Afrique de l'Est: Dialogue au Kenya - Le peuple espère un accord pour sortir le pays de l'impasse politique

La population et les partenaires du pays attendent impatiemment les conclusions des pourparlers entamés la semaine dernière entre l'opposition et le gouvernement suite aux appels qui se sont multipliés sur place et dans la communauté internationale, demandant aux deux parties de trouver un compromis aux brouilles qui les opposent. Des discussions qui visent à sortir de l'impasse politique qui obscurcit l'horizon économique du Kenya, un Etat d'Afrique de l'Est secoué depuis mars par plusieurs manifestations meurtrières contre la hausse du coût de la vie.

Un an après son élection à la présidence du Kenya, William Ruto fait face à un mécontentement croissant, accusé de renier ses promesses de campagne promettant d'aider les plus défavorisés. L'opposition l'accuse notamment d'aggraver les difficultés des Kényans qui combattent une inflation persistante - redescendue à +7,3% sur un an en juillet dernier.

Après avoir supprimé des subventions sur les carburants et les produits alimentaires, l'actuel chef de l'Etat a promulgué, fin juin, une loi de finances pour 2023-2024, qui augmente certaines taxes - comme un doublement de la TVA sur les carburants. Il en a créé d'autres, dont un impopulaire prélèvement de 1,5% sur les salaires pour financer un programme de logement à bas prix.

Outre les accusations portées contre le régime, les partisans du chef de l'opposition, Raila Odinga, battu pour la cinquième fois l'année dernière dans sa quête de la magistrature suprême, demandent aussi un audit des résultats de la présidentielle, la plus serrée de l'histoire du Kenya (50,49% contre 48,85%).

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Même si aucun calendrier n'a été fixé pour les discussions en cours, dont le contenu même est source de différends, tout le monde souhaite qu'elles débouchent sur des résultats satisfaisants pour permettre au pays de renouer avec la paix. Cela s'avère nécessaire pour arrêter les manifestations d'Azimio, la coalition d'opposition que dirige Raila Ondinga. Celles-ci se sont déjà soldées par la mort d'au moins 20 personnes, selon les autorités. Un chiffre largement sous-estimé par les organisations de défense des droits de l'homme et l'opposition, qui affirment qu'au moins une cinquantaine de personnes ont été tuées par une brutale répression policière.

En dépit des revendications suscitées, le président William Ruto n'a cessé de marteler que « la politique menée par son gouvernement est nécessaire pour rendre des marges de manoeuvre au pays », confronté à d'importants défis économiques. Il s'agit, entre autres, de l'inflation qui le frappe depuis des mois et à laquelle s'ajoute une dette publique de 65 milliards d'euros, soit environ 67% du PIB, dont le remboursement devient de plus en plus coûteux avec la dépréciation continue du shilling, la monnaie locale.

Les divergences persistent sur la situation économique du pays

« La faiblesse de la monnaie a un impact négatif sur la dette publique et je pense qu'elle va encore se déprécier », souligne Churchill Ogutu, économiste pour la société d'investissement IC Group. Du fait de cette situation, la croissance du Kenya, locomotive économique de l'Afrique de l'Est a plafonné à 4,8% en 2022, bien loin des 7,6% atteints en 2021.

Eugene Wamalwa, membre de la délégation de l'opposition se dit optimiste sur l'issue des négociations. « Nous attendions ce jour avec impatience et espérons vivement que ces pourparlers débloqueront l'impasse », a-t-il déclaré, ajoutant que le Kenya « mérite la paix et non la paralysie », et va débattre de la hausse du coût de la vie ainsi que de réformes électorales. « Nous voulons que tous les Kényans comprennent que s'engager dans un dialogue honnête n'équivaut pas à une reddition ou à de la lâcheté », a relevé Azimio dans un communiqué.

Raila Odinga s'est dit, quant à lui, prêt à redescendre dans la rue si les demandes de l'opposition n'étaient pas satisfaites. « S'il n'y a pas d'accord après 30 jours, les Kényans adopteront une ligne de conduite différente », a-t-il prévenu. Agé de 78 ans, ce vétéran de l'opposition, a également balayé les rumeurs affirmant qu'il cherche un accord de partage du pouvoir, hypothèse catégoriquement exclue par le gouvernement.

Du côté de la délégation gouvernementale, le chef de la majorité présidentielle à l'Assemblée nationale, Kimani Ichung'wah, a exclu toute discussion sur la situation économique. « Nous les écouterons sur tout sauf sur le coût de la vie. Le président y travaille déjà », a-t-il laissé entendre.

Une précédente tentative de dialogue en mai-juin avait échoué, entraînant une reprise des manifestations début juillet. Les présentes discussions se tiennent grâce à la « facilitation » de l'ancien président nigérian, Olusegun Obasanjo ; Azimio et le gouvernement avaient convenu de former un comité de dix membres, avec une représentation égale.

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