Burkina Faso: Gestion hygiénique des menstrues en milieu scolaire - La gouvernance de l'école appelée à travailler pour des latrines propres

13 Février 2024

De plus en plus, des adolescentes et des jeunes filles en milieu scolaire savent comment gérer leurs menstrues de façon hygiénique sans compromettre leur rendement scolaire.

Dans l'interview ci-après, la directrice générale de l'accès à l'éducation formelle au ministère de l'Education nationale, de l'Alphabétisation et de la Promotion des langues nationales du Burkina, Ouédraogo Rasmata, reconnait que le défi reste l'entretien des latrines dans les établissements scolaires et appelle les élèves, les enseignants et les parents d'élèves à travailler à garder ces lieux toujours propres.

Sidwaya (S) : Qu'est-ce que vous entendez par la Gestion hygiénique des menstrues (GHM)?

Rasmata Ouédraogo (R.O.) : Je suppose qu'il faut donner l'information et les moyens aux jeunes filles de se protéger, d'être propres et en bonne santé. Les menstrues ou les règles sont un phénomène biologique que les femmes vivent depuis l'âge de la puberté jusqu'à la ménopause. Les filles doivent savoir ce que c'est que les menstrues, comment se protéger et être propres et avoir la santé parce qu'il y a une hygiène à maintenir durant la période des menstrues.

S : Y a-t-il un module d'enseignement sur la GHM au profit des adolescentes et des jeunes filles en milieu scolaire ?

R.O. : C'est autour des années 2013 que la GHM a commencé à faire l'objet d'études au niveau du ministère en charge de l'éducation avec ses partenaires dont l'UNICEF, à travers une petite étude. Avant cela, la question était abordée sous forme de puériculture depuis les classes de CM1 et CM2.

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Puis, en 2014, une recherche-action plus étendue a été menée par le Ministère de l'Education nationale, de l'Alphabétisation et de la Promotion des langues nationales (MENAPLN) avec l'appui de l'UNICEF. A l'issue de cette recherche-action, il y a eu la formation d'un certain nombre d'acteurs sur la gestion hygiénique de menstrues avec des partenaires, l'UNICEF et Emory University (une université américaine).

A partir de cette étude, on a découvert des insuffisances, les élèves n'avaient pas d'informations justes sur la GHM. Et, on a proposé un certain nombre d'outils pour aider les filles et les acteurs de l'éducation à la gestion hygiénique des menstrues en milieu scolaire. Il s'agit d'un bracelet pouvant aider à compter le cycle de la femme, un livret et un guide pour les jeunes filles.

Le MENAPLN est, depuis un certain temps, dans un processus de réforme curriculaire et la GHM a été intégrée dans les curricula. Depuis la classe de CE2, ce module est enseigné. Chez nous à l'éducation, on donne l'information à la jeune fille avant qu'elle ne voie ses règles. Ensuite, on approfondit les connaissances au fur et à mesure.

Aujourd'hui, le MENAPLN a pris les dispositions pour qu'en milieu scolaire, la jeune fille ait

l'information sur la GHM avant de voir ses premières règles.

S : Quels conseils donnez-vous aux jeunes filles en milieu scolaire ?

R.O. : Nous conseillons qu'à deux jours avant les règles, les filles mettent dans leurs sacs une serviette hygiénique pour qu'en cas de surprise, elle puisse se protéger. Egalement, on demande aux élèves de s'organiser en club avec un sous-club gestion hygiénique des menstrues. Au sein des clubs, les élèves se retrouvent pour discuter des problématiques diverses qu'ils rencontrent et qui peuvent impacter leurs études. Certains de nos partenaires ont développé une latrine spécifique, une latrine GHM, où quand la fille rentre, elle a tout le dispositif pour, soit laver les mains ou bien changer sa serviette, ou encore même ranger, jeter sa serviette déjà utilisée.

S : Qu'en est-il de la fabrication des serviettes hygiéniques réutilisables ?

R.O. : Nous apprenons aux filles à fabriquer des serviettes hygiéniques réutilisables dans les écoles. La GHM est un problème de genre. On se rend compte qu'en fait, c'est en voulant sonder la question de genre dans l'utilisation de l'eau à l'école, qu'on s'est rendu compte que la fille aurait besoin de plus d'eau parce qu'elle vit ce phénomène des menstrues. En fait, à l'école, on n'a pas toujours donné l'information à temps à la fille pour qu'elle gère ses menstrues.

La GHM est en même temps un problème de genre, un problème de santé, un problème de droit à l'éducation. Si, la jeune fille n'a pas d'informations justes, cela peut lui causer des absences à l'école et influencer négativement ses performances scolaires. Elle peut être stressée et souvent stigmatisée.

Pendant nos sensibilisations, des encadreurs nous ont dit qu'il y a des abandons scolaires qui ont des liens avec les menstrues. Si, une jeune fille se laisse surprendre par ses menstrues et que ses camarades se moquent d'elle, elle peut être stigmatisée et abandonner l'école. C'est pourquoi, on dit à la jeune fille, les règles ne doivent pas t'empêcher d'aller à l'école. Il faut qu'elle participe à toutes les activités scolaires.

S : De façon générale, quel est l'état des lieux de l'accès aux équipements adaptés en milieu scolaire?

R.O. : Pour que la gestion hygiénique des menstrues en milieu scolaire soit bien assurée, il faut des latrines propres et sécurisées. Il faut aussi de l'eau, du savon et des serviettes. Nous ne demandons pas à l'école de payer les serviettes pour les élèves. Nous demandons aux élèves de s'organiser avec l'appui des parents d'élèves afin de disposer d'un minimum pour se secourir.

Selon les normes éducatives dans chaque école, il y a des latrines. Cependant, les utilisateurs peuvent ne pas bien les entretenir. Les latrines ont toujours été les lieux les moins bien entretenus, même dans nos concessions. Sinon, systématiquement dans une école, il y a des latrines pour filles et garçons. La vraie question est l'entretien des latrines dans nos écoles. Il faut que la gouvernance de l'école s'organise avec les élèves et les parents d'élèves pour qu'il y ait des nettoyages réguliers.

S : Quel défi se pose dans la GHM ?

R.O.: La problématique de l'hygiène des menstrues est prise en charge au niveau du MENAPLN aussi bien dans les aspects pédagogiques que dans les aspects parascolaires. Nous faisons appel aux acteurs et aux partenaires d'apporter leur soutien pour l'hygiène à l'école de façon générale, c'est-à-dire, l'entretien des latrines et la disponibilité de l'eau, que les Associations des parents d'élèves (APE) et les Comités de gestion (COGES) puissent apporter leur contribution pour que le cadre de vie de nos enfants soit bien entretenu et toujours propre.

Le défi, c'est la propriété des toilettes dans les écoles. Parce que lorsque nous avons fait la réflexion, on a pensé à avoir une latrine GHM, une latrine spécifique GHM, mais tous les modèles qu'on a conçus jusqu'à présent sont un peu trop chers. Ainsi, améliorons ce que l'on a comme toilettes en les gardant propres. Il faut aussi de l'eau propre, du savon et une poubelle pour recevoir les déchets des menstrues.

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