Tunisie: 'ARTs du spectacle chez les twayef de Ghbonten' parmi les dossiers 2024 de la liste représentative du patrimoine immatériel de l'Unesco

TUNIS/Tunisie — Le dossier "Arts du spectacle chez les ṭwāyef de Ghbonten" dont la candidature a été déposée en 2021 pour inscription sur la liste du patrimoine immatériel de l'Unesco sous le signe "Twayef Ghbonten vers la mondialité" figure parmi la liste représentative du cycle 2024 regroupant plus d'une soixantaine de dossiers qui sont traités par le Secrétariat de la Convention de l'Unesco 2003 et qui seront examinés par le Comité lors de sa dix-neuvième session en novembre/décembre 2024, lit-on sur le site officiel de l'Unesco.

"Les arts du spectacle chez les ṭwāyef de Ghbonten" avec les appellations vernaculaires "ṭwāleb", "chwāchīn", "jrāyed el-Arab", mentionne un document publié par l'Institut National du Patrimoine (INP), constitue un élément qui marque un vaste territoire couvrant la région du Sud-est tunisien, notamment le gouvernorat de Médenine où il se concentre au niveau du village d'El-Gosba qui abrite cinq troupes, et au village de Mouggar de la délégation de Béni Khedache où deux troupes sont rattachées à la même branche de la communauté tribale des Ghbonten.

Les cérémonies animées par cette forme de spectacle qui s'étalent à travers toute la région, incluent des villages, des centres et agglomérations rurales et urbaines et des villes, aussi bien sur le littoral qu'à l'intérieur : Médenine, Ben Guerdane, Béni Khedache, Koutine, Metameur, Sidi Maklouf, Ksar Jraa, ainsi que l'Ile de Djerba.

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Le nom ṭwāyef Ghbonten (pluriel de ṭayfa) est un nom générique attribué à ces troupes. La troupe (ṭayfa) est composée de sept à onze membres sous la direction d'un rāyes (littéralement nautonier) et de baḥriya (matelots), d'un batteur et d'un crieur. En plus des oeuvres empruntés à l'anthologie populaire, le rāyes compose lui-même des poèmes que tout le groupe va apprendre et chanter selon le rythme et l'air convenables, rapporte l'INP.

Les "ṭwāyef" se préparent dès le printemps à l'animation des cérémonies nuptiales, organisées traditionnellement pendant l'été chez les tribus du Sud-est tunisien. Pour ce faire, le rāyes rassemble les membres de sa troupe et veille à ce qu'ils apprennent correctement les poèmes, les chants et répètent les danses et les rythmes au cours de séances d'apprentissage et de réapprentissage qui s'étalent sur plusieurs semaines. Le tambourin (ṭbal) est l'unique instrument utilisé par les ṭwāyef de Ghbonten.

Les arts du spectacle de ces troupes s'inscrivent dans la tradition séculaire des poètes voyageurs, sorte de bardes des tribus du Sud tunisien. Quand les ṭwāyef introduisirent à cette tradition orale le tambourin mobile (chenna), les chants et les danses, un spectacle plus varié a vu le jour. Ces troupes sont devenues de véritables animatrices des festivités matrimoniales de ces tribus qui commençaient progressivement à se sédentariser avec l'avènement du protectorat français et l'érection d'un grand nombre de villages dans toute la région. Ainsi ont-ils pu joindre le plaisir procuré par l'audition de la poésie orale de tradition bédouine, à la percussion et la danse, expression toute humaine de la joie.

Le spectacle est guidé par un rituel scrupuleusement observé par la troupe. Le tambour est placé au centre de l'arène, derrière lui se tient le batteur et le crieur; les assistants sont assis en cercle : les femmes d'un coté et les hommes de l'autre ; une vielle femme brule l'encens et fait le tour du cercle. La première chanson est souvent en louange à Dieu pour bénir le mariage, elle est chantée par le rāyes et reprise par les deux rangées de chanteurs, lui faisant chorus. Tous les membres du groupe sont habillés de larges drapés (ḥūli) d'un blanc immaculé qui tranche avec le rouge écarlate des chéchias et des foulards qu'ils portent autour du col et qu'ils arborent ensuite en suivant le rythme du tambourin.

Jouissant d'un esprit de résilience aux mutations socioculturelles, les ṭwāyef Ghbonten n'en finissent pas de bénéficier d'une attention particulière de la part des instances officielles à tous les niveaux de la hiérarchie culturelle et administrative en général, et de donner spectacle sur spectacle.

Dans tout le Sud-est tunisien, ces troupes sont sollicitées de toute part pour animer les cérémonies officielles et célébrer les événements de la vie familiale: mariage, circoncision, retour de pèlerinage. Les ṭwāyef de Ghbonten sont couramment invitées à participer aux cérémonies officielles et autres festivités nationales et internationales. A titre d'exemple ils ont été invités à l'ouverture de la coupe d'Afrique des nations en Tunisie en 1994 et 2004.

Outre des apparitions dans diverses émissions radiophoniques et télévisuelles, ces troupes ont eu des participations à des festivités internationales au Maroc, en Libye et en République démocratique du Congo et fait des apparitions dans des films documentaires dont un film allemand portant en sous-titre, "ṭwāyef", un documentaire sur ces troupes tourné en 2020 par le Centre d'Arts dramatiques de Médenine. Les ṭwāyef ont bénéficié de plusieurs subventions du ministère de tutelle, et plusieurs de leurs membres disposent de cartes professionnelles comme tout autre artiste confirmé.

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