Sénégal: Mamadou Diallo, coach de l'équipe nationale de beach soccer - « On ne peut pas prétendre remporter le mondial sans jouer des matchs amicaux... »

29 Novembre 2023
interview

L'équipe nationale de Beach soccer du Sénégal participera à la 12e édition du Mondial « Emirats arabes unis 2024 », prévue du 15 au 25 février à Dubaï. Les « Lions » de la plage qui sont logés dans la poule C avec la Biélorussie, la Colombie et le Japon sont en regroupement depuis cinq mois. L'entraîneur principal, Mamadou Diallo, révèle cependant que l'équipe manque cruellement de compétitions. Une situation qu'il déplore car, estime-t-il, le Sénégal ne peut pas vouloir faire une bonne prestation au mondial sans jouer des matchs amicaux.

Le Sénégal prépare la Coupe du monde de Beach Soccer 2024 (15 au 25 février 2024 à Dubaï, aux Émirats arabes unis). Depuis quand êtes-vous en regroupement avec les « Lions » ?

Nous sommes en regroupement parce que nous devons jouer la Coupe du monde qui aura lieu au mois de février 2024 (du 15 au 25). Donc, après le tirage (le 6 octobre dernier), tout le monde sait que le Sénégal est dans le groupe C avec la Biélorussie, la Colombie et le Japon. Nous avons débuté les entraînements bien avant cela. En effet, le travail a commencé après notre dernier sacre à la Can de Beach Soccer, devant l'Égypte, le 28 octobre 2022. Les gens se demandent donc pourquoi nos stages durent aussi longtemps, mais il faut savoir qu'il y a une grande différence entre le Beach soccer et le football. Nous avons besoin d'intensité dans le jeu et devons nous préparer physiquement pour tenir tête aux autres équipes. Donc, la préparation se fait avec le même groupe depuis presque cinq mois. Ils sont au total 18 joueurs et d'ici l'approche du mondial, je vais publier la liste des 12 « Lions » retenus pour la grande compétition.

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Vous êtes en stage depuis cinq mois. Comment les joueurs parviennent à gérer cet isolement ?

Ce n'est pas du tout facile. Je suis avec mes jeunes joueurs depuis presque 5 mois. Ils sortent une fois dans la semaine pour aller passer quelques heures avec leurs familles. Certains même se sentent un peu frustrés parce que le regroupement dure trop longtemps. Ils s'enferment presque tout le temps et j'ai imposé certaines règles à respecter. À part les entraînements, les joueurs doivent juste manger et dormir. Donc ce n'est pas facile, mais c'est un choix à faire, ils ont décidé d'être de grands sportifs et il y a des sacrifices à faire pour cela.

Le plus dur dans tout cela, c'est que nous n'avons pas de matchs amicaux. On ne peut vouloir remporter la Coupe du monde sans pourtant autant jouer des matchs. Certaines personnes pensent que l'équipe du Sénégal peut aller jusqu'en finale lors de ce mondial. Au début, j'avais ce même discours mais vu la situation actuelle, je n'y crois plus. L'année où j'étais l'adjoint de Ngalla Sylla, l'équipe avait joué plus de 17 matchs amicaux et le résultat était satisfaisant puisque nous avions pu atteindre les demi-finales du mondial. Mais pour cette grande compétition de 2024, nous n'avons pas encore de match. On essaie de démarcher l'Iran, mais rien n'est encore confirmé, d'autant plus qu'une fois là-bas, nous ne pourrons jouer que trois matchs contre la même équipe.

Est-ce que, avec trois matchs, le Sénégal pourra rivaliser avec des équipes comme le Brésil, le Portugal entre autres ? Ces sélections en sont actuellement à leurs 13e ou 14e matchs amicaux. Certes, c'est bien d'être en regroupement, mais le plus important, c'est d'avoir des rencontres. Et nous n'avons pas assez de compétitions. Je vais par ailleurs bien préparer mes joueurs pour qu'ils puissent faire une prestation correcte au mondial. Nous allons faire notre possible pour passer au premier tour. Mais il faut savoir que les matchs amicaux sont très importants en Beach soccer.

Les « Lions » partagent la poule C avec le Japon, la Biélorussie et la Colombie. Pensez-vous qu'ils ont réellement des chances de sortir de ce groupe ?

