Madagascar: Les grandes communautés étrangères d'Antananarivo

La capitale malgache, à partir de la colonisation, compte parmi sa population plusieurs communautés étrangères.

La plus importante, comme nous l'avons vu dans l'une de nos précédentes Notes, est, sans conteste, constituée par les Français. Leur niveau de vie est, dans l'ensemble, plus élevé que la moyenne malgache. A côté d'eux se trouvent les Comoriens qui, par contre, ont un très faible niveau de vie. L'enseignant-chercheur Gérald Donque explique en 1968 cette situation par « leur absence d'instruction et de qualification professionnelle ». Ainsi, ils ne peuvent remplir que les fonctions de « boys », gardiens d'immeubles et veilleurs de nuit, plantons. Et quelquefois de cuisiniers, « d'autant plus appréciés que leur religion multipliant les tabous alimentaires, constitue une garantie pour leurs employeurs ». Ils sont de rite chaféite caractérisé par la stricte observance des prescriptions coraniques. Des associations d'entraide, comme le Foyer comorien, cherchent à développer leur solidarité.

Car ils demeurent très divisés entre eux, à cause de « rivalités opposants les Grands-Comoriens aux Anjouanais, rivalités de clans, de villages, de confréries enfin ». La population locale accepte facilement les Comoriens vis-à-vis desquels elle éprouve « un vague sentiment de supériorité raciale et sociale ». Les Comoriens vivent entre eux dans les quartiers populeux, sans trop se mêler aux autres populations de la capitale, « contrairement à l'Ouest du pays où leurs unions avec des Malgaches sont relativement fréquentes ».

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Au début, beaucoup sont venus seuls, comptant amasser un « petit pécule » et retourner dans leurs iles. Mais progressivement, ce sont des couples qui immigrent avec leurs enfants. Les Karana- constitués d'Indiens, de Pakistanais et d'apatrides d'origine indienne ou pakistanaise- sont arrivés dans la Grande ile, surtout après la conquête française. Leur mouvement d'immigration est continu entre les deux guerres mondiales, pour être définitivement stoppé après la dernière. C'est pourquoi, remarque Gérald Donque, « leur communauté ne se développe plus que par un croît naturel très rapide, car les familles restent très prolifiques». Ainsi, « les deux-tiers des Karana d'Antananarivo sont nés à Madagascar et la majorité ne connait les Indes autrement que par les livres, les photos, les films ou les récits ».

Aux yeux des Tananariviens, ils forment des « communautés fermées et homogènes ». En effet, ils sont presque tous originaires de la région de Bombay, des districts de Kathiawar et Gujerat. Ensuite, leur langue, le gujarati, est bien conservée. Elle leur sert « d'idiome d'initiés » dans les transactions commerciales vis-à-vis des Malgaches et des autres étrangers. De plus, ils partagent le même genre de vie et les mêmes moeurs, notamment la religion musulmane avec tout ce que cela implique comme interdits alimentaires, dans la fréquentation de la Mosquée le vendredi, la célébration ostensible des fêtes nationales ou religieuses... Il y a aussi le port du costume traditionnel même si, dans ce domaine, l'occidentalisation s'affirme chez les jeunes, hormis les jours de fête.

Enfin, il y a leur rôle économique car, à Antananarivo, il existe d'importantes familles karana issues du commerce. « De fortes entreprises familiales apparemment indépendantes sont, en fait, liées entre elles, de telle sorte qu'elles finissent par constituer de véritables intégrations horizontales ou verticales. » Le commerce les attire plus particulièrement- surtout celui des tissus neufs ou de friperies- au stade de l'import-export du gros ou du détail. « Mais certains commencent (en 1968) à investir leurs capitaux dans de petites industries locales tandis que d'autres s'orientent vers les hôtels et les restaurants, les salles de spectacles, etc. » Pourtant, Gérald Donque souligne que cette « homogénéité de façade cache de profondes différences».

De nationalités, en premier lieu car, autrefois sujets anglais, tous confondus, ils sont placés en 1947 devant de graves problèmes d'appartenance nationale. En 1968, on distingue parmi eux des Français (13%), des Indiens, des Pakistanais, encore quelques Anglais et enfin des apatrides. « Ces derniers sont rejetés par les conditions du Code de la citoyenneté indienne et ne sont pas acceptés par d'autres pays. » Beaucoup cherchent à obtenir la nationalité malgache par sentiment, pour des motifs pratiques, car dans certaines familles, « les membres possèdent des nationalités différentes, pas très utiles dans les tractations financières et économiques ».

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