Madagascar: Garbit exige des résultats rapides et durables des administrateurs

Le gouverneur général Hubert Garbit, de retour à Madagascar pour un second mandat (mai 1920-mars 1928) estime que, pour une meilleure " politique indigène ", il faut mettre en place une législation du travail d'inspiration libérale, accompagnée d'une " propagande morale " (lire Notes du lundi 30 janvier et précédentes).

Cette nouvelle politique, selon Jean Fremigacci, est expliquée dans la circulaire du 5 aout 1920

(" Mise en valeur coloniale et travail forcé : la construction du chemin de fer Tananarive-Antsirabe 1911-1923", revue d'études historiques " Hier et Aujourd'hui " N°1-2, 1975). Ce texte porte sur " l'action administrative à exercer en vue du développement économique de la colonie par un meilleur rendement de la main-d'œuvre ".

Ainsi, les chefs de circonscription doivent " éveiller le sentiment du devoir et de la responsabilité chez les Fokonolona ", en usant uniquement de " procédés conformes à la volonté de la France libératrice et éducatrice ". Cependant, " les résultats devront être rapides et en même temps durables ". Les chefs de circonscription ont trois mois pour rendre compte de ces résultats. Pour l'auteur, " l'ambigüité était totale ".

Ce retour de Garbit dans la Grande ile amène d'autres changements dans les travaux du railway Tananarive-Antsirabe. Le chef de province du Vakinankaratra, Bensch, s'efforce de maintenir un contrôle administratif pour toutes les questions non techniques sur le service de la construction du TA. Ce qui lui vaut l'animosité de Girod, toujours directeur des Travaux publics, et de Jaquet, chef de service du TA. Tous deux ont demandé au gouverneur général par intérim Guyon la mutation de Bensch, mais en vain.

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Le nouveau gouverneur général leur donne satisfaction sur le champ. Bensch quitte Antsirabe, le 23 aout 1920, remplacé par un collègue " prêt à bien des compromissions " et qui prend, dans cette ville, son premier poste de chef de province titulaire. Il s'agit de l'administrateur Fraud. Comme chef de district, ce dernier a fait ses preuves dans le maniement des prestataires " à Manjakandriana. En outre, précise Jean, Fremigacci, il accepte de se charger des responsabilités que l'autorité supérieure veut éluder. Et même " de fermer les yeux sur des irrégularités, voire des malhonnêtetés, commises avec l'accord tacite du chef de la Colonie ".

L'auteur de l'étude ajoute qu'en même temps que Bensch, les Travaux publics obtiennent également d'être débarrassés du commandant Olivier, nommé en juin 1918 par le gouverneur général Schrameck, pour contrôler les finances du railway TA. Cet officier d'administration dénonce alors les scandales dont il est témoin et Garbit ordonne une enquête. Celle-ci aboutit, en 1921, à la mise en accusation d'Olivier qui est renvoyé de Madagascar.

" L'inspection des Colonies devait rencontrer les plus grandes difficultés en 1922, pour rétablir la vérité. "

Les faveurs d'Hubert Garbit s'étendent aussi à certains colons, de sorte que l'adjudication des derniers lots du TA s'effectue en fonction d'intérêts particuliers. À la fin de 1920, il reste à entreprendre le tronçon Sambaina-Antsirabe (120 à 154 km) qui forme les 14e et 15e lots

Par la suite, respectivement les 6 janvier et 7 mars, leur réalisation est confiée à la société Planche& Gallois, d'une façon tout à fait irrégulière, qui suscite une véhémente protestation du syndicat des entrepreneurs. Les adjudicataires n'ont, en effet, jamais exécuté de travaux publics auparavant. Ce sont des exploitants de graphite, dont les affaires sont au point mort par suite de la crise mondiale qui affectent spécialement leur activité. " En attendant des jours meilleurs, ils veulent faire de l'entreprise dans des conditions qui méritent d'être examinées. "

D'après l'auteur de l'étude, " à première vue ", le marché n'est pas très profitable ". L'Administration tire ses prix au maximum et une comparaison entre les séries de prix de 1913 et de 1921 montre que " leur progression est nettement inférieure au taux moyen de l'inflation ". Pour limiter le prix de revient de l'ensemble, l'Administration table, sans aucun doute, sur une main-d'œuvre à bon marché. Mais le devis estimatif proposé aux concurrents pour le 15e lot est tellement serré que, sur les neuf soumissionnaires, huit ne proposent aucun rabais. Au contraire, ils demandent une majoration jusqu'à 20%. Seuls Planche et Gallois, pour les 14e et 15e lots, consentent un rabais de 16%.

" Anomalie qui ne peut s'expliquer qu'à la lumière de ce qui devait suivre."

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