Madagascar: Blanchiment d'argent - Madagascar dans le top 5 des pays à risque

Le quartier d'Anosy, à Antananarivo.

Le Service de renseignement financier tire la sonnette d'alarme. Madagascar est classé 5e pays le plus à risque en matière de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme, à l'indice AML de Bâle, publié pour 2022.

En très mauvaise posture. À s'en tenir à l'information lâchée par Mamitiana Rajaonarison, directeur général du Service de renseignement financier (SAMIFIN), hier, Madagascar se rapproche dangereusement de la zone rouge en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.

Lors de la présentation du rapport d'activité du SAMIFIN pour le compte de l'année 2022, hier, à son siège à Ambohijanaka, il a été rapporté que la Grande île figure à la 5e position en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, selon l'Indice AML de Bâle ou "Assessing money laundering". Un classement issu des évaluations faites en 2022. Aussi, Madagascar obtient une note de 7,59 sur 10. Il est à souligner que plus la note se rapproche de 10, plus le pays est considéré à risque.

L'Indice AML est publié par l'institut de Bâle sur la gouvernance depuis 2012. Pour l'année 2022, cent-vingt-huit pays ont été évalués. Les critères pris en compte sont regroupés en cinq rubriques à savoir, la qualité de la lutte contre le blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, la corruption, la transparence et la responsabilité publique, la fiabilité des normes financières, ainsi que les risques juridiques et politiques. C'est dans la première rubrique qui compte pour 65% de la note que Madagascar est le plus mal en point, avec 8,17 sur 10.

"Cela veut dire que nous sommes le 5e pays le plus à risque au monde. Que nous attirons beaucoup de blanchisseurs d'argent et de financeurs du terrorisme", regrette le patron du SAMIFIN. Une entité dont la vocation est de détecter et lutter contre ces deux fléaux. Il ajoute que "sur les vingt-six pays de l'Afrique subsaharienne, nous sommes à la 3e place, après le Mozambique et la République démocratique du Congo (RDC)".

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2 390 milliards d'ariary

Mamitiana Rajaonarison souligne, en passant, que le Mozambique et plus récemment la RDC sont dans la liste grise du Groupe d'action financière (GAFI). Il s'agit l'organisme mondial de surveillance du blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Être fiché dans la liste grise du GAFI entraîne des répercussions économiques conséquentes, notamment, en matière de transac- tions financières internationales. Les flux de capitaux venant du pays concerné "ne sont plus crédibles".

Les données fournies par GAFI font justement partie des dix-huit sources accessibles au public sur lesquelles l'Indice AML de Bâle est édifié. Transparency international, la Banque mondiale ou encore le Forum économique mondial figurent aussi parmi ces sources. S'agissant du GAFI, le basculement dans sa liste grise est une épée de Damoclès sur Madagascar depuis quelques années. Pour l'heure, la Grande île est dans la catégorie des pays qui font l'objet "d'un suivi renforcé".

"Les juridictions soumises à une surveillance renforcée travaillent activement avec le GAFI pour remédier aux défaillances stratégiques que présentent leurs régimes de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme (... )", peut-on lire sur le site web du Groupe d'action financière. Cela consiste à travailler pour se conformer aux quarante recommandations formulées à l'échelle mondiale par cette entité, en 2012. "Nous avons encore vingt-sept recommandations sur quarante, à traiter", note le boss du SAMIFIN.

Le plan de mise en conformité aux recommandations du GAFI a déjà obtenu le feu vert du conseil des ministres, l'année dernière. "En appliquant correctement ce plan de mise en conformité, nous pouvons faire un bond dans les notations et aussi éviter de basculer dans la liste grise. Ce qui sera néfaste pour l'économie de Madagascar", soutient Mamitiana Rajaonarison. Il ajoute que les efforts à faire ne concernent pas seulement le gouvernement ou les entités publiques, mais aussi les acteurs privés.

La prochaine évaluation de la Grande île par GAFI est prévue en avril. Les entités déclarantes des flux financiers comme les banques, les casinos, ou encore, comme énoncé par le directeur général du SAMIFIN, les concessionnaires automobiles et les experts comptables, entre autres, ont tout autant de responsabilités dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

Mamitiana Rajaonarison explique aussi que le secteur de l'import - export est celui où des flux financiers suspects sont fréquemment détectés. Ceci par le biais de fraudes douanières, de fraudes fiscales, d'infraction au code de change, ou de corruption. S'agissant du financement du terrorisme, la philanthropie à l'endroit d'association non gouvernementale présenterait le plus de flux suspects. Seulement, le patron du SAMIFIN indique qu'une évaluation est en cours. Les résultats seront connus en mai.

En attendant les résultats du plan d'action acté l'année dernière, les chiffres inscrits dans le rapport d'activité du SAMIFIN présenté, hier, tendent à confirmer la mauvaise note de Madagascar à l'indice AML de Bâle. Pour l'année 2022, en effet, le flux financier présumé illicite détecté s'élève à 2.390 milliards d'ariary. Soit une hausse de 27% par rapport à l'année 2021.

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