Madagascar: Mater la révolte en détruisant le cactus

Le raketa ou cactus, plante épineuse du Sud, a donné son nom à l'Androy. Il est surtout l'un des instruments utilisés par les forces de pacification françaises, pour vaincre l'insurrection de 1896 à 1903.

Selon Raymond Decary en 1929 (La destruction des cactus par une cochenille à Madagascar : ses conséquences économiques et sociales), le raketa est employé à plus d'un titre dans la région Androy. La population l'utilise comme haie de protection de ses biens (cases, troupeaux). Il est aussi employé dans l'alimentation du bétail. Brûlées, ses feuilles complètent les herbes des pâturages, rares dans ces zones de sécheresse.

Vertes, elles conservent l'eau pour abreuver les boeufs très nombreux qui font la richesse de la population. Raymond Decary souligne, en outre, que même celle-ci se nourrit également des fruits du cactus, entre les mois d'aout et de février. Du fait de la pluviométrie insuffisante, en effet, les cultures vivrières ne produisent pas durant cette période. À cause de cette place importante jouée par le cactus dans la vie de la population, la première action des forces de pacification française dans l'Androy, est de détruire cet épineux pour vaincre la lutte nationaliste. Selon Jeanne Rasoanasy (Menalamba sy Tanindrazana), les Français ne disposent encore ni de produits ni d'une cochenille qui peut détruire les raketa comme ils le feront en 1925. À cette époque, ils obligent leurs prisonniers à couper des forêts d'épineux.

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De ce fait, ils peuvent accéder facilement à tous les villages et hameaux dans lesquels, selon eux, se cacheraient les insurgés Menalamba. Parallèlement, en agissant ainsi, ils mettent en difficulté la population dans sa recherche de nourriture en période de soudure. En 1899, les troupes françaises pénètrent au sud d'Ambovombe où résident les Sevohitse et les Maroalaka. À partir de là, ils comptent réduire à néant la lutte menée dans tout l'Androy où les Menalamba constitueront bientôt une armée dirigée par Tsileza et Titsy.

Face à l'invasion des pacificateurs, Titsy fait mine de se plier. Entretemps, ce dernier regroupe des hommes pour chasser les Vazaha. Tsileza le rejoint avec son armée et s'installe le long de la rive occidentale du Manombo. Titsy, pour sa part, se poste de l'autre côté. Bientôt, leurs actions portent leurs fruits et les Analavondrobe viennent les renforcer. Au début, les pacificateurs préfèrent les ignorer pour se concentrer sur la construction d'une garnison à Ambovombe et plusieurs affrontements se voient entre les deux armées. En même temps, malgré les raids incessants, les Français n'arrivent pas à se saisir des résistants Antandroy, bien tapis dans leur région qu'ils connaissent mieux que quiconque. Mai 1901 verra la bataille la plus virulente entre Menalamba et Français près d'Ambovombe. Titsy est à la tête de mille cinq cents hommes pour mener l'assaut contre la garnison française. Mais ils doivent se retirer, les armes en présence étant déséquilibrées : fusils et sagaies contre canons.

Cela ne décourage pas pour autant Titsy et ses hommes, dont les rangs sont étoffés par la population d'Ezila et Imokoka, au Nord-Ouest. En septembre, Titsy annonce au chef de garnison que ses partisans et lui « refusent d'obéir aux ordres des Blancs, de payer les impôts et de se lier d'amitié avec eux, tant qu'ils occuperont l'Androy ». Une autre bataille violente met aux prises Menalamba et pacificateurs français à Ambondro. Mais ces derniers ne peuvent pas vaincre les nationalistes malgré leur force de frappe. Par malheur, des indiscrétions permettent aux Vazaha de se saisir de la plupart des chefs Menalamba de la région. Ces arrestations refroidissent quelque peu les résistants. De plus, les Français imposent une lourde taxe sur la détention d'armes à feu et proposent une alternative : la payer ou rendre les armes. Mais les hommes du Sud n'acceptent pas cette défaite. La lutte reprendra en 1902 et s'étend. En 1903, elle atteint la région de Farafangana. Les Antefasy, Antesaka, Antanosy, Tanala rejoignent les Antanosy. Les batailles sont sanglantes, les Menalamba étant disposés à combattre « jusqu'à la victoire finale ». Mais leur lutte sera complètement anéantie en 1906.

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