Afrique: «On observe une diminution des projets de centrales à charbon dans toutes les régions d'Afrique»

En mars dernier, le secrétaire général de l'ONU a renouvelé l'appel à un arrêt immédiat des nouveaux projets de centrales à charbon et à un démantèlement de celles existantes d'ici 2030 dans les pays développés, et 2040 dans les pays en développement. En 2022, la flotte de centrales au charbon a diminué partout dans le monde, sauf en Chine. Et en Afrique aussi, elles sont en perte de vitesse. Entretien avec Flora Champenoix, chercheuse à Global Energy monitor.

Les centrales électriques au charbon africaines pèsent au total 9 gigawatts (GW) : c'est 0,45% des 2 000 GW au charbon installés dans le monde. Seuls trois pays, l'Afrique du Sud, le Maroc et le Zimbabwe ont plus d'1 GW en fonctionnement. Pourtant, loin d'observer un phénomène de rattrapage en Afrique, le 9e rapport de Global Energy Monitor constate au contraire que les capacités africaines d'électricité au charbon ont reculé l'an dernier. La mise au rebut de la vieille centrale de Komati en Afrique du Sud a plus que compensé la création de nouvelles unités et le phénomène devrait s'amplifier.

Par ailleurs, les nouveaux projets, 10 GW prévus, 3% des projets mondiaux, sont également en déclin. Dispersés dans 11 pays, de petite taille - à part trois d'entre eux en Afrique du Sud, au Mozambique et au Zimbabwe -, ils dépendent pour certains du soutien de la Chine, à Madagascar, au Niger ou en Tanzanie. Or, Pékin s'est engagé à ne plus financer les projets de centrale au charbon à l'étranger, ce qui compromet largement leur réalisation.

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Comment expliquer que les projets de centrales à charbon sont en perte de vitesse en Afrique ?

Flora Champenoix : Premièrement, le changement climatique frappe le monde et l'Afrique de plein fouet. De toutes les énergies fossiles, le charbon est vraiment le combustible le plus polluant. Et, de plus, le financement accordé à la construction de nouvelles centrales au charbon en Afrique devient de plus en plus limité. Donc, en 2021, tous les pays du G20, y compris la Chine, ont promis la fin des financements de centrales à charbon à l'étranger. On voit aussi beaucoup d'activistes se mobiliser contre les dégâts du charbon. Par exemple, au Kenya, pendant des années, des activistes ont lutté contre la centrale de Lamu et elle est de facto annulée. Il y a vraiment de la pression de tous les côtés.

Il y a à peu près une dizaine de pays où il y a des projets en considération. Beaucoup sont très petits. Il y a six pays africains parmi ces onze pays qui n'ont qu'un seul projet à l'étude : le Kenya, l'Eswatini, la Zambie, Madagascar, le Niger et la Tanzanie. Trois d'entre eux dépendent d'une sorte de soutien chinois. Si la Chine tient son engagement de mettre fin au financement de l'électricité au charbon à l'étranger, il est donc très probable que ces projets n'avancent jamais. Et on voit vraiment une diminution des projets dans tous ces pays du continent.

Avez-vous observé ce qu'il se passait en Afrique de l'Ouest et en Afrique centrale ?

Oui, on voit vraiment cette diminution dans toutes les régions de l'Afrique. Par exemple, en Côte d'Ivoire, il y avait une centrale en considération qui a été annulée au moment de la COP en 2021. Le pays se tourne plutôt vers le gaz. En Guinée, il y a eu un projet abandonné. En RDC, il y avait un projet qui, a priori, n'avancera pas. On voit dans chaque région de l'Afrique des décisions qui mettent le charbon à l'écart.

Est-ce une opportunité pour les pays africains de se tourner vers d'autres sources d'énergie, et en particulier les énergies renouvelables ?

Oui, c'est une vraie opportunité pour les pays de se tourner vers les énergies renouvelables, surtout dans les pays émergents et à faible revenu. La communauté internationale doit vraiment offrir une aide financière et une aide technique pour réaliser cette transition et les pays les plus riches doivent aussi montrer l'exemple en abandonnant le charbon et les autres énergies fossiles. Donc, vraiment, le monde entier doit se tenir à ses engagements et prendre cette opportunité pour vraiment avoir une transition plus propre.

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