Madagascar: Ministère de l'économie et des finances - Trois anciens directeurs interdits de sortie du territoire

Personne ne l'a vu venir. À la demande du BIANCO, le ministère de l'Intérieur et de la décentralisation inflige une Interdiction de sortie du territoire à trois anciens directeurs auprès du ministère de l'Économie et des finances.

Coup de tonnerre. Deux anciens directeurs généraux et un ancien directeur auprès du ministère de l'Économie et des finances sont frappés d'Interdiction de sortie du territoire (IST), "jusqu'à nouvel ordre". Ces anciens responsables frappés d'IST sont l'ancien directeur général des finances et des affaires générales, l'ancien directeur général de l'Institut national de la statistique (INSTAT), et l'ancien directeur de la formation à l'INSTAT. La décision actant ces interdictions de sortie du territoire est signée par Justin Tokely, ministre de l'Intérieur et de la décentralisation, et datée du 26 décembre 2022. Une décision tout récente donc.

Selon cet acte, l'IST découle "d'une lettre émanant du directeur général du Bureau indépendant anti-corruption (BIANCO)". Selon les explications, en principe, c'est au procureur général de demander au ministre de l'Intérieur et de la décentralisation d'infliger une IST contre une personne sous la coupe d'une enquête ou d'une poursuite judiciaire. En matière de corruption et des délits connexes toutefois, le patron du BIANCO dispose de cette prérogative également.

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"Le directeur général [du BIANCO] peut requérir une interdiction de sortie du territoire à tout suspect auprès des autorités compétentes. A ce titre, tout ou partie des documents de voyage peut faire l'objet d'une confiscation", dispose l'article 52 de la loi sur la lutte contre la corruption qui date de 2016. De prime abord, les trois anciens hauts responsables au sein du ministère de l'Économie et des finances sont happés par des affaires de corruption ou d'infractions connexes.

Les faits imputés à ces trois anciens directeurs sont encore au stade d'enquête vraisemblablement. Raison pour laquelle c'est une lettre émanant du directeur général du BIANCO, entité qui mène l'enquête, visiblement, qui a amené la décision d'IST. En tout cas, selon Solofohery Razafindrakoto, procureur du second degré du Pôle anti-corruption (PAC), d'Antananarivo, affirme qu'aucune affaire concernant ces trois anciens directeurs n'est encore en instance auprès de cette juridiction.

Limogés récemment

Outre leur statut, deux des trois anciens directeurs ont la particularité d'avoir été remerciés récemment par le conseil des ministres, après avoir été en poste depuis le mois de mars 2018. L'ancien directeur général des finances et de l'administration générale a été limogé lors du conseil des ministres du 7 décembre. Et l'ancien directeur général de l'INSTAT, quant à lui, a été démis de ses fonctions durant la réunion hebdomadaire de l'Exécutif du 21 décembre.

Le limogeage de l'ancien directeur général des finances et des affaires administratives auprès du ministère de l'Économie et des finances intervient le jour du déclenchement par les députés, de la motion de censure contre le gouvernement. Certains y lisaient de probables représailles contre Christine Razanamahasoa, présidente de l'Assemblée nationale, dont il est l'un des proches. La boss de l'institution de Tsimbazaza ayant été pointée du doigt comme étant aux manettes de cette fronde.

Seulement, des indiscrétions confient que l'ancien directeur général des finances et de l'administration générale serait soupçonné d'avoir influé financièrement en faveur de la fronde contre le gouvernement. Dans un rapport publié durant le premier trimestre de l'année, la Cour des Comptes épingle cette direction générale sur des cas d'irrégularité de gestion des marchés publics durant la pandémie de Covid-19, en 2020. La Cour a fustigé un marché de gré à gré pour l'achat de près de dix-huit mille masques à un prix unitaire de 10.000 ariary.

La Cour des Comptes a qualifié "d'exorbitant", le prix unitaire des masques achetés par la direction générale des finances et de l'administration générale. Elle a également souligné que l'achat découlant d'un marché de gré à gré a été fait chez un prestataire non spécialisé dans cet équipement médical. S'agissant de l'ancien directeur général de l'INSTAT, il s'est embourbé dans un bras-de-fer avec les employés contractuels de cette entité depuis septembre.

Le personnel de l'INSTAT est composé de fonctionnaires et de contractuels qui seraient au nombre de cent soixante-dix. Des contrats soumis au régime du droit privé. Une partie de ces derniers ont réclamé, entre autres, leur incorporation au sein de la fonction publique et des ajustements de salaire. L'ancien directeur général leur a opposé un refus, arguant l'absence de postes budgétaires. À un moment donné, l'ancien patron de l'INSTAT a renvoyé certains de ces contractuels.

Selon les informations, c'est sur les conditions de renvoi que l'ancien directeur général de l'INSTAT a négocié avec les contractuels que bât blesse. Il leur aurait proposé des sommes à titre d'indemnisation de renvoi. Affirmant avoir des enregistrements à l'appui, des contractuels mécontents soutiennent que l'ancien directeur général leur aurait dit qu'ils pouvaient utiliser cette somme "pour monnayer leur intégration là où ils veulent l'être".

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