Madagascar: Santé de la reproduction - Plus de 81% des femmes qui avortent affirment leur chrétienneté

L'Eglise a toujours martelé que l'avortement consistait à tuer. Dans sa thèse sur « L'avortement à Madagascar : des pratiques aux droits humains », Mbolatiana Raveloarimisa, membre fondatrice du mouvement Nifin'Akanga, évoque que plus de 81% des femmes ayant déjà avorté se déclarent chrétiennes.

La proposition de loi sur l'interruption thérapeutique de grossesse (ITG), déposée par le mouvement Nifin'Akanga et la députée Masy Goulamaly, n'est toujours pas inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Bien que ce mouvement féministe ait toujours soutenu que l'ITG concerne strictement et uniquement l'interruption de grossesse pour motif médical, les églises, catholiques romaines à Madagascar et protestante FJKM, se sont déjà prononcées contre l'avortement sous toutes ses formes. L'Eglise signe, persiste et estime que l'avortement consiste à tuer mais la réalité est tout autre pour les chrétiennes. Mbolatiana Raveloarimisa a récemment présenté une thèse sur « L'avortement à Madagascar : des pratiques aux droits humains » qui révèle que « plus de 81,05% des femmes enquêtées ayant déjà avorté se déclarent chrétiennes, protestantes ou catholiques. Les athées représentent 5,68%, les musulmanes 5,4% ». C'est le résultat des enquêtes et des consultations menées dans sept régions de Madagascar en septembre 2021 à travers le mouvement Nifin'Akanga. La population étudiée est de 4 478 personnes dont 3 568 femmes et 910 praticiens.

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Chiffres

Dans sa thèse, Mbolatiana Raveloarimisa rapporte également que les filles/femmes avortent ou se font avorter à tout âge. La population étudiée a entre 14 et 50 ans au moment de l'acte. La moyenne d'âge est de 27 ans. Les femmes de plus de 25 ans forment 61,37%, celles de plus de 35 ans représentent 27,5%. Les moins de 18 ans représentent 8,31%. Les femmes avortent peu importe leur niveau d'études et celles ayant atteint le niveau universitaire sont les plus représentatives. Aussi étonnant que cela paraisse, les femmes en couple stable avortent plus que les femmes célibataires soit 51,04% contre 48,48%. 52,5% des avortements se déroulent dans des conditions non-appropriées et non-médicalisées, ce qui expose les sujets à des risques graves de complication. La grossesse précoce et la grossesse non-désirée figurent parmi les trois premières raisons des avortements à Madagascar et pour les trois causes graves : le viol représente 15,36%, l'inceste 6,54%, les raisons médicales et ou thérapeutiques 78,1%. L'hémorragie est la première complication due à l'avortement insécurisé (46,3%).

Droits

L'hypothèse de départ de cette étude porte sur une analyse des pratiques entourant l'avortement à Madagascar qui révèle encore des lacunes significatives dans la protection des droits humains des femmes, et mettant en lumière des enjeux politico-religieux, juridiques, sociaux et culturels entravant l'accès effectif aux services d'avortement légaux et sécurisés. Le protocole de Maputo ou la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples sur les droits des femmes en Afrique, est le premier instrument juridique international contraignant en matière de droits de l'Homme à garantir clairement le droit à l'avortement légal dans son article 14-2C. Il exige que les Etats parties autorisent l'avortement en cas d'agression sexuelle, si la grossesse présente un risque pour la vie ou la santé physique ou mentale de la personne enceinte et en cas de diagnostics foetaux spécifiques. Sur les 55 États africains, huit dont Madagascar, l'ont signé sans le ratifier et trois n'ont ni signé ni ratifié.

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