Gabon: Le temps des incertitudes

Une rue de Libreville.

Le Gabon retient son souffle, dans l'attente des résultats des élections générales, du samedi 26 août dernier. Le gros enjeu, c'est la présidentielle, qui a opposé essentiellement le chef de l'Etat sortant, Ali Bongo, au candidat consensuel de l'opposition, l'économiste Albert Ondo Ossa.

Candidat à sa propre succession après 14 ans au pouvoir, le président gabonais va-t-il perdre le pouvoir au profit de son principal adversaire ? Les spéculations vont bon train sur le verdict des urnes, qui pourrait consacrer la continuité de la dynastie Bongo, le fils ayant succédé au père, ou l'alternance au sommet de l'Etat gabonais. Alors que les résultats de la présidentielle se font attendre, une certaine tension est déjà perceptible dans ce pays, qui a une tradition de violences électorales.

A peine a-t-il voté, que le candidat consensuel de l'opposition a exigé d'être proclamé vainqueur du scrutin, se basant sur de « nombreux » cas de fraudes constatés à travers le pays. « Je suis parfaitement informé des fraudes de Ali Bongo et de ses partisans. J'ai même des résultats qu'ils s'apprêtent à déclarer où je ne suis gagnant que dans deux provinces : le Woleu-Ntem et la Ngounié.

Ali Bongo a encore le temps de négocier. La seule négociation qui s'impose, c'est son départ. C'est le moment pour Ali Bongo de partir. J'en appelle à la communauté internationale », a lancé Albert Ondo Ossa. Ce ton menaçant, justifie-t-il, la prise d'un certain nombre de mesures par le gouvernement, après la fermeture des bureaux de vote ?

S'il ne fait pas explicitement de lien avec les propos du porte-étendard de l'opposition, l'exécutif gabonais a instauré un couvre-feu de 19 heures à 6 heures et procédé à la suspension d'Internet jusqu'à nouvel ordre. Aussi a-t-il institué l'obligation de demander une autorisation trois jours avant d'organiser toute réunion ou manifestation.

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Ces mesures sont motivées par la nécessité de « prévenir tout débordement et assurer la sécurité » des populations, mais elles ont de quoi surprendre. On se demande quelles sont les vraies intentions du pouvoir en place, surtout que des incidents majeurs de nature à troubler l'ordre public n'ont pas été enregistrés.

Les opérations de vote se sont déroulées relativement dans le calme. Dans les rangs de l'opposition, certains sont convaincus que les carottes sont cuites pour Ali Bongo, qui aurait été surclassé dans les urnes par le candidat consensuel de l'opposition. Des informations, du reste non vérifiées, circulent d'ailleurs à ce propos sur les réseaux sociaux.

La prudence doit être de mise en de pareilles circonstances. Le Centre gabonais des élections (CGE) est la seule structure habilitée à proclamer les résultats. Si pour le moment aucun chiffre officiel ne permet d'établir la victoire ou la défaite de tel ou tel candidat, on peut épiloguer sur l'attitude du camp Ali Bongo, qui n'a pas véritablement travaillé pour une élection transparente.

Le refus d'accepter des observateurs internationaux et d'accréditer des médias étrangers, considérés à la limite comme des parias, ne confère aucune transparence aux élections de samedi. Bien au contraire, cela dénote d'une volonté d'organiser des élections à huis clos. Dans quel intérêt ? Allons le savoir.

De toute évidence, cette situation jette le discrédit sur les élections et les résultats qui en découleront, si elle ne conforte pas l'opposition dans sa position que des fraudes ont été orchestrées à dessein, pour maintenir le président Bongo aux affaires.

Les graves dysfonctionnements, qui ont émaillé l'organisation des élections (ouverture tardive de bureaux de vote, absence de bulletins de vote en faveur du candidat Albert Ondo Ossa...), pourraient d'ailleurs nourrir cette thèse. Spéculation n'est cependant pas raison.

Il faut faire confiance au CGE, qui on l'espère, donnera les résultats des élections conformément aux réalités des urnes. Le pays de Léon Mba étant coutumier des violences électorales, la proclamation des résultats peut dégénérer.

Certains Gabonais veulent coute que coute tourner la page de la famille Bongo, qui totalise plus de 50 ans de règne et sont prêts à tout pour cela. Il ne faut pas se voiler la face : le Gabon traverse une période de fragilité...

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