Ile Maurice: Le «kanwar» surdimensionné - Source de division et de danger

Le Maha Shivaratree version 2024 s'est terminé dans la nuit d'hier avec les grandes prières nocturnes dédiées à Shiva. 2024 aura été riche en leçons et il faudrait procéder à un rethink majeur de la façon dont les processions seront organisées en 2025.

Le cas des deux kanwartis (porteurs de kanwar) morts électrocutés en 2023 n'aurait eu qu'une incidence mineure sur la passion avec laquelle des jeunes, surtout dans les villages, confectionnent des kanwars. Au fil des décennies, ces kanwars sont devenus gigantesques. Depuis quelques années, des générateurs ont été adoptés comme accessoire et certains kanwars transformés en discothèques mobiles avec hauts-parleurs massifs. La créativité sans bornes et sans limites est entrée en jeu.

Toute cette démonstration de force et d'espace a fini par créer une intense compétition au niveau des quartiers et des villages, chacun voulant occuper la première place en termes de dimension du kanwar. Le plus haut l'engin, le plus «mari» l'on est. Cet esprit de compétition engendre des sentiments négatifs qui vont à l'encontre de l'unité et du partage.

Puisque les kanwars étaient déjà construits au moment du drame d'Arsenal, il aurait été difficile de tout remettre en question. Les jeunes créateurs étaient tout fiers de l'oeuvre exécutée pendant des semaines et il était humainement très difficile de leur dire d'abandonner leurs chars. Certains comme les jeunes de Pointe-aux-Piments ont compris l'enjeu et préféré garer leur immense kanwar dans l'enceinte de leur temple et se diriger vers Grand-Bassin à pied sans s'encombrer d'autres accessoires pour rendre la marche facile et fluide.

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Il serait fort regrettable que l'enthousiasme débordant des jeunes et leur sens de créativité soient réprimés dans le contexte de 2025. Il faudrait principalement mais radicalement revoir les dimensions, c'est-à-dire la hauteur et la largeur de leurs oeuvres.

Les jeunes qui armés de fourches s'affairent frénétiquement à rehausser les câbles électriques afin que passe le kanwar gigantesque feraient mieux d'aider à contrôler la circulation afin que les cortèges passent sans encombre.

Les jeunes qui sont artistiquement doués devront continuer à s'exprimer mais dans des espaces réduits.

Il faudrait limiter autant que possible l'utilisation des générateurs. On pourrait trouver d'autres moyens de diffuser des prières et des chants religieux pour maintenir le tempo lors des longues marches.

Il faudrait nécessairement assainir la situation dans sa version 2025. Il serait temps de mettre un terme aux démonstrations de «nou ki mari» au niveau de son quartier ou de son village car cela contribue à créer des sentiments de division à l'intérieur même de la communauté répartie sur l'île entière et qui fête le Maha Shivaratree sur plusieurs jours.

On avait cru à un certain moment à la haute politisation des célébrations du Maha Shivaratree en cette année d'élections générales. À l'exception de la tragédie d'Arsenal et la controverse sur les kanwars surdimensionnés, pas de heurts politiques heureusement. On a vu comment l'ancien Premier ministre Navin Ramgoolam et son épouse Veena ont été accueillis à Grand-Bassin. Mêmes scènes de fraternité et de convivialité quand Pravind et Kobita Jugnauth ont été salués par des pèlerins lors de leur marche de Vacoas à Grand-Bassin.

Si seulement ces monstres qu'on appelle «organisations socioculturelles» réalisaient que leurs membres soutiennent différentes formations politiques et que l'opération pass-diber s'avère finalement contreproductive. Car les karapat finissent toujours par changer de chien après les élections.

Le souhait d'unité exprimé à la base et en faisant abstraction des loyautés politiques et partisanes a été démontré de façon concrète dans la composante de la société mauricienne concernée. Cela dans plusieurs domaines notamment la disparition des antagonismes entre Sanatanistes et Arya-Samajistes. D'autre part, les cloisonnements créés par l'endogamie de caste ou de sous-caste qu'on pratiquait dans le passé ont disparu dans l'île Maurice moderne. Sans l'exogamie, on finirait par mourir célibataire.

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