Congo-Kinshasa: La militante congolaise Julienne Lusenge lauréate du prix ONU pour les droits de l'homme 2023

L'Assemblée générale des Nations unies a décerné ce 20 juillet le Prix des droits de l'homme des Nations Unies 2023 à six lauréats, dont la Congolaise : Julienne Lusenge. La présidente de l'association Solidarités des femmes pour la paix et le développement intégral (Sofepadi), militante des droits de l'homme, est une figure bien connue en RDC.

Julienne Lusenge a été reconnue pour sa contribution constante aux droits des femmes et son combat contre les violences sexuelles. « Ce prix me réconforte. Avec les Nations unies, c'est toute la planète qui reconnait mon travail », avoue-t-elle à RFI, très émue.

Des prix, elle en a déjà reçu plusieurs au cours de ces quatre décennies d'engagement. Elle est lauréate en 2021 du prix Aurora 2021, qui met à l'honneur des « héros des temps modernes », et du prix de la femme de courage décerné par le Département d'État des États-Unis.

Mais celui-ci, remis par l'ONU, a une saveur particulière pour Julienne Lusenge : « Ça m'encourage davantage quand on voit les personnalités qui ont auparavant reçu ce prix. »

D'anciens lauréats tels que Nelson Mandela ou Jimmy Carter

Parmi les précédents lauréats figurent Jimmy Carter, Nelson Mandela, le Dr Denis Mukwege, Eleanor Roosevelt, Malala Yusafzai ou encore le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). « Je me dis au moins que ma lutte a été portée à ce niveau-là, ajoute-t-elle. Je me dis que je peux porter la voix des autres femmes et continuer à défendre et à parler, dénoncer toutes sortes de violations des droits humains et surtout des droits des femmes et des enfants partout où cela se passe ».

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Si elle vit aujourd'hui à Kinshasa, Julienne Lusenge est originaire de l'Est du pays, région la plus touchée par les violences en RDC. C'est là qu'elle a commencé son combat, sidérée par ce qu'elle a constaté elle-même dès son plus jeune âge. Elle qui a connu la guerre, mais qui a eu de la chance, dit-elle, de pouvoir faire des études : « Mon père m'a instruit, m'a éduquée. Il m'a donnée la capacité de défendre mes idées et mes opinions, c'est ce que je fais. »

« C'est la justice qui élève une nation »

Et c'est avec toute son énergie que Julienne Lusenge continue son plaidoyer : « Chaque fois que j'ai la possibilité de parler, je dois parler et donc je ne tolère pas l'injustice et je ne tolère pas la discrimination. J'ai écouté des femmes, j'ai vécu avec des victimes, j'ai vu des gens être tués et c'est dans tout cela que je puise ma révolte. Et quand, parfois, je suis découragée et que je me dis "J'abandonne", je vois alors une injustice, ça me révolte et je repars au combat. »

Son combat, dernièrement, il est aussi pour alerter la communauté internationale : « Il faut voir les mains noires qui instrumentalisent les groupes armés en RDC. On ne peut pas regarder juste les combattants qui sont là, il faut voir quelles sont les compagnies qui sont derrière. Qui achète nos minerais ? Tout le monde le sait que ce sont le Rwanda, mais aussi l'Ouganda qui profitent de ces troubles à l'est de la RDC. Ils se développent sur notre souffrance. Il faut que la sanction tombe pour ces pays et pour toutes les compagnies occidentales qui utilisent ces minerais volés. »

Son association, Sofepadi, fait du plaidoyer pour notamment dénoncer le viol comme « arme de guerre ». Elle fait aussi du soutien médical, de l'accompagnement scolaire, de la sensibilisation des populations en Ituri et au Nord-Kivu principalement. Elle est aussi présidente du Fonds pour les femmes congolaises. Mais Julienne Lusenge ajoute que la question des violences sexuelles, ce n'est pas seulement soigner la femme, ça affecte toute la communauté, toute la famille. Et que finalement pour y mettre un terme, « il faut une justice qui fonctionne » et la fin de l'impunité. « C'est la justice qui élève une nation et la paix se nourrit de la justice », conclut Julienne Lusenge.

La cérémonie de remise du Prix 2023 aura lieu au siège des Nations Unies à New York en décembre 2023, dans le cadre des activités de commémoration de la Journée des droits de l'homme.

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