Bien sûr que le Sénégal a des chances de sortir de cette poule. Certains pensent d'ailleurs que nous sommes dans une poule facile, mais ceux qui suivent bien le Beach Soccer ne diront pas cela. La Biélorussie fait partie des meilleures équipes d'Europe actuellement. Le Japon nous avait éliminés en demi-finale lors du dernier mondial et au moment où je vous parle, les Japonais enchaînent les matchs amicaux. La Colombie fait son baptême du feu et elle viendra pour jouer les trouble-fêtes afin de faire une bonne participation. Je suis donc conscient que rien ne sera facile dans cette poule. En plus, il n'y a plus de petites équipes. Ce qu'il faut faire, c'est de se battre pour sortir premier de notre groupe.

Vous travaillez actuellement avec 18 joueurs et bientôt vous devez publier une liste définitive de 12 « Lions ». Est-ce que le choix ne risque pas d'être difficile pour vous, sachant que l'équipe manque de compétition ?

J'ai un effectif et faire le choix ne sera pas facile. Ça allait être très aisé pour moi si j'avais la possibilité de tester mes joueurs grâce aux compétitions. Je ne cherche pas d'excuses, mais c'est la réalité. Je ne peux actuellement pas savoir à 100% ce que chacun vaut sur le terrain. Il y en a certains qui n'ont jamais joué une Can ou un mondial. Je ne pouvais les tester qu'en jouant des matchs amicaux. Certes il y a les anciens mais même pour ces derniers, je ne peux pas peser leur état de forme actuel. Car les entraînements sont très différents de la compétition.

Pourquoi l'équipe nationale du Sénégal ne parvient pas à jouer des matchs amicaux ? Où se situe le problème ?

Vous savez, je ne suis qu'un entraîneur et je dois rester à cette place. Seulement, je dois dire la vérité quoi qu'il advienne. Je ne vais pas attendre d'être éliminé pour dire réellement les raisons d'une mauvaise prestation au mondial. Il faut alerter. Les matchs amicaux se gèrent au niveau fédéral ; ce n'est pas à moi de faire les démarches. J'ai par ailleurs fait tout mon possible pour trouver des rencontres avec mes joueurs. J'avais contacté des entraîneurs qui, au début, m'avaient donné leur accord, mais il n'y a pas eu de suivi au niveau fédéral.

Je ne gère pas les billets d'avion et les lettres d'invitation... donc vous devez comprendre ma position. J'ai fait ce que je devais faire, mais ça ne s'est pas passé comme je le souhaitais. Mon souhait c'était de voir mes joueurs disputer 14 ou 15 matchs amicaux, mais bon... Il faut reconnaître qu'au début, on avait un bon planning parce qu'on devait aller aux Jeux de Bali. La compétition n'a pas finalement eu lieu, de même que les Jeux Mondiaux de la plage. Cela nous a vraiment handicapés puisqu'on pouvait jouer au moins dix matches avec ces deux grandes compétitions.

Maintenant, si le plan A ne marche pas, il faut trouver un plan B, car nous voulons faire de bons résultats en Coupe du Monde. Actuellement, je me concentre sur les entraînements; même si c'est très compliqué. Je prépare mon équipe sur le plan physique et intensif pour faire la différence au mondial. Je vais vous dire une chose, le Sénégal était classé quatrième sur le plan mondial mais aujourd'hui on est à la dixième position, parce qu'on ne joue pas de matches amicaux. Nous faisons actuellement partie des favoris de notre poule parce que nous avons fait une belle prestation lors du dernier mondial. Donc les matches amicaux sont très importants.

Donc, votre préparation va se limiter aux entraînements jusqu'au mondial ?

J'ai alerté à plusieurs reprises. De mon côté aussi, j'ai fait des démarches. Je connais beaucoup d'entraîneurs et j'ai pu discuter avec certains pour voir comment organiser des rencontres, mais à la fin il n'y a aucun retour. Ceux qui doivent gérer le reste, ne vous donnent aucune confirmation. A la fin, je préfère rester à ma place de coach pour ne pas perdre ma crédibilité devant les autres. En plus, c'est un peu trop tard parce que les équipes ont déjà calé leurs plannings. Le tournoi de Dakar était prévu ici, mais il n'y a que l'Iran qui avait donné son accord; toutes les autres équipes qu'on avait contactées avaient refusé.

Les « Lions » du Beach Soccer ont perdu leur titre de champions des Jeux Africains de plage devant le Maroc. Est-ce à dire que le Sénégal commence à perdre sa place de leader sur le plan africain ?

