Madagascar: Ambohidrainahandriana, le village anoblissant les Zanadray

Les Andriamasoandro ont très bien compris la nécessité d'aménager leur nouvelle terre et jouent sur deux plans: les alliances matrimoniales avec les Foko voisins qui leur permettent de respecter l'endogamie puisqu'ils sont tous de caste noble et plus ou moins liés entre eux, et les conquêtes militaires.

C'est ainsi qu'ils peuvent assurer le contrôle sur les territoires de plusieurs clans et finissent par constituer un véritable petit État. Dans les dernières années du XVIIIe siècle, l'abondance de la main-d'oeuvre servile et la situation de paix relative favorisent la réalisation d'aménagements considérables sur les marais. Le descendant d'Andriamasoandro-Be d'Ambatolevy installe un système d'adduction d'eau à partir de la source d'Andohamiry à Angondontany (Emmanuel Fauroux, ORSTOM Le Royaume d'Ambohidranandriana, archéologie et traditions orales).

C'est pourquoi on l'appelle Andriamanimahamiry. Cela nécessite notamment de déplacer un grand rocher et de creuser un canal qui aboutit jusqu'à Ambodimiry, en passant par le village d'Ambohidranandriana. D'après Emmanuel Fauroux, l'État des Andriamasoandro est limité par la plaine marécageuse située au sud de Tongarivo et, au nord, par la plaine d'Ambohimanarivo alors connue sous le nom de Bekàka. A l'Ouest, les frontières du territoire ne dépassent pas les crêtes qui surplombent la vallée de la Manandona. Et à l'Est, un massif montagneux le borde, qui sert de lieu de parcours du bétail. L'auteur cite également le Tantara nataon-dRainianjanoro qui précise que cinq cents chefs de familles de contribuables et un nombre très élevé d'esclaves et de dépendants forment l'État des Andriamasoandro.

%

C'est donc Andriamanimahamiry qui jette les bases définitives du village d'Ambohidranandriana. La dénomination originale du site donnée par le R.P. Callet (Tantara ny Andriana eto Madagascar) en explique la véritable raison d'être. Ambohidrainahandriana signifie littéralement le village (ou la colline) du père (ou de l'ancêtre) qui avait fait que les Zanadray (les fils du père) soient nobles. Un hommage au fondateur du Foko, Andriamasoandro-Be, et à l'ancêtre, le roi Ralambo. En tant que capitale d'un roitelet, Ambohidranandriana est un site fortifié, entouré de deux fossés dont on retrouve encore les traces au début du XXIe siècle.

Le premier, proche du village, a une circonférence d'environ 700-800 m et, par endroits, atteint 30 m de profondeur. C'est dans ce fossé très profond que sont parqués les boeufs pour les protéger des assaillants, puis, plus tard, des Menalamba. Une porte étroite en pierre avec un poste de guet au-dessus, permet à l'est d'entrer dans le village. Il n'en reste plus, à la même époque, que les deux montants latéraux car le disque de pierre qui en ferme l'accès et les grandes dalles qui la couvrent, servent à construire la route de Soanirariny sous la colonisation.

À quelques pas de la porte d'entrée, à l'intérieur du village, se trouve la tombe de Ramboavahiny, le devin-sorcier protecteur du village. Jusqu'à maintenant la foi en sa force surnaturelle n'est pas encore atténuée. Ses restes ne peuvent être exposés au soleil, c'est pourquoi ses exhumations se font toujours au petit matin, vers 3-4 heures.

C'est le seul tombeau du village, hormis celui d'Andriamanimahamiry. D'autres sépultures individuelles, invisibles aujourd'hui, se trouvent entre les deux fossés et renferment les corps des «serviteurs de case». L'autre portail se trouve à l'ouest. Son existence est pratiquement inconnue des étrangers puisqu'il sert surtout d'issue de secours en cas d'attaque et permet de s'enfuir vers les grandes rizières en aval.

Deux pierres levées, restes de celles qui bornent le village, s'y trouvent encore. On y découvre également, au milieu de la végétation, l'unique pied de «Vavoraka» de la contrée qui sert à se préserver du mauvais sort et des actes de sorcellerie. Les cases des villageois sont nettement localisées: les Andriamasoandro résident au nord et à l'est, et les sarotro admis à résider dans le village, demeurent de l'autre côté.

Les deux quartiers sont nettement séparés au centre par plusieurs sites, dont l'un marque la puissance du Foko Andriamasoandro. Mais aujourd'hui, la plupart des habitants émigrent à l'extérieur de l'enceinte, voire plus loin vers d'autres villes. Pour certains, il y a aussi un souci d'endogamie dont les conséquences, après plusieurs générations, peuvent être risquées pour la descendance...

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.