Cameroun: Yana Bekima publie un nouveau livre. Par l'écrivain Calvin Djouari

6 Janvier 2023

Paru en plein hiver, " LA POSTERITE EST UN COMBAT " est le quatrième livre publié par Yana Bekima. Cet ouvrage de 159 pages, est un véritable hommage à son père. D'un point de vue littéraire, ce n'est pas seulement un récit autobiographique à proprement parler, mais plutôt une balade de souvenirs où chacun de nous peut tirer une leçon de vie.

Cet Ecrivain camerounais, basé en Suisse, ne nous raconte pas seulement la vie entière de son père, mais des années, des mois, des journées, des minutes précieuses de leur existence. Un laps de temps d'autant plus intense qu'il est infime, et dans lequel il parvient à nous révéler non pas une âme, mais deux âmes, des pensées et les confidences d'un homme, son propre père dont la vie blafarde a voulu les combattre sans réussir.

A chaque fois, Yana Bekima trouve la forme littéraire la plus caractéristique du souvenir : l'autobiographie. Comme son second livre à succès " Pleure ô Eseka ", https://o-trim.co/YNA, la postérité est un combat se présente comme le livre de la mémoire, qui relate le passé d'un père qui a su décrire le futur comme un mage. En effet, l'auteur raconte l'origine d'une complicité avec celui-ci. A l'instant d'un livre, l'écrivain redevient le petit garçon qu'il était. Et, par la même occasion, il s'exprime en romancier qui rend hommage au monde d'autrefois dans lequel l'homme embrasse tout : la nature, la famille, l'entourage avec lesquels, il est en symbiose parfaite. L'écrivain raconte cette complicité, et revient ainsi au cœur d'une famille dont le père fut le principal acteur et parrain.

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Les voix du père qui resurgissent dans son esprit comme un fond sonore enregistré. Une métaphysique des mœurs où la maison se trouve être la racine, le chemin du parcours devient le corps et l'objectif de la journée, les feuilles et les fruits que l'homme ramène le soir à la maison. Voilà ainsi reconstitué l'arbre généalogique dans un raccourci. Tout un travail fait par le cœur et l'esprit d'un père digne. Et l'enfant observe tout cela sans bruit. Et oui parce que Yana Bekima est un homme de cœur il l'a démontré dans une interview l'an passé ; confère lien https://o-trim.co/YIN

Ce que Yana Bekima cherche à faire ici, c'est reconstruire le maillon de la chaîne dans ses dédales les plus intimes. " D'où viens-tu papa ? j'ai choisi de t'écrire. D'où viens-tu ? " question existentielle, mais hautement métaphysique. Le père répond mon fils : " prends ton repas et on parlera le soir... assieds-toi et attends. Semble lire l'enfant dans le regard de son père. Le calme et la patience sont ce que peut-être exige le père de son fils. Ce livre autobiographique est le plus dynamique de tous les livres écrits par Yana Bekima à ce jour.

On est invité à la lecture, on s'interroge sur la vie et par la même occasion, sur ce vide de l'enfant qui se lance à une quête de son identité. Un véritable hymne au passé, à nos civilisations perdues.

Cependant, une angoisse perpétuelle se crée dans cette œuvre qui touche profondément toute personne amenée à reparler de son père. L'angoisse de nos valeurs perdues, dont nous, en tant qu'adulte, n'avons plus. Serons-nous des bons pères ? Avons-nous répondu à leurs attentes ? Avons-nous mis en application leurs conseils ? Ces questions, qui nous envahissent, nous montrent que nous cherchons à nous retrouver par des écrits. Ce que nous n'avons pu faire, l'écriture vient essayer de parachever. L'écriture rattrape le spleen de l'auteur qu'il fabrique dans son imaginaire. C'est en ce sens que réside la force de ce récit autobiographique. " Les souvenirs me taraudent dans le cœur, il faut que ces souvenirs sortent de mon corps afin que je me sente léger. "

La postérité est un combat met au monde deux personnages : le père et l'enfant lui-même, l'enfant devenu père et le père devenu enfant qui se laisse raconter. Il s'agit d'une double renaissance et d'une double vie.

Une écriture chantante qui nous berce en même temps qui nous ébranle de la marche lente vers la vie, on passe à la vélocité de retrouver une postérité. Une marche entrecoupée par la douceur ou les chaos de la vie.

Un spectacle qui mélange le vivant, à celle de la fragilité pour mieux nous décrire autrement dans son pays le Cameroun d'antan.

Tout est conté, relaté ; l'espace d'un après-midi, le vide de l'Occident, les manques des hommes. La vie est un combat. Depuis toujours Yana Bekima le sait. Il s'y est préparé, depuis son enfance le combat continu. A-t-il gagné ses premières batailles ? Le livre répond. Toujours est-il qu'il se prépare pour d'autres combats. L'œuvre prend ici une dimension héroïque pour les combats qui l'attendent, mais aussi l'enthousiasme qui l'anime pour les affronter.

Il a deux avantages dans ce combat : une dimension humaine avec son père et une dimension matérielle avec sa plume. Ainsi, le livre de Yana est bien loin d'être un simple livre. C'est le livre de la mémoire, la peinture d'une Afrique dure, d'une Afrique bariolée et multicolore. La romance ancestrale qu'on n'oublie jamais et qui se réveille, qui nous incite à retrouver notre mémoire d'enfant.

Ce qui fait la grande originalité d'esprit de Yana, c'est le poids de l'histoire qu'il met sur son dos ; écrire son père afin que son fils ou sa fille écrive sur lui. Ce que j'appelais les maillons de la chaîne, ici ne sont plus des mots, mais un engagement, une signature un pacte avec la vie. Un désir d'authenticité. Voilà pourquoi il privilégie les êtres qui lui sont chers.

Un beau portrait jonché des couleurs de notre temps raconté par un homme ouvert d'esprit et de cœur qui veut revoir son père, qui veut entendre sa voix du matin qui chante les mélopées du soir. Un père reste un père, on ne lui fera jamais porter un masque apocalyptique, on l'idéalise.

Yana a publié de nombreux recueils et aussi un beau roman intitulé le ministre et le marabout et cette interview reste célèbre sur la catastrophe d'Eséka que je vous invite à consulter ici. https://o-trim.co/YIN. Depuis ce temps, il galope avec le Cameroun et sur son dos il porte son digne père.

Ses textes sont d'une grande portée littéraire puisqu'un pan de l'histoire y est évoqué. C'est aussi un livre d'imaginations. La vie d'un père est racontée avec une grande émotion. Tout au long des lignes, on trouve non seulement un peu de romantisme dans la musique des mots, mais aussi une puissance mythologique, de la nouvelle avec une tendance épistolaire. Car, Yana Bekima aime aussi écrire des lettres, que ce soit à son père, comme je l'appelle plus haut... à son parrain. C'est un roman qui engendre chez le lecteur la nostalgie, mais qui finit par recréer un champ de liberté retrouvée.

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