Lors des Jeux africains 2023, nous avons perdu en finale contre le Maroc. C'était prévisible parce qu'on était resté huit mois sans jouer de matches après la Coupe d'Afrique. Au même moment, le Maroc avait à son compte dix matches avant de venir dans cette compétition. Après, on était parti à un tournoi en Russie où on a terminé troisième. Nous avons perdu devant la Russie (6-4), l'Iran (5-1) et nous avons gagné notre dernier match. Mais avant ces tournois internationaux, nous sommes restés deux ans sans jouer le moindre match. Il faut savoir qu'en sport, il y a des réalités.

On ne peut pas rester des mois sans compétir et vouloir garder sa place de leader. Au moment où les autres progressent, nous on reste là à attendre sagement. On est champion d'Afrique et le Maroc est troisième derrière l'Égypte, mais entre-temps, nous sommes restés huit mois dans notre coin alors qu'eux enchaînaient les tournois. Il faut savoir aussi que seul le travail paie et on risque de perdre notre place de leader en Afrique si cette situation continue. Certes nous avons une bonne équipe et de bons joueurs, mais cela ne suffit pas pour être au top. La compétition est la base et les autres équipes l'ont bien compris. D'ici peu de temps, les battre sera très difficile. Et c'est ça la vérité.

Vous avez besoin de quoi d'autres pour une bonne prestation au mondial ?

Je n'ai besoin que de matches amicaux. Nous sommes en regroupement, certes c'est bien mais il nous faut avancer. Les « Lions » sont huit fois champions d'Afrique et ce n'est pas rien. Au début du regroupement, nous étions à Toubab Dialaw, mais nous avons constaté que la plage de Diamalaye est beaucoup plus pratique que celle de Toubab Dialaw, qui est un peu petite. Il n'y avait pas assez de sable aussi. Ici au moins, l'hôtel où nous logeons est en face de la plage. On se réveille du coup très tôt pour faire des courses de longue distance. Nous avons tout ce dont on a besoin ici. Donc la seule chose qui manque, c'est les matches amicaux. Si on veut faire de bons résultats au mondial, il nous le faut. Ce n'est pas des excuses, mais c'est la réalité du Beach Soccer.

Donc quels sont vos objectifs lors de cette Coupe du Monde?

C'est d'aller le plus loin possible. Mon premier objectif est de sortir premier de ma poule, pour le reste, on va voir.

Vous êtes à la tête de l'équipe nationale de Beach Soccer depuis un an. Êtes-vous satisfait jusque-là de votre travail ?

J'ai fait deux ans comme adjoint du coach principal et depuis un an je gère l'équipe nationale. C'est ma première Coupe du monde en tant qu'entraineur de l'équipe nationale du Sénégal. J'ai fait une seule Can que j'ai d'ailleurs remportée. Pour le moment, je peux dire que je suis satisfait de mon travail parce que j'ai pu remporter des tournois avec l'équipe (tournoi Cosafa et la Can). Je ne dis pas que je suis trop satisfait, mais je fais de mon mieux. Je serais satisfait à 100% lorsque je gagnerai la Coupe du monde de Beach Soccer. Cela fait partie de mes propres objectifs en tant que coach de l'équipe nationale.

Je sais que cela ne va pas être facile, mais ce n'est pas impossible. J'ai toujours les anciens, à savoir Al Seyni Ndiaye, Raoul Mendy, Papa Diagne, Mammour Diagne, Babacar Fall, Mamadou Sylla, entre autres. Il faut comprendre qu'il y a aussi Amath Samb, un jeune joueur qui a déjà fait une Coupe du monde, de même que Madione Laye, Seydina Laye et Ousseynou Faye. J'ai pu renforcer l'équipe avec de jeunes joueurs, tout en sachant qu'en Beach Soccer, on a toujours besoin des joueurs qui ont de l'expérience. Par ailleurs, lors de cette Coupe du monde, il peut y avoir des surprises. Mais comme je le dis, les équipes qui ont plus de compétitions auront plus de chances de remporter le mondial.

Certes j'y vais pour remporter le mondial avec mes joueurs qui n'ont que ça en tête, mais la réalité est là aussi. Il faut qu'on soit véridique, une équipe qui n'a pas assez de compétitions aura du mal à rivaliser avec les autres. J'ai des guerriers avec moi et je compte par ailleurs sur eux pour créer la surprise.

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