Tunisie: Projet de loi relatif à la révision du décret sur la réconciliation pénale - Une loi, des amendements et plus d'efficacité

23 Janvier 2024

La principale innovation du projet est de soustraire à ladite commission le pouvoir décisionnel et de l'attribuer au Conseil de sécurité nationale. En e et, désormais, c'est le Conseil de sécurité nationale, présidé par le Chef de l'Etat, qui a la compétence exclusive d'arbitrer.

Le projet de réconciliation pénale a été conçu dans l'objectif d'assurer des fonds à l'Etat pour lancer des projets d'investissement et de développement dans les zones les plus défavorisées. C'est aussi un mécanisme permettant à ceux qui ont fauté de payer leurs dettes envers la société. Et, une tentative de garantir la dignité d'une population longtemps laissée pour compte. Aujourd'hui, après un amendement adopté par l'Assemblée des représentants du peuple (ARP), tous les espoirs sont permis, bien que ce processus connaisse des difficultés et certaines réticences. En e et, l'Assemblée des représentants du peuple a ratifié, il y a quelques jours, un projet de loi relatif à la révision du décret n° 13 daté du 20 mars 2022, portant sur la réconciliation pénale et l'affectation de ses revenus, dans sa version modifiée, avec l'approbation de 126 députés. Le texte a été sitôt publié dans le Jort.

Dans une première lecture, ce projet de loi a procédé, à travers la modification de 17 articles du texte initial, à une véritable refonte du système de la conciliation pénale. Ainsi, le nouveau texte a-t-il subi une vraie refonte avec des amendements portant tant sur le plan organique que sur le plan fonctionnel, et limite considérablement les prérogatives de la commission nationale de réconciliation pénale qui prend désormais la forme d'un simple organe technique, voire administratif.

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La principale innovation du projet est de soustraire à ladite commission le pouvoir décisionnel et de l'attribuer au Conseil de sécurité nationale. En effet, désormais, c'est le Conseil de sécurité nationale, présidé par le Chef de l'Etat, qui a la compétence exclusive d'arbitrer.

Il faut rappeler que l'adoption de cet amendement s'est déroulée sur fond de divergences entre la ministre de la Justice, Leila Jaffel, et des députés au sujet de certains points litigieux. Faisant son plaidoyer, la ministre de la Justice a déclaré que le projet de loi s'inscrit dans la perspective de rationaliser davantage les méthodes de travail de la commission chargée de ce dossier. « Ledit projet vise à trouver des solutions appropriées aux problèmes pratiques rencontrés par la commission lors de l'exercice de sa mission et à simplifier le processus de traitement des dossiers qui lui sont soumis », a-t-elle expliqué.

Pour une meilleure flexibilité

Evoquant les prérogatives accordées au Conseil de sécurité nationale en matière de réconciliation pénale, la ministre a souligné que les décisions émanant dudit conseil ne seront pas " arbitraires " ou " irrévocables ", assurant qu'elles peuvent être révisées, le cas échéant, par les commissions spécialisées créées à cet e et. Pour revenir sur ces amendements et les implications sur l'ensemble du processus de réconciliation pénale, nous avons contacté un juriste qui a préféré garder l'anonymat. Selon lui, ce nouveau projet de loi apporte un changement radical à tout le mécanisme de réconciliation pénale dans une tentative non seulement d'écourter les délais, mais aussi de perfectionner les procédures.

Et de rappeler que ces amendements ne sont pas forcément synonymes d'allégement des procédures aussi lourdes, longues et complexes d'investigations, d'instruction et l'accomplissement de toutes les voies administratives et juridictionnelles. Selon son explication, tout reste tributaire du fonctionnement de la commission et de sa relation avec les différentes autres composantes, mais aussi de l'adhésion des personnes concernées qui marque, jusque-là, une première entrave.

Notre interlocuteur estime que certaines procédures peuvent entraver davantage ce processus en dépit de ces amendements d'envergure. « L'accord de conciliation ne peut être conclu de manière définitive que si le demandeur procède préalablement au paiement au comptant. Or, il est diffcile pour ces personnes de mobiliser d'énormes fonds vu la crise de liquidité qui frappe le pays », explique-t-il, ajoutant qu'il s'attendait à une meilleure flexibilité au niveau de paiement des sommes dues.

Les réserves des députés

Si ce projet de loi a été adopté, il n'a pas fait l'unanimité sous le dôme de l'ARP. A cet e et, le président de la commission de législation générale de l'Assemblée des représentants du peuple, Yesser Gourari, a assuré que certains députés ont fait part de leurs réserves quant à certains points.

« La commission a apporté certains changements à ce nouveau projet de loi comme la modification des délais et l'ajout d'une nouvelle procédure de réconciliation », a-t-il analysé à La Presse, affirmant que certaines propositions des élus ont été rejetées par la ministre de la Justice, partie initiatrice du projet de loi. Et d'expliquer, qu'au sujet de l'inflexibilité de certaines procédures, que le nouveau texte prévoit, au contraire, des délais de paiement sous garantie et des procédures impliquant la mise en place de projets de développement au lieu de payer des sommes d'argent. Une option pour pallier le problème de liquidité.

L'initiative du Président de la République portant sur la réconciliation pénale a fait son chemin dans un contexte économique di cile et ambitionne de mobiliser de nouveaux fonds au profit du développement local. Mais en dépit de la mise en place de la commission responsable de l'application des différents articles dudit décret, certaines entraves se dressent devant les ambitions du Président de la République de voir une telle initiative se concrétiser, ce qui a conduit à son amendement.

La réconciliation pénale vise à se substituer aux poursuites pénales, et ce, par le paiement de sommes d'argent ou par la réalisation de projets nationaux, régionaux ou locaux. Ledit décret est appliqué aux personnes qui font l'objet de procédures judiciaires pour crimes financiers et économiques et à toutes les personnes concernées par le décret-loi n° 2011- 13 du 14 mars 2011, portant confiscation d'avoirs et de biens meubles et immeubles. Il est également destiné aux personnes qui ont profité des biens confisqués. La réconciliation pénale couvre également certains domaines dont le blanchiment d'argent, la fiscalité, la douane, le change, le marché financier et les institutions financières, la corruption, les biens publics et l'argent public.

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