Afrique: Les climatologues en alerte sur la fin de 2023

Des routes inondées et des métros à l'arrêt à New-York, des pluies diluviennes qui s'abattent sur la Grèce, et des températures anormales élevées en Espagne, au Portugal et même en France, en plein automne... Les climatologues mettent en garde que le réchauffement climatique de 1,5 °C pourrait être atteint d'ici la fin de 2023.

La semaine dernière, l'Organisation des Nations unies (ONU) a fait comprendre que la lutte contre le changement climatique «patine» car le financement de l'adaptation climatique des pays en développement a reculé de 15 % en 2021 sur un an. En sus de cela, en 2015, lors de la COP 21 de Paris, l'objectif ambitieux était de contenir le réchauffement climatique en dessous de 1,5 °C d'ici la fin du siècle. Cependant, les dernières données scientifiques laissent penser que cette situation pourrait se produire plus rapidement que prévu. Certains scientifiques estiment même que ce seuil critique pourrait être atteint dès la fin de cette année.

Fabrice David, ingénieur en environnement, met en lumière les conséquences graves que ce réchauffement aura sur les petits États insulaires comme Maurice. «L'Accord de Paris, adopté lors de la COP 21 en 2015, prévoyait de limiter le réchauffement planétaire en dessous de deux degrés avec un objectif fixé à 1,5 degrés par rapport au niveau préindustriel. Il s'agissait d'un objectif spécialement défini pour protéger en priorité les États insulaires, dont Maurice fait partie. Huit ans après, il semblerait que les émissions atmosphériques mondiales entraînent un réchauffement au-delà de 1,5 degrés d'ici quelque temps, et ceci aura des conséquences dramatiques pour les petits États insulaires.»

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Des records en série

C'est aussi le ressenti de Vassen Kauppaymuthoo. Selon lui, la terre n'a jamais autant connu de catastrophes climatiques aussi importantes que cette année. «Nous avons battu tous les records, et ce, malgré les voeux pieux formulés lors des négociations de la COP 21 qui ont fait l'objet de tellement d'attention et de publicité. En effet, derrière les beaux discours politiques se cache une vérité qui se perçoit à travers les actions : la croissance économique, même menacée, est comme une course que personne ne veut abandonner.» Selon Fabrice David, «le réchauffement des océans et la fonte accélérée des glaciers vont accentuer la montée du niveau de la mer, qui va grignoter encore plus férocement le littoral mauricien». En outre, la flore marine sera sévèrement impactée. «Une autre conséquence sera une acidification plus concentrée de l'océan, qui détruira encore plus nos coraux et entraînera alors la disparition de centaines d'espèces vivant dans l'espace corallien.»

Les inquiétudes exprimées sont également partagées par Vassen Kauppaymuthoo. Il souligne que Maurice se classe actuellement au 19e rang mondial en termes de densité de population, avec plus de 640 habitants par kilomètre carré en 2023. Cette densité de population élevée, combinée à la destruction de plus de 98 % des forêts endémiques et à la généralisation de la bétonisation des zones côtières, des flancs de montagne et des zones agricoles dans une tentative de copier des modèles économiques, tels que celui de Dubaï, fragilise davantage le pays face au changement climatique. Il met en garde contre les impacts potentiels du relèvement du niveau de la mer, qui devraient s'accélérer et menacer les zones côtières, ainsi que la capitale, Port-Louis. De plus, il évoque la possibilité de sécheresses exacerbées qui pourraient mettre en danger l'approvisionnement en eau, provoquant ainsi une déstabilisation sociale et économique, tout en affectant la faible sécurité alimentaire du pays, qui repose sur seulement 20 % de production locale.

Il ajoute que ces périodes de sécheresse pourraient être suivies de pluies torrentielles exceptionnelles, entraînant des risques de glissements de terrain sur les flancs de montagne, comme cela s'est déjà produit à Tamarin et Port-Louis. La saison cyclonique pourrait également apporter des super cyclones et le pays n'est plus suffisamment préparé à ces risques de plus en plus grands. Enfin, il évoque les canicules, qui pourraient entraîner des pertes en vies humaines en raison de l'effet «wet bulb», caractérisé par une humidité à 100 % associée à des températures excédant les 35 degrés. Face à ces défis, il souligne l'importance de penser aux générations futures.

Un autre impact considérable concerne l'agriculture locale. «Une hausse des températures aura une conséquence directe sur la quantité et la qualité de la production agricole mauricienne, ce qui présente une encore plus grande menace pour notre sécurité alimentaire. En résumé, avec le non-respect des engagements prévus lors de l'Accord de Paris, notre île paradis va basculer dans un enfer climatique», ajoute Fabrice David. Face à ce que l'avenir nous réserve, Vassen Kauppaymuthoo soutient: «Aujourd'hui, les données récoltées par les scientifiques annoncent des temps très difficiles où l'humain devra être mis en avant par rapport aux systèmes économiques qui s'effondreront les uns après les autres.» Toutefois, tant que la classe politique ou les économistes ne s'attarderont pas pour écouter les scientifiques, la situation ne fera qu'empirer, fait-il ressortir.

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