Madagascar: Une nouvelle colonie française est née dans le Nord

Septembre 1886. Deux officiers merina, Ramaka et Ratovelo, arrivent à Ambohimarina. Ils deviendront, par la suite, « légendaires par leurs comportements belliqueux et cruels», précise Cassam Aly Ndandahizara, inspecteur principal des Impôts, dans son étude sur « Ambalavelona ou l'insurrection anticoloniale dans le Nord-Ouest de Madagascar en 1898 » (lire précédentes Notes). Le Premier ministre Rainilaiarivony les fait accompagner par son fils Rainizanamanga, avec pour instruction de respecter les termes du traité du 17 décembre 1885 qui stipule, notamment, que « la reine s'engage expressément à traiter avec bienveillance les Sakalava et les Antankarana ».

À leur arrivée, les deux officiers constatent qu' Ambohimarina se vide de ses habitants et, tous les jours, on leur signale des fuites et des désertions vers Diego-Suarez, la ville naissante. Aussi, tentent-ils la politique du charme auprès des Antankarana, avec la promesse d'abolir les pratiques malfaisantes utilisées pendant plus de cinquante ans d'occupation. Ratovelo, gouverneur d'Ambohimarina, adresse, le 10 juillet 1892, à Tsialana II, par l'intermédiaire de Bakary, un proche du roi, une lettre rédigée en ces termes: « Soignez bien le prince pour qu'il suive sa mère (Ranavalona III), comme ont fait Binao et Tsiaraso ; vous voyez bien que ceux-là ont obéi aux lois de la reine que le gouverneur, les officiers et les chefs leur communiquent.

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Le pavillon de leur mère est entre leurs mains et est hissé dans leurs villages respectifs. Dites au prince de suivre sa mère comme les autres. » En application du traité du 17 décembre 1885, les Français prennent donc possession de l'immense baie d'Antomboko tant convoitée, contre le reste de Madagascar. Elle a un pourtour de 110 kilomètres du Cap Miné à Nosy Kombero.

La nouvelle colonie est baptisée «Établissements français de Diego-Suarez», et placée sous la direction du capitaine de frégate Caillet « qui se trouve être le fondateur de la ville de Diego-Suarez ». Les premières casernes sont érigées au Cap Diego où sont logées la direction d'artillerie et la compagnie des disciplinaires des Colonies.

En face, sont placés les services administratifs, l'infanterie et l'artillerie de Marine. Les premiers habitants de la nouvelle ville sont composés de Créoles de La Réunion, de Mauriciens venant soit directement de cette île, soit de Toamasina et de Mahajanga, et des originaires des iles Sainte-Marie, Nosy Be et Mayotte, déjà possessions françaises à l'époque. On y trouve également de nombreux Makoa fuyant leurs propriétaires, des Antankarana et des Sakalava.

En 1886, la colonie compte déjà 2 500 habitants. Un gouverneur civil, Froger, remplace le capitaine Caillet en 1887. Il est secondé par le commandant d'artillerie de marine Rocard et du lieutenant-colonel d'infanterie de marine Juville. À partir de 1888, débute la réorganisation des colonies françaises à Madagascar. Un décret, en date du 4 mai 1888, rattache les iles de Nosy Be et de Sainte-Marie aux Établissements français de Diego-Suarez.

Cette décision est suivie par la prise de possession des iles Nosy Faly et Nosy Mitsio, « en vertu de la cession faite par le roi des Antankarana, Tsimiaro, en 1841 ». La cérémonie se déroule respectivement sur les lieux, à Nosy Faly, le 19 avril 1889, et à Nosy Mitsio, le 22 avril 1889. Elle est présidée par Froger, gouverneur civil de Diego-Suarez, en présence du roi des Antankarana, Tsialana II, du prince résident à Nosy Faly, Ndrivotso, et du commandant de Nosy Be, Joseph François.

Pendant que les conflits entre Ambohimarina et Diego-Suarez s'aggravent, plus particulièrement en raison des limites de la zone d'Antomboko, mal définie par le traité de 1885, Tsialana II, partant de Nosy Mitsio, attaque et vainc les troupes merina sur la Grande Terre, malgré le renfort des mille soldats envoyés d'Iharana, de Toamasina et d'Ambatondrazaka, sous la conduite du prince Ramahatra et du général Ravoninahitriniony.

La victoire la plus éclatante obtenue par les Antankarana se situe, pour la deuxième fois, sur la plaine d'Andriparipa. Le reste de la troupe de Ratovelo se retire à Sadjoavato. Pour se venger, Ratovelo attaque les Antankarana du village de Betamboho, sur la rive gauche de la Mahavavy, en face d'Ambodibonara, lesquels se sauvent dans les iles de Nosy Faly, Nosy Be et Nosy Mitsio. Comme butins, Ratovelo razzie plus de quinze mille boeufs, incendie des villages sur son passage et détruit les cultures.

Toutefois, les soldats antankarana dirigés par Miarana, Mamba, Andriamialy, Zara Kila et Djaokely, lui barrent le chemin à Andrafiabe, au nord d'Ambatoaranana. C'est la dernière incursion de Ratovelo dans cette région antankarana. Et encore, lors de ces attaques contre ce gouverneur merina d'Ambohimarina, réapparaissent les noms des personnages antankarana de l'insurrection de Sambirano. De plus en plus, les forces des troupes merina s'affaiblissent, au bénéfice des forces françaises de Diego-Suarez.

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