Gabon: Seul contre tous

analyse

En pleine campagne électorale pour la présidentielle du 26 août prochain, l'opposition gabonaise a créé une grosse surprise, en désignant un candidat consensuel, l'agrégé en économie de 69 ans, Albert Ondo Ossa. La nouvelle est tombée, vendredi dernier, alors que personne ne croyait encore à l'unité promise par les candidats de l'opposition, qui avançaient en rang dispersé.

Les adversaires à Ali Bongo, qui rêvent de l'envoyer sur une chaise longue, ont montré une fois de plus qu'ils étaient capables de se mettre ensemble pour mener le combat. Comme ils l'avaient fait en 2016, autour de Jean Ping, les opposants au président-candidat font bloc. Ils n'avaient pas pu prendre le dessus sur Ali Bongo en son temps, malgré la contestation du scrutin.

Il reste à savoir si cette fois-ci sera la bonne pour le cheval de la plateforme Alternance 2023. Va-t-il remporter la course et déjouer les pronostics, comme on le dit dans le jargon hippique ? C'est la grosse question. A priori, une candidature commune de l'opposition a l'avantage d'éviter que les voix ne soient dispersées au profit de l'adversaire.

L'union fait la force, dit-on. La mutualisation des forces est une bonne option pour l'opposition, mais encore faut-il savoir si la personnalité de son candidat fait véritablement le poids face à Ali Bongo.

De toute évidence, Albert Ondo Ossa est un expert des questions économiques, mais pas seulement. Il est aussi un homme politique averti. Il a servi sous feu Bongo père. Entre 2006 et 2008, il a été tour à tour, ministre de l'Education nationale et de l'Enseignement supérieur, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche et de la Recherche scientifique et du Développement technologique.

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En plus de connaitre les rouages de l'administration, le porte-étendard de l'opposition gabonaise avait tenté de briguer sans succès la magistrature suprême en 2009, à la suite de la mort de Bongo père. Ali Bongo avait écrasé la concurrence à l'époque. Albert Ondo Ossa pourra-t-il prendre sa revanche cette fois-ci sur le fils de son ancien patron ? Ce n'est pas évident, malgré ses atouts et les circonstances du moment.

Pour une partie des Gabonais, le président sortant n'est autre que l'incarnation de la monopolisation du pouvoir par le clan Bongo depuis des décennies. Il y a un certain raz-le-bol, de plus en plus perceptible dans les rues de Libreville et à l'intérieur du pays. Hormis cet aspect, ce n'est pas la grande forme pour Ali Bongo, qui se remet à son rythme du terrible accident vasculaire cérébral (AVC), dont il a été victime en 2018.

Cette maladie a physiquement diminué le chef de l'Etat gabonais, au point qu'il est devenu la risée d'une certaine opinion gabonaise et africaine. D'aucuns estiment, vu son état de santé, que Ali Bongo n'a plus la capacité de gérer le pouvoir, ce dont il s'est défendu, ces dernières semaines à la faveur de la campagne présidentielle. Le président gabonais est-il fini comme le disent ses détracteurs ? Malgré ses problèmes de motricité, constatés lors de ses apparitions publiques, Ali Bongo veut s'offrir un 3e mandat et en a visiblement les moyens.

Il tient l'appareil d'Etat, ce qui n'est pas négligeable, lui qui a été choisi pour pérenniser le système de son défunt père. Malgré les réticences du à son état de santé, Ali Bongo apparait comme le grand favori, son entourage ne jurant que par lui. Son principal challenger, Albert Ondo Ossa, n'est pas moins confiant, lui qui espère barrer la route au candidat-président.

Le dernier mot revient cependant au peuple gabonais, appelé à se prononcer dans les urnes, le samedi prochain. Le véritable inconnu à cette élection à un seul tour, couplée aux législatives, c'est l'acceptation des résultats. Les candidats de l'opposition appellent déjà leurs partisans à ne pas voter pour les législatives, une manière de contester l'instauration au dernier moment d'un bulletin unique. Ils y voient une manoeuvre visant à favoriser la réélection d'Ali Bongo et du Parti démocratique gabonais (PDG).

Le Gabon ayant une tradition de violences électorales, il y a de quoi craindre pour les jours à venir avec cette posture de l'opposition. Mais nous osons espérer que les Gabonais ont tiré un trait sur leur passé trouble.

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