Ile Maurice: Ram Dhurmea, le bouc émissaire

«Pa koné kifer mo gagn linpresion Ram Dhurmea enn viktim. Li enn simp staff konparé a...» ou encore «zot servi bougla kouma scapegoat sé tou». Un bouc émissaire. Les Mauriciens sont persuadés que le gouvernement tente de jeter toutes les blâmes sur Ram Dhurmea, qui a quitté, selon le Premier ministre, son poste de directeur général de Météo Maurice lundi. Pourtant, à 10 h 30 le même jour, celui qui possède un doctorat en Geostatistical Modelling et une maîtrise en Applied Meteorology était toujours en poste alors qu'il venait être nommé directeur général en décembre...

Dans le bulletin de 4 heures lundi, la météo avait mis en garde la population. «Il est conseillé au public à Maurice de prendre les précautions préliminaires. Des nuages actifs associés à Belal commenceront à influencer le temps sur l'île dans les heures qui viennent. Le temps sera couvert avec des pluies intermittentes localement fortes et accompagnées d'orages. Les pluies deviendront plus fréquentes dans l'après-midi. Ces fortes averses provoqueront localement des accumulations d'eau et des inondations», avait prévenu la météo. Pravind Jugnauth, dans sa déclaration télévisée lundi en début de soirée, a affirmé que son gouvernement a pris des décisions lundi matin en se basant sur les informations que la météo lui a fourni et qu'il était «en colère» à cause de ces informations.

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La perception du public est que l'ancien directeur de la météo paie le prix de l'incompétence du gouvernement qui tente de sauver les meubles après la catastrophe de lundi. La déclaration du ministre des Collectivités locales, Anwar Husnoo, a semé la confusion dans la tête de la population, tout en persuadant celle-ci que c'est le gouvernement qui décide ce que doit faire la météo. Il avait ainsi déclaré dimanche soir qu'il était possible que l'alerte I allait être enlevée lundi matin si le cyclone maintenait sa trajectoire du sud, alors que Ram Dhurmea avait dit tout son contraire. D'ailleurs, les prévisionnistes avec lesquels l'express s'était entretenu dimanche avaient maintenu qu'une trajectoire du sud ne changerait en rien. L'alerte I allait être maintenue lundi matin quoiqu'il arrive et que la météo allait émettre un avis de classe II le matin si Belal s'infléchissait vers le sud-est. Or, il n'y a jamais eu de classe II malgré le changement de trajectoire. Difficile de dire pour quelle raison.

Un ancien directeur général de Météo Maurice affirme que les prévisionnistes avaient raison de dire qu'ils n'allaient pas enlever l'alerte I même si Belal continuait vers le sud. «Tous les prévisionnistes ainsi que les météorologues le savent. Tant qu'un cyclone est au nord de Maurice, il ne faut jamais enlever une alerte, même si les prévisions font croire qu'il s'éloignera. Un cyclone a toujours tendance à descendre dans une direction générale du sud. Il suffit d'un infléchissement à l'est ou à l'ouest, dépendant de son positionnement, pour l'emmener le plus près de nous. Nous avons toujours attendu qu'un cyclone ou une tempête soit au sud de Maurice pour lever les alertes, même si le cyclone prenait une trajectoire qui semblait l'emmener loin de nous», insiste-t-il.

Cependant, depuis que la Mauritius Meteorological services Act a été amendée et promulguée le 18 novembre 2019, tout directeur général de la météo est dans l'obligation d'appliquer la politique du ministère des Collectivités locales et doit exécuter les missions que lui confère le ministre. Cette loi stipule également que le ministre des Collectivités locales peut donner des instructions à caractère général au directeur de la météo, non contraire à la loi, dans l'intérêt public et qu'il doit les appliquer.

L'express avait dénoncé cette loi quand l'ébauche avait été avalisée par le Conseil des ministres en 2019* Après l'événement de lundi, nous avons sollicité une nouvelle fois Subiraj Sok Appadu. «La météo n'est pas comme elle était autrefois. D'abord, la météo est un département vital pour la population. Elle était sous la responsabilité du Premier ministre alors que maintenant non seulement elle tombe sous un simple ministre, mais celui-ci peut même donner des instructions à son directeur général», regrette-t-il. Subiraj Sok Appadu affirme que quand il était directeur général, il ne cherchait même pas l'avis du Premier ministre pour émettre un avis cyclonique. «Toutefois, pour l'alerte III, synonyme de l'arrêt total de l'économie du pays, mes prédécesseurs et moi-même, nous en informions le Premier ministre, qui est plus apte à comprendre les choses avec ses conseillers au lieu d'un ministre comme c'est le cas actuellement», rappelle-t-il. Il regrette que les choses ne soient plus comme avant...

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