Afrique: L'Afrique, une puissance émergente en énergies renouvelables - Vers une fiscalité verte ?

Le premier sommet sur le climat de l'Afrique, organisé du 4 au 8 septembre 2023 à Nairobi (Kenya), regroupant 54 États africains, s'est terminé sur la « Déclaration de Nairobi », visant à faire du continent africain une puissance émergente en matière d'énergies renouvelables moyennant une aide financière internationale. Si les États concernés s'engagent unis dans les enjeux mondiaux de la transition énergétique, l'absence de souveraineté industrielle et énergétique limite l'efficacité de ce projet. En cause :

La sous-exploitation du potentiel d'énergie verte

Avec une capacité de production d'énergies renouvelables de 56 Giga Watts (GW) en 2022, le continent africain pourra atteindre les 300 GW d'ici à 2030. Son modèle de sobriété énergétique est l'un des mieux équilibrés du monde. Il repose sur 1 622,5 GW dont 90,90% d'énergies renouvelables contre 9,10% d'énergies fossiles. Dans ce mix énergétique, la part des énergies propres équivaut à dix fois la production totale d'électricité carbonée actuelle de l'Afrique de 147,5 GW.

Or, l'Afrique qui abrite 60 % des meilleurs potentiels mondiaux en énergie solaire ne produit à peine que 5 GW d'énergie solaire photovoltaïque, avec des installations représentant seulement 1% du total des installations mondiales valant 3% des investissements mondiaux de la transition énergétique. Il en résulte un déficit de financement des infrastructures électriques, estimé à 45 Mds $ par an. Plus de la moitié de la population africaine, soit 600 millions d'habitants, n'ont pas accès à l'électricité et environ 80 % des entreprises d'Afrique subsaharienne subissent des coupures fréquentes, entraînant des pertes économiques substantielles.

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Au potentiel naturel qui génère directement des énergies propres (solaire, éolien, géothermie,..), s'ajoutent les 40% des réserves mondiales de cobalt, de manganèse et de platine, essentiels pour la fabrication des batteries et des piles à hydrogène que l'Afrique pourra transformer sur place pour assurer sa souveraineté industrielle et énergétique;

La forte dépendance financière vis-à-vis des donateurs

nouvelle architecture de financement du développement durable de l'Afrique, qui prend en compte la restructuration et l'allégement de la dette, se traduit par un nouveau pacte financier, estimé à 23 Mds $. Seuls les Émirats arabes unis se sont engagés à aider l'Afrique pour 4,5 Mds $. Les autres pays pollueurs du monde qui n'ont toujours pas honoré leur engagement de fournir, avant 2020, 100 Mds $ par an (COP16) au titre du Fonds vert pour le climat de l'Afrique, ne se sont pas prononcés. Le souhait des 54 États africains de voir doubler ces 100 Mds $ d'aide des pays riches pollueurs pour contrer les effets d'un réchauffement dont l'Afrique est victime mais pas responsable demeure un voeu pieux.

En effet, l'Afrique ne contribue qu'à 4% de la production des gaz à effet de serre responsables des aléas météorologiques, climatiques et hydrologiques qui ont touché directement, en 2022, plus de 110 millions de ses habitants et provoqué des dommages économiques évalués à plus de 8,5 Mds $. Sur 5 000 décès signalés sur ce continent, 48% le sont par suite de la sécheresse contre 43 % d'inondations et 9% pour d'autres causes liées au réchauffement climatique.

3)Vers une fiscalité verte : C'est à l'Afrique de financer le réchauffement climatique et le développement des énergies renouvelables par ses propres ressources issues de la fiscalité verte. L'idée du premier sommet d'Afrique de fixer une taxe carbone sur le transport des matières premières et sur la valeur de chaque tonne de matière première fossile exportée vers les pays riches pollueurs est une piste plus raisonnable que les crédits fantomatiques du Fonds vert pour le climat. La crédibilité de cette idée est justifiée par le Centre africain pour la politique en matière de climat de la Commission économique pour l'Afrique, qui estime les coûts des pertes et dommages dus au changement climatique en Afrique entre 290 et 440 Mds $ sur la période 2020-2030, alors que le financement de l'adaptation au climat nécessite des contributions de l'ordre de 2 800 Mds $ entre 2020 et 2030.

Ainsi, le potentiel énergétique de l'Afrique peut faire de ce continent une puissance émergente en matière d'énergies renouvelables. Sa sobriété énergique en fait un acteur privilégié du développement durable à l'échelle mondiale, à condition, toutefois, que l'Afrique assure sa souveraineté industrielle en s'équipant et en transformant localement ses matières premières, tout en assurant son autonomie financière par une fiscalité verte responsable.

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