Madagascar: Vives tensions au sein de l'appareil judiciaire malgache

Le Syndicat des magistrats de Madagascar a publié jeudi soir un communiqué pour alerter sur la dégradation de l’environnement judiciaire en ce début d’année d’élection présidentielle. (image d'illustration)

Ces derniers jours, la tournure qu'ont prises certaines affaires judiciaires ont crispé un peu plus les relations entre les magistrats et l'exécutif. Et plus particulièrement avec leur nouvelle Garde des Sceaux, fraîchement nommée à l'occasion du remaniement le 20 février dernier.

Après plusieurs plaintes de la part de magistrats malmenés, le Syndicat des magistrats de Madagascar a publié jeudi soir 16 mars un communiqué pour alerter sur la dégradation de l'environnement judiciaire en ce début d'année d'élection présidentielle. De son côté, la ministre se défend d'une quelconque ingérence.

" Le décalage se creuse entre les grands discours et les décisions prises " dénonce le Syndicat des magistrats dans son communiqué, avant de condamner la banalisation des atteintes multiformes à l'indépendance de la justice. " Certains magistrats subissent des pressions quotidiennes, lors du traitement de certains dossiers, notamment les dossiers considérés comme dossiers sensibles " explique son président, Mbitanarivo Andriantsihorisoa. " L'ingérence des autorités exécutives, par rapport aux autorités judiciaires, notamment au niveau des PAC, c'est toujours ça le problème à Madagascar " déplore-t-il.

Les PAC, les pôles anti-corruption, se retrouvent à nouveau au coeur des velléités. Une affaire en particulier fait couler beaucoup d'encre. Celle d'une mairesse IRD (élue sous la bannière du président Rajoelina) accusée d'avoir détourné 20 milliards d'ariary (4,5 millions d'euros) et mise en prison dans l'attente de son procès. D'après les magistrats en charge du dossier, la ministre aurait ordonné la libération de l'élue, malgré des charges accablantes, au motif qu'il ne faudrait " pas toucher aux maires en cette période préélectorale ". Des accusations que la ministre de la Justice Landy Mbolatiana Randriamanantenasoa conteste.

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" En ce qui concerne les menaces que j'aurais proférées, je ne veux pas polémiquer avec cela. Mon rôle est seulement de faire en sorte de coordonner les affaires judiciaires. Concernant l'affaire du Maire de Vavatenina [commune urbaine et chef-lieu de district dans la région Analanjirofo, Ndlr], quand elle a comparu au PAC, j'ai rappelé aux magistrats que la détention n'est pas forcément la solution pour régler les litiges avec les maires.

C'était un rappel, mais pas de l'ingérence. Eux, ils gardent leur indépendance. J'ai n'ai pas donné d'ordre d'arrêter leur poursuite envers les maires. Ces maires qui n'ont pas forcément les compétences pour gérer les communes, gérer les budgets... Vous ne pouvez pas comparer le maire d'Antananarivo et un maire qui se trouve dans une zone enclavée. Donc vraiment, ce n'est pas de l'ingérence, mais un rappel à l'ordre de bien faire la différence entre l'intention délictuelle et l'intention de compétence. "

La mairesse a finalement été remise en liberté provisoire. Deux hauts responsables du Pôle Anti-corruption d'Antananarivo, dont le procureur général du second degré, ont été notifiés mercredi en conseil des ministres de l'expiration de leur mandat. Si la ministre assure qu'il ne faut voir aucun lien entre l'affaire de la mairesse et la décision du conseil des ministres, de leur côté, la société civile et certains bailleurs, que RFI a contactés, se disent très préoccupés par ces " concours de circonstances " et ces " rappels à l'ordre " véhéments.

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