Afrique de l'Ouest: Reconnaissance par l'ONU du nouvel ambassadeur nigérien - Une précieuse victoire diplomatique pour le général Tiani

21 Décembre 2023

La nouvelle a fait sur la junte au pouvoir à Niamey, le même effet d'émerveillement d'un enfant ouvrant son cadeau de Noël. En effet, la Commission de vérification des pouvoirs de l'Assemblée générale des Nations unies reconnaît la légitimité du gouvernement issu du coup d'Etat du 26 juillet dernier, qui a renversé le président Mohamed Bazoum au Niger. Désormais, l'ambassadeur du Conseil national de sauvegarde de la patrie (CNSP) est persona grata à l'ONU. A ce titre, il pourra siéger valablement au sein des instances de l'Organisation basée à New York comme unique et légitime représentant de son pays. Le moins que l'on puisse dire, c'est que cette reconnaissance officielle des nouvelles autorités de Niamey par l'ONU, est une victoire diplomatique pour les tombeurs de Mohamed Bazoum, dont le représentant à la 78ème session de l'Assemblée générale de l'ONU, tenue en septembre dernier aux Etats-Unis, s'était vu refuser l'accès à la salle des travaux, faute d'accréditation. Une situation très mal vécue à l'époque par les nouveaux maîtres du Niger dont le courroux s'était dirigé contre le Secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, accusé de manigances nocives aux intérêts du Niger.

Avec cette reconnaissance du CNSP par l'ONU, la page Bazoum est en train d'être tournée

Mais avec la décision du 6 décembre dernier qui entérine la reconnaissance internationale des nouvelles autorités de Niamey, c'est un gros point diplomatique que marque le CNSP dirigé par le Général Abdourahame Tiani qui, chaque jour qui passe, s'installe un peu plus confortablement dans son fauteuil. Et ce, au grand dam du président déchu, Mohamed Bazoum, de plus en plus esseulé. Et dont la posture est, de plus en plus, inconfortable alors même qu'il a toujours refusé de démissionner, en raison de la reconnaissance internationale que la junte acquiert progressivement. Comment peut-il en être autrement quand pendant que la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et ses partenaires occidentaux étaient dans une logique d'isolement du Niger, les Etats-Unis d'Amérique adoptaient une position moins tranchée en continuant d'entretenir des relations avec la junte au pouvoir à Niamey ?

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Comment peut-il encore en être autrement quand la CEDEAO elle-même, dont le soutien n'a jamais fait défaut au président déchu, a fini par abandonner sa position va-t-en-guerre tendant à rétablir le natif de Diffa sur son trône pour admettre le coup d'Etat, quatre mois et demi après le putsch ? Et si cela ne vaut pas reconnaissance du régime de Niamey, cela y ressemble d'autant plus que dans la foulée, l'organisation régionale a désigné, à la faveur de son 64ème sommet tenu le 10 décembre dernier à Abuja, des médiateurs pour diriger les pourparlers avec les nouvelles autorités nigériennes.

C'est dire si avec cette reconnaissance du CNSP par l'ONU, la page Bazoum est en train d'être tournée. Et le président déchu peut d'autant plus se faire du mouron que la CEDEAO ne fait plus de son rétablissement au pouvoir, une condition sine qua non, même si elle continue à faire de sa libération une exigence. Ceci étant, la question qui se pose à présent, est de savoir ce que la junte nigérienne fera de cet important point diplomatique marqué avec cette reconnaissance internationale. Montrera-t-elle plus de dispositions à engager des discussions ouvertes avec la CEDEAO à l'effet de trouver un modus vivendi autour d'un calendrier clair de retour à l'ordre constitutionnel ? Ou bien continuera-t-elle à raidir la nuque en se sentant désormais légitimement fondée à imposer son propre agenda ? La question se justifie d'autant plus que l'urgence aujourd'hui, est de donner plus de lisibilité à la transition nigérienne à travers l'établissement d'un calendrier clair de sortie de la transition que la communauté internationale veut la plus courte possible.

Il est temps de donner une chance à la concertation

Et tout porte à croire qu'en lâchant du lest, la communauté internationale n'attend pas moins la même attitude de la part des autorités intérimaires du Niger. C'est pourquoi il faut espérer que cette reconnaissance par l'ONU, marquera un tournant dans les relations de la junte avec la communauté internationale. Principalement la CEDEAO, en vue de desserrer l'étau des sanctions qui mettent au supplice le peuple nigérien depuis plus de quatre mois. Pour cela, il faudra non seulement que les protagonistes puissent enfin nouer le dialogue, mais aussi qu'ils soient prêts, chacun de son côté, à faire des concessions.

C'est dire s'il est temps de donner une chance à la concertation. En tout état de cause, les militaires au pouvoir à Niamey ne gagnent rien à entretenir les tensions avec l'organisation sous-régionale. Et ils auraient tort de voir derrière ces reconnaissances successives aux allures de main tendue de la communauté internationale, un quelconque signe de faiblesse. Car, tant que les sanctions de la CEDEAO continueront de peser lourdement sur le peuple nigérien, la situation du pays restera d'autant plus délicate que le défi sécuritaire dans la lutte contre l'hydre terroriste reste entier. Et la junte nigérienne ne doit pas se tromper de combat.

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