Afrique de l'Ouest: La lutte pour la dignité

5 Février 2024

Une semaine après le retrait des trois pays de l'Alliance des Etats du Sahel (AES), le Burkina, le Mali et le Niger de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), le Président de la transition burkinabè, le capitaine Ibrahim Traoré, est revenu de long en large dans un entretien, sur les motivations de cette décision inédite.

Il a exposé les raisons qui ont poussé ces trois Etats fondateurs de la CEDEAO à claquer la porte. Les pays de l'AES sont partis sans renoncer à leur idéal de panafricanistes, convaincus que, unis et débarrassés des scories de l'histoire, l'Afrique, considérée comme le berceau de l'humanité, peut s'en sortir. Pourvu qu'une vision soutenue et bien dessinée, qui prend en compte les forces du continent, soit clairement définie.

Face au scepticisme alimenté par des discours longtemps entretenus et tendant à maintenir les pays africains dans les chaines de la dépendance, le capitaine Traoré se montre à la fois réaliste et ferme à travers des réponses précises. « Oui ce ne sera pas facile », « Non, il ne faut pas renoncer », « Nous tenons le bon bout », « Ce n'est pas de gaieté de coeur que de tourner le dos à une organisation, mais, c'est à l'issue d'une analyse profonde », « De cette organisation qui était censée donc créer l'entraide, la solidarité, nous n'avons jamais reçu d'aide.

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Aucun soldat, aucune logistique, aucune compassion », « Les gens sont fiers de citer les millions de déplacés internes dans ces contrées. Mais qu'est-ce que vous faites pour les aider ? Rien », voilà entre autres propos tenus par le chef de l'Etat burkinabè et qui en disent sur la profondeur de la mesure de retrait de la CEDEAO. Le temps édifiera bien de personnes sur cette situation qui met en pole position la question de la crédibilité de nos institutions et regroupements sous régionaux et régionaux.

De l'Union africaine aux organisations sous régionales, il faut certainement faire le bilan et quitter la sempiternelle théorie, que ce sont des instruments de souveraineté, surtout quand ces institutions tirent l'essence de leur fonctionnement d'une puissance extra africaine, qui depuis des lustres, est accolée aux pays dits pauvres pour un humanisme pas toujours désintéressé. Nul doute que les questions « subsidiaires » ont été prises en compte et seront réglées. Le président Ibrahim Traoré l'a si bien signifié en indiquant : « On a pris le temps d'analyser la situation, de peser beaucoup de choses et enfin de décider.

Le peuple a été assez résilient, il faut le dire. Il a souffert ». Le vin est tiré pour les trois pays de l'AES. Il faut donc le boire et assumer. En quittant la CEDEAO, nos trois Etats deviennent la première puissance, en termes de superficie de la zone avec plus de 2 millions de km² et la deuxième puissance démographique après le Nigéria, supplantant bien de pays africains d'un point de vue des ressources.

Dans cette lutte pour la dignité et la souveraineté, nous gardons notre essence de panafricanistes, héritée de visionnaires qui ont donné à l'Afrique des raisons d'espérer et de prospérer. Le développement de l'actualité dans la sous-région ces derniers jours nous ramène à la réalité que la CEDEAO qui tient à l'organisation à bonne date des élections dans l'espace, comme la prunelle de ses yeux, n'a trouvé mieux que de « prendre note » de la décision d'un report d'élection et « d'exprimer sa préoccupation » quant aux circonstances qui ont conduit à ce report.

Un comportement mi-figue mi-raisin qui apporte de l'eau au moulin de ceux qui pensent que les décisions de l'institution se prennent à la tête du client, parce que, qu'elle provienne d'une personnalité en treillis ou en costume, une entorse à la constitution et au processus démocratique doit être appréciée avec la même lucidité.

Par conséquent, les textes devaient s'appliquer à tous avec la même rigueur, sans quoi, sa crédibilité sera toujours sujette à débat. En tout état de cause, les réflexions au sein de l'AES doivent porter désormais sur les nouveaux mécanismes de gestion et de coopération ; et chaque citoyen dans son domaine peut apporter sa touche au débat.

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