Madagascar: Insuffisance rénale - Près de trois mille malades non dialysés

Madagascar a célébré la journée mondiale du rein, le 11 mars. C'était une occasion pour la société malgache de Néphrologie de sensibiliser la population sur les préventions de l'insuffisance rénale.

L'insuffisance rénale est une maladie irrévocable et mortelle, sans prise en charge. Des professionnels de santé, des malades atteints de la maladie rénale, accompagnés par leurs familles et/ou amis, ont parcouru les rues de Mahamasina et d'Anosy, jusqu'à Ampefiloha, samedi, dans le cadre de la célébration de la journée mondiale du rein. Leur objectif est de parler beaucoup plus de la maladie, notamment, de l'insuffisance rénale. Cette maladie tue de plus en plus. " Nous estimons à trois ou à quatre mille les malades qui doivent être dialysés, sur les vingt-sept millions de population, mais la plupart d'entre eux sont introuvables. Il n'y a qu'une petite portion de ces malades qui sont dialysés. Nous les évaluons à près de cinq cents, dans les nombreux centres de dialyse ", indique le professeur Willy Randriamarotia, néphrologue, dans le cadre de cet événement. Le traitement de la maladie rénale est un luxe inaccessible.

Ce qui fait que beaucoup s'en privent. Une personne atteinte d'insuffisance rénale doit effectuer trois dialyses par semaine et à vie, alors qu'une séance de dialyse coûte en moyenne, 200 000 ariary.

2 500 000 ariary/mois

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Pour un mois de traitement, donc, un patient doit disposer de près de 2 500 000 ariary. Par ailleurs, les centres de dialyse publics et privés sont centrés à Antananarivo. Alors qu'il y a bien des malades qui en ont besoin dans les autres provinces. Sans cette dialyse ou la greffe rénale, qui n'est pas encore réalisable à Mada­gascar, faute de loi, une personne atteinte de l'insuffisance rénale peut en mourir. " La dialyse ne guérit pas les reins, mais remplace temporairement la fonction du rein, en débarrassant les déchets et l'eau accumulés en excès dans le corps. La greffe, par contre, consiste à remplacer le rein endommagé. Dans ce cas, le patient n'a plus besoin d'aller à l'hôpital, son traitement se poursuit avec des médicaments", enchaine le pr Willy Randriamarotia.

Le professeur Yoël Rantomalala, président de la société malgache de Néphrologie fait appel à l'État d'aider la masse populaire dans la prise en charge de cette maladie. " Certains n'attendent que la mort chez eux ", regrette-t-il.

Témoignages

Toussaint Ravalisaona

" Je suis toujours là après vingt-neuf ans de dialyse "

Toussaint Ravalisaona défie les sciences. Alors que la durée de vie est de près de 10 ans pour les personnes qui ont commencé à 30 ans, la dialyse, ce sexagénaire a vécu 20 ans de plus. " Cela fait 29 ans que je suis dialysé. Le plus important, pour moi, c'est d'être encore en vie. Je remercie Dieu pour sa bénédiction ", témoigne-t-il. Ces 29 ans de dialyse signifient près de cinq mille séances de dialyse ininterrompues, plusieurs centaines de millions d'ariary dépensés. Toussaint Ravalisaona n'envisage plus de faire une greffe rénale. " À mon âge, c'est une dépense inopportune. Je continue mes traitements avec la dialyse ", note cet homme qui a commencé la dialyse, en 1994, à l'âge de 34 ans. Malgré sa maladie, et grâce à la dialyse, Toussaint Ravalisaona a pu mener une vie normale. Ce travailleur indépendant a pu faire vivre sa famille, et voir ses enfants réussir leur vie. " Je souhaite que l'État prenne en charge cette maladie. C'est trop cher . ", note ce membre de l'association Amis et malades du rein (Amarein).

Mahery Rasolofomanana

" C'est la maladie qui dicte ma vie "

L'insuffisance rénale a chamboulé la vie de Mahery Rasolofomanana, un homme âgé de 35 ans. Depuis qu'il a été diagnostiqué avec cette maladie, en 2017, il a fait une croix à ses projets d'avenir. Sa vie ne tourne plus qu'autour de sa maladie. " Je vis au jour le jour. Mes gains mensuels, je les utilise pour mes traitements. Je dépense près de 800 000 ariary par mois, pour mes huit séances de dialyse. Au début, j'ai reçu l'aide de ma famille, mais c'est devenu un autofinancement, depuis que j'ai commencé à travailler ", raconte ce rédacteur web chez une société offshore. Il a dû, par ailleurs, mettre de côté sa vie sociale. " Ce qui m'attriste le plus, c'est que je n'ai plus le contrôle sur ma vie. C'est cette maladie qui la dicte. Je n'ai plus le droit de passer une soirée ni de trinquer avec des amis. déplore-t-il. " Il n'y a plus que ma main droite qui est valide. Je ne remercierais jamais assez ma soeur qui m'apporte son soutien aussi bien dans les tâches quotidiennes que dans cette maladie. Elle est toujours là pour m'accompagner dans mes séances de dialyse et pour m'aider à la maison ", enchaine-t-il. Mahery Rasolofomanana implore l'État de régler le problème d'eau et d'électricité dans les hôpitaux. " C'est fatal pour les malades dialysés", alerte-t-il.

Anjara

" J'ai envie de voir mes enfants grandir"

Quand tout va mal, Anjara, un homme de 37 ans atteint d'une insuffisance rénale, voit encore la lumière au bout du tunnel. Il y a sept ans, les médecins ont dit à sa famille qu'il n'y a plus d'espoir pour lui. " Mais je suis encore là. Je pense que je suis une bénédiction de Dieu. J'ai même réussi à avoir un enfant, si les pronostics de procréation sont minces, voire inexistants, pour une personne dialysée.", lance-t-il. Sa maladie a commencé par des douleurs au dos, de la fatigue, du vomissement, de la transpiration. La dialyse lui a été inéluctable, depuis. Sept ans plus tard, il est encore là, moins robuste que lorsque ses reins ont été encore en bonne santé, mais bon vivant. Ses combats : quatre heures de dialyse trois fois par semaine, des fatigues insurmontables, le fait de devoir accepter de travailler moins et, par conséquent, de rapporter moins à sa famille, et des nombreuses privations. Cet homme lutte pour vivre le plus longtemps possible. " Mon objectif est de voir mes deux enfants, réussir leur vie", émet-il

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