Afrique: L'Afrique pâtit du changement climatique de manière disproportionnée, selon un nouveau rapport

5 Septembre 2023
tribune

L'Afrique n'est responsable que d'une fraction des émissions mondiales de gaz à effet de serre, mais elle pâtit de manière disproportionnée du changement climatique, selon un nouveau rapport de l'Organisation météorologique mondiale (OMM).

Les estimations officielles montrent qu'au cours de la période 1991-2022, l'Afrique a enregistré un taux moyen de réchauffement de +0,3 °C/décennie, contre +0,2 °C/décennie entre 1961 et 1990. Ce chiffre dépasse légèrement la moyenne mondiale.

D'après les estimations des experts publiées en marge du  Sommet Africain sur le Climat (SAC) qui se tient  à Nairobi du 4 au 6 Septembre courant, cette situation nuit à la sécurité alimentaire, aux écosystèmes et à l'économie. Elle alimente les déplacements et les migrations et aggrave la menace de conflits provoqués par la raréfaction des ressources.

Le rapport sur l'État du climat en Afrique 2022 montre notamment que le rythme de la hausse des températures en Afrique s'est accéléré au cours des dernières décennies et que les risques liés au temps et au climat sont de plus en plus accrus.

En revanche, selon les experts, le financement de l'adaptation au changement climatique ne représente qu'une goutte d'eau dans l'océan de ce dont a besoin le continent.

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En 2022, les aléas météorologiques, climatiques et hydrologiques ont touché directement plus de 110 millions de personnes sur le continent et provoqué des dommages économiques chiffrés à plus de 8,5 milliards de dollars US. La base de données sur les situations d'urgence fait état de 5 000 décès signalés, 48 % par suite de la sécheresse et 43 % d'inondations.

Sécheresses persistantes

Toutefois, le nombre réel de victimes est probablement beaucoup plus élevé en raison du phénomène de sous-déclaration.

«L'Afrique est responsable de moins de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Or c'est le continent qui est le moins à même de faire face aux effets délétères du changement climatique. Les canicules, les fortes pluies, les inondations, les cyclones tropicaux et les sécheresses persistantes ont des effets dévastateurs sur les communautés et les économies, et le nombre de personnes menacées va croissant», a déclaré Petteri Taalas, Secrétaire général de l'OMM,

«Les observations météorologiques sont très lacunaires en Afrique et les services d'alerte précoce sont terriblement insuffisants. Nous sommes bien déterminés à combler ces lacunes et à faire en sorte que tout le monde puisse recevoir des alertes précoces salvatrices», a-t-il fait remarquer..

Le rapport, produit conjointement avec la Commission de l'Union africaine et le Centre africain pour la politique en matière de climat relevant de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA), a été, par ailleurs, rendu publique à l'occasion duquel le plan d'action sur les alertes précoces pour tous en Afrique a également été lancé.

Selon l'ambassadeur Josefa Leonel Correia Sacko, Commissaire chargée de l'agriculture, du développement rural, de l'économie bleue et de l'environnement durable à la Commission de l'Union africaine, l'Afrique, à l'instar d'autres régions, s'est résolue à accepter la réalité, à savoir que le changement climatique est déjà à l'œuvre.

«Si l'on lui donne libre cours, les années et les décennies à venir seront facilement caractérisées par une pression climatique forte pesant sur la nature, les moyens de subsistance et les économies des pays du continent», a-t-elle déclaré.

Chute de la productivité agricole

Il a été prouvé qu'avec le degré élevé d'exposition de l'Afrique, sa fragilité et sa faible capacité d'adaptation, on peut s'attendre à ce qu'elle subisse de plein fouet les effets du changement climatique.

«La santé des populations, la paix, la prospérité, les infrastructures et les autres activités économiques dans de nombreux secteurs en Afrique courent des risques considérables en raison du changement climatique»,  souligne le rapport.

L'agriculture est à la base des moyens de subsistance et des économies nationales en Afrique; elle fait vivre plus de 55 % de la population active. Mais à cause du changement climatique, la croissance de sa productivité agricole a chuté de 34 % depuis 1961. Cette baisse est la plus élevée enregistrée par comparaison à ce qu'ont connu d'autres régions du monde.

Les projections prévoient que, d'ici 2025, les pays africains multiplieront par trois leurs importations annuelles de denrées alimentaires qui passeront de 35 milliards de dollars Us à 110 milliards de dollars Us.

Le niveau des pertes et des dommages, et donc les coûts encourus, seront en fonction de nombreux facteurs, notamment du niveau d'ambition des mesures d'atténuation sur le plan mondial et de la hauteur des investissements dans l'adaptation à l'échelle locale. Dans un monde où le réchauffement serait de 4 °C avec une adaptation régionale forte, l'Afrique pourrait encourir, chaque année d'ici à 2080, des coûts dus aux «dommages résiduels» équivalant à 3 % de son produit intérieur brut projeté.

Pression croissante sur les terres

Les coûts des pertes et dommages dus au changement climatique en Afrique sont estimés entre 290 et 440 milliards de dollars sur la période 2020-2030 d'après le Centre africain pour la politique en matière de climat de la Commission économique pour l'Afrique.

Selon le rapport, le changement climatique et la raréfaction des bases de ressources pourraient alimenter les conflits pour obtenir les rares terres productives, l'eau et les pâturages, là où la violence entre agriculteurs et éleveurs s'est intensifiée ces dix dernières années à cause de la pression croissante exercée sur les terres, avec, dans de nombreux pays d'Afrique subsaharienne, des îlots géographiques où se concentrent de telles zones.

Le rapport, assorti d'une présentation en images, est le fruit d'une collaboration entre plusieurs institutions.

Il comprend des contributions de la Commission de l'Union africaine et de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique, ainsi que des services météorologiques et hydrologiques nationaux africains, des centres climatologiques régionaux de l'OMM, des institutions spécialisées des Nations Unies, de la Banque africaine de développement, du Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale et de nombreux experts et scientifiques, indique-t-on.

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