaisseaux turcs où ce canon, en tombant, a brisé le tillac et tué deux hommes. La frégate turque qui profite de ce sanglant butin, ne l'a pas gratuitement puisqu'il lui en coûte tous les mâts que la violence du feu a ruinés. C'est la fin du voyage pour le vaisseau La Vierge avec la plupart de son équipage et de ses passagers, " qui sont passés par l'eau et par le feu " en combattant contre " les ennemis de Dieu ".

C'est également ainsi qu'Étienne de Flacourt, directeur général de la Compagnie française d'Orient et commandant pour le roi en l'île de Madagascar et les îles adjacentes, perd la vie à l'âge de 53 ans. Selon l'auteur de la présentation, Flacourt est de moyenne stature, d'une taille bien fournie et a le visage plein, la physionomie fort bonne et agréable, la constitution saine et l'humeur douce et tempérée. Intérieurement, poursuit l'auteur, il est " un homme très sobre, vigilant, laborieux, studieux, infatigable, prévoyant, franc, obligeant, judicieux, ennemi du mensonge et du fard, rempli d'une piété sincère et exempte de toute affectation ". Outre la médecine et la chimie, Flacourt a aussi eu quelques génies pour la poésie, tant latine que française, et y réussit passablement. Il s'est rendu expert en navigation et géographie et surtout, il excelle en connaissance des minéraux, pierreries, plantes simples (médicinales) et " autres choses " de la physique grâce à sa grande lecture d'auteurs. Étienne de Flacourt, bien que marié pendant dix-neuf ans, n'a eu aucun héritier.

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