Togo: Panafricanisme, mythe et identité

Grâce aux réseaux sociaux, les Africains, de plus en plus, se désinhibent de leurs complexes d'aliénation vis-à-vis de l'Occident.

L'histoire officielle est souvent la version controuvée du vainqueur. Mais à travers les réseaux sociaux, la voix de l'Occident, jadis unique, en tant qu'expression de sa pensée, de son idéologie suprémaciste et conquérante, est aujourd'hui énergiquement contrebalancée par la voix forte des opprimés africains.

Cette voix africaine qui doit être aussi une voie vers le futur, s'exprime dans l'espace public à travers trois concepts que sont le panafricanisme, le mythe d'un passé glorieux (donc d'un présent fait d'échecs) et l'identité.

Le mythe présente la société telle qu'on voudrait qu'elle soit. C'est une conception de l'esprit en total divorce avec la société réelle et le présent. Au niveau d'un projet de libération et de développement, c'est comme si les tenants du mythe proposaient de poser les fondations d'un immeuble sur du sable. Il s'écroulera infailliblement.

Des gens qui n'ont jamais fait d'égyptologie, ramènent tout et n'importe quoi à l'Égypte antique dans l'anachronisme le plus total, manifestant de la sorte une ignorance crasse qui débouche souvent sur un infantilisme débile. Le bon sens requiert que l'on étudie d'abord ce dont on veut parler avec compétence et crédibilité. Parler aux peuples africains dans une situation de domination, exige qu'on lui dise la vérité pour réfuter les mensonges des régimes fantoches d'oppression et de l'impérialisme, qu'on lui propose de vrais projets politiques et économiques émancipateurs.

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On ne combat pas le mensonge par le mensonge. Beaucoup de soidisant "influenceurs", de véritables maquignons, s'inscrivent dans ce créneau de la manipulation. En croyant défendre l'Afrique par le mensonge, ils l'enfoncent au contraire en disqualifiant le discours panafricaniste par un côté farfelu propre aux médiocres, aux cancres et aux affabulateurs. La tâche qui incombe à tous les Africains qui se situent sur le front de la libération, est si vaste qu'elle n'a pas besoin de mensonges. Le projet politique ne peut faire l'économie de l'identité.

Le projet politique adossé à une vision ne se fera pas par le mythe mais par l'étude de nos sociétés multiethniques, de nos cultures et de nos langues. C'est en les réhabilitant que l'on extraira nos identités ethniques de la gangue asphyxiante des préjugés et de l'aliénation. Deux écueils menacent présentement le panafricanisme : son image passéiste auprès des jeunes et des anciennes générations, d'une part, et le populisme brouillon et opportuniste, d'autre part. Consacrer l'essentiel de son énergie à combattre les impérialistes en oubliant ses suppôts au pouvoir, c'est une façon de conforter l'idée selon laquelle tous nos malheurs viendraient de l'extérieur. Cette vision erronée fait l'affaire des régimes fantoches. Tant que l'ennemi n'est perçu qu'au dehors, ils sont tranquilles. Les sectes religieuses qui prolifèrent jouent exactement ce rôle en culpabilisant les croyants par rapport à leurs malheurs.

Au lieu de leur désigner les vrais responsables politiques de leurs malheurs, ils sont sommés de s'agenouiller et de prier afin de quémander le pardon divin des péchés qui ont généré leur misère !!!

En demeurant pauvre, l'Afrique verra ses cultures et langues s'appauvrir dans la dépendance extérieure qui lui imposera d'autres modèles culturels et les langues de domination actuelles.

Combien sont-elles les élites africaines qui connaissent suffisamment bien leurs cultures et leurs langues, faute de les avoir apprises à l'école ? Il s'agit là d'un immense chantier qui ne doit pas être pris à la légère. Avis aux autodidactes. C'est dire que les faux panafricanistes doivent laisser un peu l'Occident pour exiger des dirigeants africains fantoches et aliénés, la cessation de l'enseignement colonial qui a enterré nos langues et nos cultures. Elles doivent avoir une place essentielle dans l'éducation nationale en tant que facteurs de culture et de développement.

Le panafricanisme ne saurait être un show, une diversion à la mode qui va se dégonfler comme une baudruche du jour au lendemain, mais un projet libérateur de développement scientifique, technologique et intellectuel porteur d'espérance. Les élites intellectuelles doivent aider à déchirer l'immense voile de résignation et de désespoir qui incite une partie non négligeable de notre jeunesse à choisir le suicide dans le désert du Sahara et dans la Méditerranée en quête d'un Eldorado improbable en Europe.

Le panafricanisme qui est une expression idéologique pour combattre la descente aux enfers du continent par la libération, doit réfléchir à la transformation de nos pays en pays développés et industrialisés en une génération comme l'ont fait la Corée du Sud et Singapour. Le pire ennemi du panafricanisme est cet ersatz de panafricanisme caviar, une étiquette aguicheuse que des traîtres politiques ont exhibé au pouvoir et autour du pouvoir pour abuser les masses africaines depuis les indépendances truquées de 1960. Ces panafricanistes voyous, sans programme, ont fait prospérer le néocolonialisme, la dictature, la françafrique et les réseaux mafieux. Ils sont les amis des ennemis de l'Afrique. Ils ont gravement terni l'image du panafricanisme.

Il n'y a pas de complexes à avoir : le développement n'est qu'un modèle d'organisation de la société. Là où des humains l'ont réalisé, d'autres humains le réaliseront. Un préalable : montrer la porte de sortie à tous les régimes liberticides ennemis de l'émancipation des peuples africains.

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