Tunisie: RIO - Documentaire «Sulla Loro Pelle» - Des prisons déguisées pour migrants

19 Décembre 2023

Une mise en lumière de la dure réalité à l'intérieur de ces centres approuvés par l'Etat et l'Union européenne, conçus pour accueillir théoriquement 1.000 personnes. La réalité est épouvantable.

Dans une exploration audacieuse, le documentaire «Sulla Loro Pelle» (Sur leur peau) a pénétré dans la réalité des centres de permanence pour le rapatriement (CPR) italiens, exposant un univers bien éloigné de l'image d'accueil peinte par les autorités. Ce qui était censé être des refuges pour migrants « illégaux » s'est révélé être des centres de détention, des prisons où la réalité est plus sinistre que dans les geôles traditionnelles.

L'ombre du profit

Le film, projeté à l'occasion de la Journée mondiale des migrants, à l'initiative du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (Ftdes) et Avocats sans frontières (ASF), dénonce vigoureusement l'évolution des CPR, de centres gérés par l'Etat à des zones de non-droit entre les mains d'entreprises privées. La quête de rentabilité a graduellement éclipsé la mission dite d'accueil, transformant ces centres en entreprises lucratives.

Un communiqué de la société civile souligne la dégradation continue des conditions de vie des migrants détenus, résultat de la privatisation progressive de ces établissements.

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Avec neuf CPR en fonction en Italie, le documentaire met en lumière la dure réalité à l'intérieur de ces centres, conçus pour accueillir théoriquement 1.000 personnes. Les victimes de ces centres, approuvées par l'Etat et l'Union européenne, endurent des conditions épouvantables : «Cellules surpeuplées, insalubrité, absence d'activités récréatives, espaces exigus, mauvaises conditions d'hygiène, et le manque cruel d'information et de défense».

Au lieu de bénéficier du système de santé public, l'assistance sanitaire dans ces centres est confiée à des médecins rémunérés par les entreprises privées gestionnaires, qui empochent des millions d'euros. Le documentaire dénonce également l'utilisation abusive de psychotropes et de tranquillisants, créant un état de torpeur chez les détenus.

Le tragique sort des Tunisiens

Parmi les récits déchirants, celui de Wissem Ben Abdellatif, un jeune Tunisien de 26 ans originaire de Kébili, décédé après avoir été attaché pendant près de 100 heures dans le service psychiatrique de l'hôpital San Camillo à Rome, conséquence de son transfert depuis le CPR de Ponte Galeria. Ce triste épisode est évoqué dans le documentaire réalisé par les journalistes Marika Ikonomu, Alessandro Leone et Simone Manda et qui a remporté les Prix Morrione et Libera Giovani en 2022.

Face à cette réalité brutale, plusieurs organisations de la société civile, dont Avocats sans frontières et le Forum tunisien des droits économiques et sociaux, élèvent leurs voix. Dénonçant l'ombre qui plane sur le sort des Tunisiens en Italie, ces ONG demandent la reconnaissance de la liberté de circulation comme un droit fondamental, conformément à la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. Les organisations exigent également la remise en question du système de rétention administrative des personnes migrantes en Italie, soulignant que les Tunisiens en sont les principales victimes. Elles exhortent les autorités italiennes à respecter les procédures internationales et à garantir les droits des personnes en mouvement.Les autorités tunisiennes sont également interpellées par le communiqué, il leur est demandé de protéger leurs citoyens à l'étranger, et une quête de vérité et de justice est réclamée pour les migrants victimes de violences ou décédés dans les centres de rétention en Italie.

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