Soudan: Guerre pour le pouvoir - Comment sortir par le haut?

analyse

Quatre jours après le déclenchement de la guerre pour le pouvoir, entre les deux généraux rivaux au Soudan, le bilan continue de s'alourdir. Selon plusieurs sources, la barre des deux cents morts a été largement franchie pendant que les blessés se comptent par milliers. Le drame est que ni l'officier-président, Abdel Fattah Al Burhan, ni son homologue Mohamed Hamdane Daglo dit Hemeti, à la tête des forces paramilitaires à l'origine du coup de force contre les autorités de la transition, ne veulent entendre raison.

C'est dire que, pour l'instant, aucune éclaircie, encore moins une lueur d'espoir d'un cessez-le-feu imminent, ne semble se dessiner à l'horizon. Et ce, malgré les appels itératifs de la communauté internationale à la cessation immédiate des hostilités. La question est de savoir comment sortir de l'impasse dans laquelle le pays est en train de sombrer inexorablement, d'autant plus que les protagonistes restent jusque-là hermétiquement fermés au dialogue.

Tant que durera le langage des armes, le Soudan continuera de compter ses morts

La question est d'autant plus fondée que pour ne pas arranger les choses, l'aéroport du pays est bloqué en raison des combats, et aucun émissaire extérieur n'est capable de mettre les pieds dans le pays pour tenter un quelconque rapprochement. Or, à l'allure où vont les choses, il ne fait pas de doute que tant que durera le langage des armes, le Soudan continuera de compter ses morts.

%

Mais jusqu'où ira l'escalade et surtout les violents affrontements qui, au-delà des nombreux morts qu'ils occasionnent, contribuent à rendre la situation du pays encore plus chaotique de jour en jour ? Bien malin qui saurait répondre à cette question.

En attendant, le triste constat est que ce sont les pauvres populations, prises au piège de ces affrontements fratricides, qui payent le plus lourd tribut d'une guerre qui leur est totalement étrangère. Obligées qu'elles sont, dans la plupart des cas, de se cloîtrer en manquant parfois de tout, au moment où les hôpitaux sont largement débordés par les vagues des blessés. Mais devant ce triste spectacle, c'est l'incapacité à la limite de l'impuissance de la communauté internationale à taper du poing sur la table pour imposer le silence des armes aux belligérants, qui est le plus à déplorer.

Comment peut-il en être autrement quand, au-delà des appels officiels à la désescalade, chacun des deux protagonistes continue de bénéficier souterrainement de soutiens extérieurs qui apparaissent comme autant de parrains potentiellement prêts à jouer un rôle dans ce conflit ?

De quoi rappeler le scénario libyen où l'hypocrisie de la communauté internationale a fini par s'afficher au grand jour, et a conduit le pays dans la situation d'enlisement que l'on sait. Une communauté internationale fortement divisée non seulement en raison de l'alignement de puissances extérieures rivales derrière les belligérants, mais aussi des puissances extérieures enclines à attiser le feu pour tirer les marrons du feu.

Avec cette guerre déclarée pour le pouvoir entre ces deux généraux rivaux, c'est le rêve d'un retour rapide à l'ordre constitutionnel, qui s'évanouit

Dans le cas de la Libye, il ne fait plus de doute aujourd'hui que les plus grands bénéficiaires de la situation de ni paix ni guerre qui perdure au pays de Kadhafi depuis l'élimination physique du Guide de la Jamahiriya libyenne dans les conditions que l'on sait, ce sont les grandes puissances qui se sont ouvert un boulevard pour continuer à piller les immenses ressources pétrolières du pays.

C'est pourquoi il faut craindre l'enlisement pour le Soudan. Surtout si les soutiens de puissances extérieures au Général Hemeti, sont avérés au moment où il se dit aussi que d'autres sont alignées derrière le Général Al-Burhan. Surtout aussi si le conflit est appelé à se prolonger et à tendre vers un équilibre des forces sur le terrain. Dans ce cas de figure, on peut même craindre une partition de fait du pays si le mouvement du Général Hemeti qui contrôle une partie du pays, devait in fine se transformer officiellement en rébellion.

Mais à ce jeu de rivalités de puissances étrangères par acteurs nationaux interposés, c'est le peuple soudanais qui sera le plus grand perdant dans cette crise politico-militaire qui est encore loin d'avoir dévoilé tous ses secrets. En tout état de cause, avec cette guerre déclarée pour le pouvoir, entre ces deux généraux rivaux, c'est le rêve d'un retour rapide à l'ordre constitutionnel pour les révolutionnaires soudanais, qui s'évanouit chaque jour un peu plus.

Eux qui croyaient sans doute avoir fait le plus difficile en déboulonnant Omar El-Béchir du pouvoir, mais qui se trouvent, quatre ans après la chute du dictateur, fortement contrariés dans leur soif de démocratie par des hommes en treillis plus que jamais boulimiques du pouvoir et visiblement décidés à le conserver par tous les moyens. Pauvre Soudan !

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.