Madagascar: Une bourrasque emporte le régime Tsiranana

Émeute ou rébellion? Ni l'une ni l'autre. En mai 1972, la Grande île fait avec succès ses premiers pas dans la révolution. Deux régimes se succèdent, traduisant une brusque et violente transformation des structures de la vie nationale. Les journées de mai 1972 ont pour origine les événements de l'année précédente, qui semblent pourtant n'avoir aucun lien avec elles. D'une part, la première grève, déclenchée par les étudiants, le 25 mars 1971, qui entame la fermeture de l'Université Charles de Gaulle d'Ankatso jusqu'au 15 avril.

D'autre part, le grand soulèvement dans le Sud, à partir du 2 avril, dirigé par Monja Jaona, par lequel les populations oubliées des bushs crient leur désarroi. Alors que le président de la République, Philibert Tsiranana, est réinvesti le 1er mai 1972, tout commence par une simple liste de revendications des étudiants en médecine de Befelatanana. Ils réclament le maintien de leur association, l'alignement de leur cycle d'études sur celui de leurs homologues d'Ankatso, la délivrance d'un diplôme identique à tous les disciples d'Hippocrate parvenus au terme de leurs études, l'octroi d'une bourse équitable.

Progressivement, la grève s'étend à toute l'Université, allant jusqu'à critiquer le système de l'Éducation nationale. Ces petites étincelles sont minimisées, banalisées, car pour les dirigeants, elles ne nécessitent pas de solutions urgentes. Pourtant, les événements évolueront vite, et finissent par déborder le simple cadre universitaire et Antananarivo. Ils touchent, d'un côté, les travailleurs, et de l'autre, les chefs-lieux des cinq autres provinces et diverses grandes villes.

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Un grand mouvement populaire remet en cause l'assistance technique étrangère, les accords de coopération franco-malgache, les relations avec certains pays, comme l'Afrique du Sud, Israël... Les tragédies des 13 et 15 mai emportent finalement la traditionnelle peur de l'Autorité qui réagit vivement. Ces journées sont marquées par des affrontements entre les Forces républicaines de sécurité armées, les tristement célèbres FRS, et les étudiants.

Ces derniers, munis de simples pancartes, descendent à Analakely, pour réclamer la libération de leurs camarades arrêtés et envoyés en « exil ». La répression est rendue plus dure par des inepties de tout ordre sur les médias publiques. Tout cela attise la colère des adultes, en particulier les parents dont les enfants sont tués, blessés, ou déportés, et des simples badauds, jeunes gens au chômage qui vivent d'expédients.

L'énorme incendie de l'Hôtel de Ville d'Antananarivo, provoqué par les flammèches des conférences de presse officielles, met bas l'ancien régime. Sollicité par les manifestants, le 18 mai, le général de division Gabriel Ramanantsoa reçoit des mains du Président, les pleins pouvoirs. Les militaires ont, depuis longtemps, la confiance des grévistes et c'est sous les ovations d'une foule délirante, qu'il descend jusqu'à la désormais Place du Treize-Mai. Là, il calme les ardeurs de la masse humaine qui l'entoure et qui exige la démission du chef de l'État.

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